Environ 5000 personnes travaillent quotidiennement sur le site de la centrale de Fukushima Daiichi, dont les réacteurs 1 à 4 avaient été gravement endommagés après le tsunami du 11 mars 2011.
Des enchevêtrements de ferraille çà et là, comme au sommet du réacteur numéro 1 au toit toujours décapité, rappellent la violence de la catastrophe. Et avec leurs signaux sonores stridents, les dosimètres mobiles disposés un peu partout ne rassurent guère. Depuis dix ans, les pourtours des réacteurs ont été déblayés, de nouvelles digues construites, des barres de combustible intactes retirées avec des grues géantes.
Un lent démantèlement
Mais le plus dur reste à faire: extraire près de 900 tonnes de combustible fondu avec d'autres débris devenus eux aussi hautement radioactifs. Le démantèlement avance très lentement, et devrait prendre encore trois à quatre décennies au mieux.
Le développement au Royaume-Uni d'un bras robotique spécial ayant été retardé par la pandémie, le démarrage du retrait du combustible fondu a été repoussé d'un an, à 2022: presque une bagatelle pour un démantèlement devant encore durer 30 à 40 ans, au mieux.
Naoto Kan, qui était Premier ministre en mars 2011, n'est pas très optimiste: "Il reste dans les réacteurs 1, 2 et 3 de la centrale de Fukushima du combustible fondu terriblement radioactif. Contrairement au plan actuel des autorités, je ne pense pas qu'il soit possible d'extraire ce combustible en quelques décennies, ce sera plus long", a-t-il déclaré au micro de la correspondante de RTSinfo au Japon, Karyn Nishimura.
Par chance, le puissant séisme qui a de nouveau secoué le nord-est du Japon le 13 février dernier n'a pas provoqué de tsunami ni causé de dégâts majeurs, y compris à Fukushima Daiichi. Ce tremblement de terre est considéré comme une lointaine réplique de celui de 2011.
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Cela a toutefois accéléré l'écoulement de l'eau de refroidissement dans plusieurs réacteurs, a constaté l'opérateur Tepco. Mais la situation est sous contrôle, assure le groupe, comme cette eau est maintenue en circuit fermé et pompée.
L'eau souterraine des montagnes voisines, devenant radioactive en s'infiltrant dans le sous-sol des réacteurs, a longtemps été un gros problème, désormais atténué par un "mur de glace" de 30 mètres de profondeur et 1,5 kilomètre de longueur sous les réacteurs.
Mais à cause de la pluie également, environ 140 m3 d'eau radioactive par jour en moyenne ont été générées en 2020 sur le site.
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Ces eaux contaminées, filtrées mais contenant toujours du tritium, s'accumulent actuellement dans un millier de citernes bleues, grises et blanches sur le site.
Les capacités de stockage sur place arrivant à saturation à l'été 2022, la solution d'un rejet progressif en mer s'est imposée, mais le gouvernement japonais n'a pas encore officialisé cette décision politiquement très sensible.
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La population japonaise hostile au nucléaire
Pour réduire l'importante dépendance énergétique du pays, et aussi ses émissions de CO en vue de son nouvel objectif de neutralité carbone d'ici 2050, le gouvernement est aujourd'hui favorable à une relance de la filière nucléaire.
Mais une majorité de Japonais sont hostiles à cette énergie depuis le traumatisme de Fukushima (lire encadré). Et des dizaines de contentieux, initiés par des riverains de centrales pour s'opposer à leur réouverture, sont toujours en cours.
Les nouvelles normes de sécurité nucléaire, les démantèlements et la maintenance des centrales entraînent par ailleurs des coûts astronomiques.
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Début 2020, l'agence de presse japonaise Kyodo avait chiffré ces coûts à 13'460 milliards de yens, soit environ 116 milliards de francs. Cette estimation n'incluait pas les coûts du démantèlement de Fukushima Daiichi et des travaux de décontamination de la zone, probablement encore plus élevés.
"L'avenir du nucléaire est très sombre" au Japon, a estimé ce mois-ci Takeo Kikkawa, un expert universitaire conseillant le gouvernement en matière de programmation énergétique. Ce sera au mieux une énergie de transition car le renouvellement du parc nucléaire n'est pas prévu, a-t-il ajouté.
Les acteurs nippons de la filière préfèrent ainsi davantage investir dans les énergies renouvelables, un secteur bien plus rentable et dans lequel le Japon veut désormais accélérer.
En juin dernier, TEPCO a notamment annoncé son intention d'investir environ 2,000 milliards de yens (un peu plus de 17 milliards de francs) sur dix ans pour se renforcer dans les énergies vertes. Toshiba et Hitachi ont quant à eux abandonné ces dernières années leurs projets de centrales nucléaires au Royaume-Uni.
L'ex-Premier ministre Naoto Kan est devenu totalement contre l'énergie nucléaire: "Je ne pense pas qu'il soit possible de relancer un à un les réacteurs au Japon ni d'en construire de nouveaux, ce n'est faisable ni politiquement ni économiquement". Pour lui, il faut remplacer la structure actuelle le plus vite possible, "en centrant la production d'électricité sur les énergies renouvelables à la place du nucléaire. C'est possible d'alimenter le Japon avec les énergies renouvelables. Cela n'est cependant pas encore bien compris", remarque-t-il.
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Stéphanie Jaquet et les agences
Diminuer la part du nucléaire au Japon
Seuls neuf réacteurs nucléaires sont opérationnels actuellement au Japon, contre 54 avant mars 2011, et le démantèlement de 24 réacteurs est déjà acté.
Tous les réacteurs japonais avaient été mis à l'arrêt après l'accident, pour renforcer drastiquement les normes nationales de sécurité nucléaire.
La part de l'atome dans la production d'électricité du pays représentait seulement 6,2% en 2019, contre 30% avant 2011, selon des données officielles. L'objectif actuel du gouvernement est de la porter à 20-22% d'ici 2030. Cet objectif, en cours de révision, paraît toutefois impossible à atteindre aux yeux de nombreux experts.