La sentence la plus lourde a échu au jeune militant Chems Eddine Laalami, dit Brahim, qui s'est vu infliger deux ans de prison, assortis d'une amende de 200'000 dinars (1339 francs), par le tribunal de Bordj Bou Arreridj, près d'Alger. En détention provisoire depuis le 9 septembre 2020, cet homme de 29 ans devait répondre de six chefs d'accusations.
Il a été acquitté pour trois d'entre eux, mais condamné pour "offense au président de la République", "outrage à corps constitué" et "publication de fausses informations", a précisé l'avocat et membre du collectif de défense de l'accusé. Le parquet avait requis quatre ans de prison ferme et une amende de 500'000 dinars (3347 francs).
Trois autres condamnations
Par ailleurs, une enseignante de l'université d'Annaba et militante pro-Hirak a été condamnée à un an de prison, dont six mois ferme. Le parquet avait requis 2 ans de prison ferme à son encontre pour "publications pouvant porter atteinte à l'intérêt national".
En outre, deux autres hirakistes ont reçu des peines de 6 mois de prison, dont 3 mois ferme. Placés sous contrôle judiciaire, ils étaient poursuivis, entre autres chefs d'accusation, de "financement étranger pour des actes ayant pour but d'atteinte à la sécurité de l'État", selon le Comité national pour la libération des détenus (CNLD).
Ces sentences sévères surviennent dans un climat de crispation du régime, confronté à une multicrise politique, sanitaire et socio-économique, à une semaine de l'anniversaire du Hirak, déclenché le 22 février 2019.
"Acharnement judiciaire"
Devenu une des figures du mouvement de contestation, Brahim Laalami, un tailleur de 29 ans, était sorti quelques jours auparavant à Bordj Bou Arreridj avec une grande pancarte dénonçant la candidature à un cinquième mandat de l'ancien homme fort Abdelaziz Bouteflika.
Le Hirak avait éclaté quelques jours plus tard, forçant Abdelaziz Bouteflika à démissionner au mois d'avril suivant. "Nous avons boycotté le procès car nous avons estimé qu'il n'y avait pas les garanties d'un procès équitable", a expliqué l'avocat de Brahim Laalami. Celui-ci avait déjà été condamné à trois ans d'emprisonnement, dont une partie a été purgée, lors de précédents procès.
ats/vajo
Des centaines de personnes ont marché
Amnesty International a condamné le jugement, soulignant que "personne ne devrait être condamné pour avoir exercé son droit à la liberté d'expression". Amnesty et la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH) ont réclamé à nouveau la libération des détenus d'opinion en Algérie.
Une marche organisée pour "le départ du +système+ (au pouvoir), pour la libération des détenus et contre la répression des libertés" a regroupé plusieurs centaines de personnes lundi à Béjaïa, grande ville de Kabylie (nord-est), d'après la LADDH.
Plus de 70 personnes sont actuellement emprisonnées en Algérie en lien avec les protestations du Hirak et/ou les libertés individuelles, selon le CNLD. Des poursuites fondées dans au moins 90% des cas sur des publications critiques envers les autorités sur les réseaux sociaux, d'après un bilan du CNLD.