La Chine violerait toutes les dispositions de la Convention sur le génocide au Xinjiang
Ce rapport accroît la pression à l'encontre de Pékin, sous le feu des critiques pour son traitement des minorités musulmanes du Grand Ouest chinois. Selon de nombreuses organisations, au moins 1 million d'Ouïghours, Kazakhs, Ouzbeks ou Tadjiks ont transité par un vaste réseau de centres de détention. Endoctrinées, abusées sexuellement et même stérilisées de force, ces populations autochtones seraient soumises au travail forcé une fois libérées.
En décembre 2020, Washington a officiellement qualifié cette politique de génocide. Les Parlements canadiens et néerlandais en ont récemment fait de même. De son côté, la Chine nie toute violation des droits humains, affirmant que ces "centres de formation professionnelle" visent à prévenir l'extrémisme religieux et s'inscrive dans une stratégie de lutte contre la pauvreté.
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Analyse juridique indépendante
Conscient de la lourde connotation du terme de génocide, souvent perçu comme synonyme de meurtre de masse ou d'extermination physique d'une population, l'Institut Newsline a entrepris la première analyse juridique indépendante pour déterminer la responsabilité exacte de Pékin et la nature des crimes allégués.
L'équipe, composée d'anciens membres de la Cour pénale internationale, d'ambassadeurs des Nations unies, de juristes, de chercheurs indépendants et d'experts des droits humains et des crimes de guerre, a conclu que le gouvernement chinois est bel et bien coupable de génocide selon la convention des Nations unies sur le génocide, ratifiée par 152 Etats – dont la Chine elle-même.
Violation de l'entier de la convention
Le texte paraphé en 1948 définit le génocide comme la volonté de "détruire tout ou partie d'un groupe national, ethnique, racial ou religieux". Il identifie en outre les actes qui y contribuent: tuer les membres d'un groupe; causer des lésions corporelles ou des traumatismes mentaux aux membres d'un groupe; infliger délibérément des conditions de vie entraînant la destruction totale ou partielle d'un groupe; empêcher les naissances au sein d'un groupe; ou forcer le transfert d'enfants d'un groupe vers un autre.
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Se rendre coupable du moindre de ces actes suffit à dénoncer une violation de la convention du génocide. Or la Chine les a tous réalisés au Xinjiang et viole donc la convention dans son intégralité, souligne l'expertise. "Les politiques et pratiques de la Chine visant les Ouïghours dans la région doivent être considérées dans leur totalité, ce qui équivaut à une intention de détruire les Ouïghours en tant que groupe, en tout ou en partie", conclut le rapport.
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Appel à l'action de la communauté internationale
Par souci d'impartialité, les experts ne font aucune recommandation. Ils précisent néanmoins que l'obligation de prévenir, punir et ne pas commettre de génocide incombe non seulement à la Chine, mais aussi et surtout à la communauté internationale, particulièrement aux 151 autres Etats signataires de la convention sur le génocide.
Si ces conclusions sont susceptibles d'accroître la pression sur la Chine, il est hautement improbable qu'elles débouchent sur des actions concrètes directes. L'ONU est certes habilitée à traiter ces accusations via, notamment, la mise sur pied d'un tribunal international, mais une telle décision doit recueillir l'approbation du Conseil de sécurité. Membre permanent du Conseil, la Chine bénéficie à ce titre d'un droit de veto, de quoi tuer dans l'œuf une telle intervention.
Michael Peuker