"Ce qui se passe au Tigré est effroyable. Il est temps que la communauté internationale se réveille et agisse", a déploré Josep Borrell. La situation au Tigré a été inscrite à l'ordre du jour du sommet des dirigeants de l'UE jeudi et vendredi à Bruxelles.
"Le bombardement d'un marché dans le village d'Edaga Selus près de Togoga, dans le district de Dogua Tembien, vient s'ajouter à l'effroyable série de violations du droit humanitaire international et des droits de l'homme, à l'atrocité et à la violence ethnique, auxquelles s'ajoutent de graves allégations d'utilisation de la famine et de la violence sexuelle comme armes de conflit", a-t-il dénoncé.
"Le fait que des civils soient délibérément pris pour cible n'est justifiable en aucun cas et va à l'encontre du droit international humanitaire", a affirmé Josep Borrell. "Ces atrocités ne peuvent être justifiées par l'argument de la préservation de l'intégrité territoriale de l'Éthiopie."
"Si le blocage des ambulances qui tentent de fournir une assistance médicale aux blessés après le bombardement est confirmé, cela est inacceptable. Une telle pratique constitue une grave violation de la Convention de Genève et du droit international humanitaire", a-t-il encore averti.
Violation des droits humains
Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, lauréat du prix Nobel de la paix 2019, a envoyé l'armée fédérale au Tigré en novembre 2020 pour arrêter et désarmer les dirigeants du TPLF (Front de libération du peuple du Tigré), parti à l'époque au pouvoir dans cette région du nord du pays et qui défiait le gouvernement central.
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Il avait alors promis une opération militaire courte, mais les combats se poursuivent et de nombreux rapports font état d'atrocités, notamment le recours généralisé au viol.
L'UE a dénoncé à plusieurs reprises les entraves mises par l'Ethiopie à l'acheminement de l'aide humanitaire vers la région du Tigré et a demandé des sanctions contre cette "grave violation du droit humanitaire international".
ats/iar
Bombardement meurtrier sur un marché
Une frappe aérienne a touché mardi un marché très fréquenté au Tigré, faisant des dizaines de blessés et un nombre indéterminé de morts dans cette région du nord de l'Ethiopie, où le conflit qui dure depuis sept mois a connu ces derniers jours un regain d'intensité. Le bilan précis était encore inconnu mercredi, en raison notamment d'un accès restreint à la localité de Togoga touchée par cette frappe, située à une trentaine de kilomètres au nord-ouest de la capitale régionale Mekele.
Les témoignages de blessés, recueillis à l'hôpital de Mekele où de rares victimes ont été évacuées, dessinent un tableau macabre. "Il y avait beaucoup de blessés et de morts, on marchait sur eux et dans leur sang", raconte Birhan Gebrehiwet, jeune femme de 20 ans, dont la maison située près du marché a été "totalement détruite" dans l'explosion: "Nous avons été enterrés sous les murs et le toit".
Selon des témoins, des ambulanciers et des médecins, des soldats ont empêché durant plus 24 heures les gens d'entrer ou sortir de la zone de Togoga, privant les blessés de soins. L'armée éthiopienne mène depuis novembre, avec l'appui des troupes de la région voisine de l'Amhara et de l'armée érythréenne, une opération militaire au Tigré contre les forces des anciennes autorités régionales.
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