En ce début de mandat à la Maison Blanche, la géopolitique mondiale est redessinée. Ce sont de nouveaux équilibres qui se mettent en place. Les adversaires sont mieux choisis. Les amis sont bien nommés. Les alliés, sommés de s’amender. Mohammed Ben Salman, soucieux de cultiver la relation privilégiée de son pays avec les Etats-Unis, multiplie les gestes de bonne volonté. Il a compris que Trump c’était fini. Il a, par exemple, levé l’embargo commercial contre le Qatar et fait amende honorable.
Joe Biden veut inscrire les droits humains au cœur de sa politique étrangère. Ses premières décisions répondent à la promesse. Il a édicté des mesures de rétorsion contre les dirigeants birmans, auteurs du coup d’Etat qui a renversé Aung San Suu Kyi. Il ne mâche pas ses critiques envers la Russie dans l’affaire Alexeï Navalny. Il s’en est pris vertement à la Chine et à Xi Jinping, dans une interview à CBS, en des termes peu courants à ce niveau : « Cet homme, dit-il, n’a pas une once de démocratie en lui ».
Obama n’en avait même pas fait autant en début de mandat, et il avait déjà été récompensé par le Nobel de la Paix. Joe Biden a aussi annoncé sa volonté de fermer l’emblématique prison de Guantanamo, promesse non tenue par son prédécesseur démocrate.
Un discours rude donc, mais qui n’interdit pas le compromis. Joe Biden connaît le terrain international, il y a œuvré comme sénateur et comme vice-président, il en connaît les complexités. Sa volonté affichée d’initier une diplomatie des valeurs et de promouvoir la démocratie ne peut que réjouir la Genève internationale dont c’est l’une des expertises et un objectif constant. En revenant dans les institutions internationales, les Etats-Unis vont aussi redonner du souffle au multilatéralisme. Sans faire preuve de naïveté ni d’idéalisme, on peut dire que ce sont des bonnes nouvelles. Pour Genève, et pour la Suisse aussi, qui réaffirme sa volonté de défendre les droits humains dans son récent rapport sur la politique extérieure, même si cela ne fut pas si affirmé lors du récent voyage du conseiller fédéral Ignazio Cassis en Afrique.
La puissance sans la vertu ne serait-elle donc pas pleine et entière ? On en doute en voyant les conflits se multiplier, les rivalités stratégiques croître, et les Etats miser sur la force et la violence pour conquérir des territoires. Mais ce pourrait être, malgré tout, la leçon à vérifier de cette année 2021 : le soft power est une autre manière d’exercer le leadership.
André Crettenand
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