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En France, la notion de "devoir conjugal" reste un critère pour les juges

En 2019, la cour d’appel de Versailles a condamné une femme qui refusait d’avoir des rapports sexuels avec son mari. [AFP - PASCAL DELOCHE]
En France, une femme a été condamnée pour ne pas avoir accompli son "devoir conjugal" / La Matinale / 1 min. / le 19 mars 2021
En France, de nombreux couples mariés l'ignorent, mais ils sont tenus légalement d'entretenir des relations sexuelles, et même de façon régulière. Une femme a ainsi été condamnée pour ne pas avoir accompli son "devoir conjugal".

En 2019, la cour d’appel de Versailles a condamné une femme qui refusait d’avoir des rapports sexuels avec son mari. Le divorce a été prononcé à ses torts exclusifs à cause d’une "violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune".

Une décision que la Cour de cassation vient de valider, mais que conteste la femme condamnée, comme l'explique France 2. Elle a déposé un recours devant la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) pour "ingérence dans la vie privée" et "atteinte à l’intégrité physique". La démarche est soutenue par la Fondation des femmes et le Collectif féministe contre le viol.

"Laisser perdurer le 'devoir conjugal', c’est maintenir un outil d’intimidation pour les agresseurs sexuels violeurs au sein du couple et nier l’existence dans notre Code pénal du crime aggravé de viol conjugal, argumentent les deux associations dans un communiqué. (...) Le mariage n’est pas et ne doit pas être une servitude sexuelle", argumentent les deux associations dans un communiqué.

Pas en vigueur en Suisse

En France, l’obligation de relations sexuelles entre époux ne figure pas dans la loi. Mais la jurisprudence a longtemps déduit ce principe du devoir de fidélité. Il a fallu attendre 1990 pour que la Cour de cassation reconnaisse enfin le viol entre époux durant le mariage. Depuis, plusieurs textes législatifs sont allés dans ce sens.

Depuis la réforme du droit du divorce, entrée en vigueur en 2000, la Suisse a supprimé la notion "d'époux fautif". Une femme pouvait perdre le droit à l'entretien, par exemple, en cas d'adultère, mais aucun texte de loi n'évoquait la notion d'obligation de rapports sexuels au sein d'un couple marié.

En revanche l'idée du "devoir conjugal", et en toile de fond la soumission sexuelle de l’épouse, existait bien dans les mentalités jusqu'au début des années 1990. Et depuis 1992, le viol conjugal est reconnu comme une infraction dans le code pénal à l'issu d'un très long débat parlementaire et contre l'avis du Conseil fédéral.

Le viol conjugal est aussi puni par la loi en France. Les époux français ont donc le devoir de faire l'amour, tout en ayant le droit de refuser.

Foued Boukari/vajo

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