Modifié

La mort attend ceux qui continuent la confrontation, avertit la junte birmane

En Birmanie, une marée humaine brave les avertissements de la junte .
En Birmanie, une marée humaine brave les avertissements de la junte . / 19h30 / 1 min. / le 22 février 2021
La junte birmane a encore durci le ton dimanche et a averti les manifestants qu'ils risquaient de mourir s'ils poursuivaient leurs protestations, ce qui n'a pas dissuadé des milliers de personnes de descendre à nouveau dans les rues des grandes villes du pays ce lundi.

"Les manifestants sont en train d'inciter les gens, notamment les adolescents et jeunes exaltés, à se lancer sur la voie de la confrontation, où ils périront", ont averti les autorités dans un communiqué en birman lu sur la chaîne publique MRTV, et dont une traduction anglaise apparaissait à l'écran.

La mise en garde du régime birman de recourir à la force létale pour en finir avec ce qu'elle désigne comme "l'anarchie" est intervenue au terme d'un week-end endeuillé par le décès de trois manifestants et marqué par les funérailles d'une femme qui avait succombé vendredi. Blessée par balles à la tête et décédée après dix jours passés aux soins intensifs, cette jeune épicière est devenue une icône de la résistance anti-junte.

>> Lire à ce sujet : Deux manifestants ont été tués par des tirs de la police en Birmanie

Trois semaines après le putsch du 1er février et l'arrestation de l'ancienne cheffe du gouvernement civil Aung San Suu Kyi, la mobilisation pro-démocratie ne faiblit pas, avec des manifestations quotidiennes et une campagne de désobéissance civile qui perturbe le fonctionnement de l'Etat et l'économie.

Le rapporteur spécial de l'ONU pour les droits humains en Birmanie Tom Andrews s'est dit profondément inquiet par ces menaces et a mis en garde la junte: "Contrairement à 1988, les agissements des forces de sécurité sont enregistrés et vous devrez rendre des comptes", a-t-il écrit sur Twitter.

"L'armée a injustement pris le pouvoir"

La mise en garde du pouvoir n'a pas dissuadé les manifestants de descendre à nouveau lundi dans les rues de Rangoon, où des dizaines de milliers de personnes ont défilé. Les habitants ont constaté un renforcement des dispositifs de sécurité dans la métropole, avec de nombreux camions de la police et de l'armée dans les rues et des barrages aux alentours du quartier des ambassades.

"L'armée a injustement pris le pouvoir au gouvernement civil élu", a dénoncé un manifestant de 29 ans sous couvert de l'anonymat. "Nous nous battrons jusqu'à ce que nous obtenions notre liberté, la démocratie et la justice."

Des milliers de personnes ont aussi manifesté dans la nouvelle capitale administrative Naypyidaw, à Myitkyina (nord) et à Dawei (sud). De nombreux marchés et magasins sont en outre restés fermés à Rangoon et dans d'autres villes après des appels à la grève générale pour amplifier le mouvement de désobéissance civile.

Escalade de la répression

Depuis le début des manifestations massives contre leur coup d'Etat, les militaires ont répondu en renforçant progressivement le déploiement des forces de sécurité et en ayant de plus en plus recours à la force pour disperser les protestataires. Après avoir fait usage de balles en caoutchouc, de gaz lacrymogènes et de canons à eau, les services de sécurité ont même parfois eu recours aux tirs à balles réelles.

Selon une ONG locale d'aide aux prisonniers politiques, 640 personnes ont été arrêtées depuis le putsch. Parmi les personnes ciblées figurent notamment des cheminots, des fonctionnaires et des employés de banque qui ont cessé de travailler par solidarité avec l'opposition à la junte.

>> Ecouter aussi l'analyse de l'émission Tout un monde :

Des musiciens devant l'ambassade de France de Rangoun durant une manifestation contre le coup d'Etat en Birmanie le 19 février 2021. [AFP - Sai Aung Main]AFP - Sai Aung Main
Escalade de la répression du mouvement anti-coup d'Etat en Birmanie / Tout un monde / 4 min. / le 22 février 2021

Sanctions de l'UE

L'Union européenne a décidé lundi de sanctionner les militaires responsables du coup d'Etat en Birmanie, a annoncé le chef de la diplomatie européenne Josep Borell.

"Les ministres des Affaires étrangères de l'UE ont décidé des sanctions ciblées contre les intérêts économiques et financiers des militaires, car dans ce pays ils sont des entrepreneurs et sont détenteurs de pans de l'économie", a-t-il déclaré au cours d'une conférence de presse.

afp/vic

Publié Modifié

L'ONU appelle à "arrêter immédiatement la répression"

"Aujourd'hui, j'appelle l'armée birmane à arrêter immédiatement la répression. Libérer les prisonniers. Mettre fin à la violence. Respecter les droits humains et la volonté du peuple exprimée lors des récentes élections", a déclaré lundi le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres dans une vidéo diffusée à l'ouverture de la 46e session du Conseil des droits de l'homme de l'ONU.

Les ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne doivent en outre se réunir lundi pour discuter d'éventuelles sanctions.

Le pouvoir birman dénonce une ingérence

Le ministère birman des Affaires étrangères a dénoncé dimanche soir une "ingérence flagrante" dans les affaires intérieures du pays après les nombreuses condamnations internationales qui ont suivi le coup d'Etat des militaires.

"Malgré les manifestations illégales, les incitations aux troubles et à la violence, les autorités font preuve de la plus grande retenue en ayant recours le moins possible à la force pour faire face aux perturbations", a affirmé le ministère dans un communiqué.