Il s'agit de la première décision de la justice civile
américaine en faveur d'une libération sur le sol américain, une
option qui a toujours été énergiquement refusée par le gouvernement
Bush. Interrogé par l'AFP, le ministère de la justice n'avait pas
répondu en fin de matinée s'il entendait interjeter appel de cette
décision.
Il s'agit d'une «étape importante», a réagi l'organisation Human
Rights Watch dans un communiqué. «La situation des Ouïgours est un
rappel cru du bourbier judiciaire et moral que représente
Guantanamo», a estimé de son côté l'Association de défense des
libertés civiles (Aclu).
Détenus pour leur propre sécurité ?
Le casse-tête chinois des détenus Ouïgours, une minorité
turcophone et musulmane, a commencé en 2004, lorsque le
gouvernement a admis pour la première fois qu'ils ne constituaient
pas un danger pour la sécurité nationale et devaient être renvoyés
dans leur pays, comme des dizaines d'autres détenus l'ont
été.
Sauf que ces Ouïgours sont, l'administration Bush le reconnaît,
persécutés par Pékin, et directement menacés de torture et de mort,
de telle sorte que Washington refuse de les renvoyer. Depuis donc,
ces hommes restent détenus dans le centre de détention de l'armée
américaine situé dans la baie de Guantanamo (Cuba). Cette situation
ubuesque a duré, au gré des recours, alors que leurs avocats
protestaient contre leurs conditions de détention
«cauchemardesques».
Dans l'argumentaire fourni au juge Urbina avant l'audience de
mardi, ils rappellent que «au moins six de ces hommes sont toujours
maintenus à l'isolement» dans le camp de haute sécurité du centre
de détention, c'est-à-dire qu'ils passent au moins 22 heures par
jour à l'isolement, dans une cellule entièrement métallique sans
lumière naturelle. En mai 2006, l'Albanie a accepté d'accueillir
cinq détenus mais aucun autre pays n'a pris le risque de
mécontenter le gouvernement chinois en leur donnant asile.
Blanchis, mais enfermés
Le 30 septembre dernier, le gouvernement a achevé de blanchir la
totalité des 17 détenus de l'accusation de «combattant ennemi» qui
justifie leur détention à Guantanamo, sans charge ni procès. Ces
hommes demandaient donc leur libération temporaire sur le sol
américain, le temps qu'un pays tiers accepte de les accueillir,
selon les documents judiciaires dont l'AFP a obtenu copie.
L'administration Bush avait prévu de les maintenir dans des
«logements spéciaux» du centre de détention de Guantanamo «jusqu'à
ce qu'ils puissent s'installer dans un pays étranger». Dans son
argumentaire, elle a insisté sur le fait qu'un juge «ne dispose pas
du pouvoir de relâcher (ces détenus) à l'intérieur des frontières
des Etats-Unis», privilège qui revient à l'exécutif, en
l'occurrence le Pentagone.
agences/sbo
250 hommes toujours emprisonnés
Alors que la totalité des quelque 250 hommes toujours emprisonnés à Guantanamo ont engagé des recours pour contester leur détention (Habeas Corpus) grâce à une décision en ce sens de la Cour suprême en juin, d'autres détenus ont été blanchis de leur accusation de «combattant ennemi».
Il s'agit notamment d'Algériens et de Libyens dans l'incapacité d'être libérés parce qu'ils sont menacés dans leur pays d'origine.
Fuyant la Chine, les Ouïgours étaient réfugiés dans des camps en Afghanistan lorsque la coalition est intervenue militairement en Afghanistan après les attentats du 11 Septembre.
Ils ont alors fui vers la frontière avec le Pakistan où ils ont été remis aux autorités américaines par des mercenaires.