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L'Europe consacre un dissident chinois

Hu Jia purge actuellement une peine de trois ans et demi de prison.
Hu Jia purge actuellement une peine de trois ans et demi de prison.
Au risque de fâcher Pékin, des groupes politiques du Parlement européen ont décerné jeudi le prix Sakharov, qui récompense les militants des droits de l'homme et de la démocratie dans le monde, au dissident chinois Hu Jia.

Les groupes conservateur et libéral du Parlement européen ont
précisé que Hu avait été désigné parmi des candidats du Belarus et
du Congo. La cérémonie de remise du prix aura lieu le 17 décembre à
Strasbourg.

"En décernant le Prix Sakharov à Hu Jia, le Parlement européen
reconnaît de façon ferme et résolue la lutte quotidienne pour la
liberté de tous les défenseurs chinois des droits de l'Homme", a
commenté Hans-Gert Pöttering, le président de l'assemblée.

Le régime chinois dénoncé

Charles Tannock, porte-parole pour les Affaires étrangères du
groupe conservateur au Parlement de Strasbourg, a souligné que
cette distinction décernée à un dissident chinois est le signe
clair que les eurodéputés continueront à dénoncer "la nature
autoritaire et répressive du régime communiste" en Chine.



Hu Jia a pris la défense de causes nombreuses et diverses, y
compris la protection de l'environnement, la représentation des
malades du SIDA et une demande d'enquête officielle sur les
massacres de la Place de Tiananmen en 1989, souligne le Parlement
européen dans un communiqué (lire
ci-contre)
.



Il a aussi coordonné le mouvement des "avocats aux pieds nus".
Alors qu'il avait déjà été arrêté à plusieurs reprises, il s'était
exprimé devant les eurodéputés en novembre 2007 via une
téléconférence depuis son domicile où il était assigné à
résidence.

Enfermé pour insubordination

Après cette intervention, il avait été inculpé d'"incitation à
la subversion contre l'autorité de l'Etat", accusation souvent
formulée par Pékin contre des dissidents, et condamné à une peine
de trois ans et demi de prison le 3 avril 2008.



Depuis avril 2004, Hu Jia a été privé de liberté de différentes
manières, d'abord en étant placé en résidence surveillée dans son
appartement dans une résidence de l'est de Pékin au nom ironique de
"Bobo Cité liberté".



Son avocat, Li Jingsong, s'est dit content de cette récompense,
tout en doutant que cela conduise à une libération anticipée du
dissident. "S'ils le libèrent maintenant, les gens vont dire que le
gouvernement a cédé à la pression de la communauté internationale",
a déclaré Li Jingsong.



"Je suis très heureuse de cette nouvelle", a déclaré pour sa part
depuis Pékin son épouse, Zeng Jinyan, qui est elle-même une
dissidente faisant l'objet d'une surveillance constante. Son
téléphone a d'ailleurs été coupé avant qu'elle ne puisse en dire
plus.

D'illustres prédécesseurs

Le Prix Sakharov pour la liberté de l'esprit, doit son nom au
physicien et dissident russe Andreï Sakharov. l est décerné par le
Parlement européen chaque année depuis 1988 aux personnes et
organisations ayant contribué de manière significative à la lutte
en faveur des droits de l'homme et de la démocratie.



Le prix est assorti d'une récompense de 50'000 euros. Parmi les
lauréats du prix figurent entre autres Nelson Mandela, Aung San Suu
Kyi, Taslima Nasreen ou encore Reporters sans frontières.



agences/jeh

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Une vie d'engagements

D'allure frêle mais de caractère bien trempé, le dissident chinois Hu Jia s'est attiré les foudres de Pékin en s'engageant pour la défense des malades du sida, l'environnement et la liberté d'expression. Ce bouddhiste est aussi un admirateur du dalaï lama.

Adolescent, Hu Jia a assisté aux manifestations pour la démocratie de Tiananmen, réprimée dans le sang dans la nuit du 3 au 4 juin 1989. Face aux violences, il est devenu bouddhiste, prônant la non-violence et affichant son admiration pour le dalaï lama.

A partir du milieu des années 90, son combat passe par un engagement dans des ONG, d'abord pour la défense de l'environnement, contre la désertification et pour la défense d'espèces en danger. Puis, il travaille pour les victimes du virus du sida, une action qui lui vaudra une première arrestation en 2002.

Dans son engagement - aux côtés de sa femme Zeng Jinyan, qu'il rencontre alors qu'elle était bénévole à la Croix Rouge -, il utilise les nouvelles technologies, comme l'internet et le téléphone portable, ne cessant de tenir informés les journalistes étrangers de la situation des autres dissidents.

Hu Jia avait été pressenti pour recevoir le Nobel 2008 de la Paix, une reconnaissance qui est finalement revenue à l'ancien président finlandais Martti Ahtisaari, pour ses efforts médiations dans le cadre de nombreux conflits internationaux.

Pékin exprime son courroux

La Chine a fait part jeudi de son "fort mécontentement" après l'attribution du Prix Sakharov 2008 du Parlement européen à Hu Jia.

Pékin a affirmé cependant que cela n'affectera pas le sommet Asie-Europe (Asem).

"Nous exprimons notre fort mécontentement envers la décision du Parlement européen d'accorder un tel prix, malgré nos démarches répétées, à un criminel emprisonné en Chine", a déclaré le porte parole du ministère des Affaires étrangères, Liu Jianchao.

"Je ne pense pas que cela affectera le sommet à Pékin", a-t-il ajouté.

Prévu vendredi et samedi à Pékin, la rencontre de l'Asem réunira 43 pays d'Europe et d'Asie. Les débats se concentreront sur la crise financière.