Aung San Suu Kyi a été inculpée pour avoir enfreint une obscure règle commerciale. Plusieurs autres responsables de la Ligue nationale pour la démocratie (LND) ont également été interpellés.
Les généraux militaires ont d'ailleurs poursuivi les interpellations dans le pays, malgré les condamnations internationales. Win Htein, 79 ans, vétéran de la LND, "a été interpellé au domicile de sa fille" à Rangoun vendredi à l'aube, tout comme le réalisateur Min Htin Ko Ko Gyi, qui a déjà fait de la prison pour avoir critiqué l'armée.
Quatre jours après l'arrestation d'Aung San Suu Kyi, près de 150 responsables politiques et activistes, ont été arrêtés, d'après les données de l'Association d'assistance aux prisonniers politiques, une ONG basée à Rangoun.
Manifestations à Rangoun
En parallèle, des centaines de manifestantes et de manifestants se sont réunis à Rangoun, la capitale économique du pays, pour protester contre ce coup d'État, qui a eu lieu dans la nuit de dimanche à lundi. Plusieurs centaines de professeurs et d'étudiants se sont réunis devant l'Université Dagon, dans ce qui constitue la première manifestation de cette importance contre le putsch
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Les manifestants ont fait le salut à trois doigts, geste de résistance utilisé par des mouvements pro-démocratie notamment en Thaïlande, et scandant un vieux chant popularisé lors du soulèvement de 1988 violemment réprimé par l'armée. Certains ont appelé à la grève générale tant que les généraux militaires garderont le pouvoir.
Des fonctionnaires de plusieurs ministères ont également cessé temporairement le travail dans la capitale, Naypyidaw, arborant un ruban rouge, couleur du parti d'Aung San Suu Kyi.
La veille, des avocats et médecins avaient pris part à la protestation, tandis que des habitants de Rangoun klaxonnaient et tapaient pour la troisième soirée consécutive sur des casseroles pour "chasser les démons" du pouvoir, un acte de résistance devenu rituel, tous les soirs à 20h depuis lundi.
Une figure "trop critiquée"
Déconsidérée aux yeux de l’Occident pour avoir refusé de désavouer l’action de l’armée birmane lors des massacres perpétrés contre la minorité musulmane Rohingyas, l’icône de la démocratie Aung San Suu Kyi a également fait face à des critiques très sévères et avait vu sa popularité baisser dans les zones ethniques, comme l'Etat d'Arakan.
Mais aujourd’hui, les Birmans semblent faire front uni contre le régime militaire. Certains expriment même une colère contre ceux qui, en Birmanie et dans la communauté internationale, auraient "trop critiqué" Aung San Suu Kyi, sans voir qu’elle était "la seule alternative possible" dans ce pays.
jop avec ats
Les événements en Birmanie restent au coeur de l'agenda international
Le président américain Joe Biden a exhorté les généraux putschistes à "renoncer au pouvoir", son administration envisageant des "sanctions ciblées" contre certains.
La Chine et la Russie se sont opposées à une telle formulation, selon des diplomates s'exprimant sous couvert d'anonymat. Pékin reste le principal soutien de la Birmanie aux Nations unies, où elle a contrecarré toute initiative contre l'armée lors de la crise des musulmans rohingyas.
En revanche, l'ONU a adouci le ton. Le Conseil de sécurité a adopté une déclaration commune, exprimant sa "profonde préoccupation" et appelant à la libération des détenus, mais ce texte ne condamne finalement pas le coup d'Etat.