Quand le président des Etats-Unis se déplace à l'étranger, c'est une opération logistique massive et complexe dont on ne perçoit qu'une petite partie. Un défi sécuritaire aussi. En résumé: il s'agit de déplacer tout simplement une bonne partie de la Maison Blanche.
Pour ce gros déménagement, on évoque généralement un minimum de six à sept avions pour un voyage présidentiel. Une délégation américaine, c'est grosso modo un millier de personnes, explique vendredi dans Tout un Monde Johanna Maska, qui faisait partie de l'"advanced team" de Barack Obama à la Maison Blanche, en charge de préparer et d'organiser des sommets. Et de faire voyager le président américain.
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Hélicoptères et limousines blindées
"Vous devez littéralement déménager toutes les activités du Bureau ovale partout où va le président. Et avant même qu'un voyage ait lieu, nous allons faire des repérages six semaines à deux mois avant une visite", a détaillé Johanna Maska.
Il faut tout d'abord choisir un lieu, un hôtel: généralement, les étages au-dessus et en dessous de la chambre du président sont réservés pour raison de sécurité. Les employés de l'hôtel subissent une vérification de leurs antécédents judiciaires. Tout est contrôlé.
Un président américain arrive aussi avec des hélicoptères, des limousines blindées et son service de sécurité. On évoque souvent trois périmètres de protection autour du président: la police locale et suisse en premier rideau, mais ensuite des agents spécialisés américains du "secret service" et enfin des gardes du corps qui s'occupent de la protection rapprochée de Joe Biden.
"Il y a même des plans de secours pour les plans de secours des plans de secours: c'est un gros dispositif. Et si les Russes vous donnent la taille de leur 'package', je suis sûr que les Etats-Unis feront de même", s'amuse Johanna Maska. Le "package" complet n'est en effet jamais totalement détaillé.
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Des cuisiniers et des goûteurs
On prévoit aussi certains avions non répertoriés, mais prêts à décoller en cas de besoin, par exemple un petit avion prêt à partir sur un aéroport pas trop loin, mais qui n'est pas l'aéroport principal, pour évacuer le président si ses avions principaux sont inatteignables ou pas opérationnels.
Tout est contrôlé, vérifié, même évidemment ce que mange le président. Généralement, la nourriture est amenée des Etats-Unis par l'équipe du président. Et il a ses propres cuisiniers.
Et si Joe Biden s'arrête à l'improviste dans un restaurant pour goûter un mets local, encore une fois, tout aura été planifié, assure Johanna Maska: "Le menu, tout. Mais ça peut arriver, lors d'un déplacement, qu'il doive manger quelque chose pour ne pas offenser son hôte. Il va peut-être essayer des choses, mais il y aura toujours un membre de l'armée qui goûtera en premier."
Joe Biden ne sera donc jamais le premier à tremper son morceau de pain dans une fondue à Genève, par exemple.
Démonstration de force et sensation de victoire
Les Américains ne se préparent pas forcément différemment lorsqu'il s'agit d'une rencontre avec la Russie, l'ennemi historique. Mais il y a de la tension, explique Johanna Maska. Et au vu des enjeux, elle prévoit que ce sommet sera aussi une démonstration de force de part et d'autre.
"La Russie, ça a toujours été des rencontres intéressantes. Je ne sais pas si vous connaissez cette chanson qui dit 'tout ce que tu peux faire, je peux le faire mieux, je peux faire les choses mieux que toi (elle fredonne)'. C'est drôle parce qu'il y a une sorte de surenchère. Ce que veut un camp, l'autre le veut aussi", note Johanna Maska. "Pour ce sommet, le président Biden connaît déjà bien le président Poutine, mais il y a encore un long chemin qui les sépare."
L'important, lors de ces rencontres, c'est aussi que les deux camps puissent repartir avec une sensation de victoire. C'est la recette d'un sommet réussi pour Johanna Maska. Cette ancienne de la Maison Blanche prévoit donc la venue de délégations importantes en ville de Genève au vu de la tension politique entre Washington et Moscou.
Et il faut imaginer que pour la tournée européenne de Joe Biden, toutes ces mesures et ce matériel doivent être mis en place à toutes ses escales: Royaume-Uni, Bruxelles et Genève.
Le dispositif russe plus réduit
Du côté russe, le dispositif est bien plus réduit, quelques centaines de personnes tout au plus. On constate depuis quelques années qu'en règle générale, Vladimir Poutine se déplace pour une journée, quittant la Russie le matin pour y rentrer le soir-même. Genève ne devrait pas déroger à la règle.
C'est une différence de taille par rapport à Joe Biden. Le président américain exécute une tournée européenne, la première de surcroît, ce qui d'après certains politiciens russes interrogés par la RTS pourrait expliquer l'importance de la délégation.
Plus concrètement, Vladimir Poutine est attendu la semaine prochaine en compagnie de Sergueï Lavrov, le ministre des Affaires étrangères, et d'autres vice-ministres. Tous les experts ou autres conseillers pouvant être utiles dans le cadre de cette première rencontre avec son homologue américain seront également présents.
Il faut ajouter à cela une partie de son équipe de communication et bien évidemment les hommes chargés de garantir sa sécurité. On n'a pas confirmé à la RTS la présence d'hélicoptères pour d'éventuels déplacements prévus à Genève. Pour l'heure, le président russe a prévu de se déplacer à Genève dans la nouvelle limousine de fabrication russe Aurus.
Sujet radio: Raphaël Grand et Jean-Didier Revoin
Adaptation web: Jean-Philippe Rutz avec ats
Espace aérien réduit pour le sommet
L'usage de l'espace aérien sera temporairement réduit à Genève du 15 au 17 juin lors de la rencontre entre les présidents Joe Biden et Vladimir Poutine, a annoncé vendredi le Conseil fédéral. Les Forces aériennes assureront un service de police aérienne et une surveillance renforcée de l’espace aérien.
La Suisse est tenue d'assurer la sécurité entourant la rencontre de haut niveau entre le président américain et le président russe à Genève. La restriction de l'usage de l'espace aérien sera ainsi en place du 15 juin à 08h00 au 17 juin à 17h00. Elle est limitée à une zone centrée sur la place des Nations et ne concerne pas les vols commerciaux à destination de l'aéroport de Genève.
Appui de l'armée au sol
Les autorités cantonales genevoises pourront également bénéficier d'un appui de l'armée au sol pour la sécurité. Le Conseil fédéral a approuvé l’engagement subsidiaire d’un effectif maximal de 1000 militaires en service d’appui. Du matériel sera mis à disposition de la police cantonale dans le domaine du transport aérien et lacustre. L’armée se chargera également de la protection des représentations étrangères.
Ces mesures viennent compléter le dispositif sécuritaire mis en place par le canton. Elles n'entraînent pas de dépenses supplémentaires pour la Confédération, précise le gouvernement.
La RTS productrice officielle
La RTS produira l'intégralité des images officielles de la rencontre. La télévision romande a indiqué vendredi que ce mandat lui a été confié par l'Union Européenne de Radiodiffusion (UER).
La RTS s'occupera notamment de filmer l'arrivée des délégations à l'aéroport de Genève, l'accueil des autorités américaines et russes par le président de la Confédération Guy Parmelin, les conférences de presse, les apparitions publiques, sans oublier les poignées de main échangées lors de cet événement diplomatique exceptionnel.