"Je n'ai pas le moindre doute que le péché originel, ce qui au fond a permis ces atrocités, a été la pression pour faire des victimes" ainsi que "les récompenses" afférentes, a déclaré l'ex-président de droite (2010-2018) lors d'une audition volontaire devant la Commission de la vérité en Colombie.
Cette dernière enquête sur le conflit d'un demi-siècle contre l'ex-guérilla marxiste des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc). Elle a été créé dans le cadre des Accords de paix de 2016, soutenus par Juan Manuel Santos et qui a conduit au désarmement de la rébellion.
Juan Manuel Santos avait été auparavant ministre de la Défense de l'ex-président de la droite radicale Alvaro Uribe (2002-2010), sous le mandat duquel des milliers de civils ont été exécutés, présentés comme des guérilleros tués au combat.
Au moins 6402 morts
Je demande pardon à toutes les mères, à tous les proches, victimes de cette horreur
Pendant son audition, Juan Manuel Santos a demandé pardon aux familles des victimes. "Je demande pardon à toutes les mères, à tous les proches, victimes de cette horreur, du plus profond de mon âme. Que cela ne se reproduise jamais", a-t-il insisté.
La Juridiction spéciale de paix (JEP), qui juge les crimes les plus graves du conflit contre les Farc, a établi en février qu'au moins 6402 civils sont morts aux mains de militaires entre 2002 et 2008, soit trois fois plus que les estimations données jusque-là par le parquet.
La révélation de ces "faux positifs", en jargon militaire, a été l'un des plus grands scandales impliquant l'armée colombienne durant sa confrontation avec les rébellions d'extrême gauche.
Médailles, permissions et promotions
Les militaires tenaient le compte des guérilleros et narco-trafiquants tués et ces résultats "positifs" leur valaient médailles, permissions et promotions. Des milliers de morts étaient en fait des civils abattus de sang froid.
Juan Manuel Santos a estimé qu'il s'agissait d'une "tache indélébile sur l'honneur de l'armée qui a toutes les raisons de se vanter, mais qui doit aussi avoir la force d'âme de reconnaître la vérité et de demander pardon".
L'ex-président a déclaré avoir été informé des crimes commis par l'armée dès sa prise de fonction à la Défense en 2006, mais avoir minimisé la crédibilité de ces allégations, avant de recevoir des signalements du Haut-Commissariat des Nations unies pour les droits humains et du Comité international de la Croix-Rouge.
ats/jfe