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La Turquie abandonne officiellement un traité protégeant les femmes

Des manifestantes s'insurgent le 19 juin 2021 contre l'abandon du traité par la Turquie visant à renforcer la lutte contre les violences faites aux femmes. [EPA/Keystone - Erdem Sahin]
La Turquie abandonne officiellement un traité protégeant les femmes / Le Journal horaire / 27 sec. / le 1 juillet 2021
La Turquie a officiellement quitté jeudi un traité international visant à renforcer la lutte contre les violences faites aux femmes. Cette décision du président Recep Tayyip Erdogan a été vivement critiquée dans son pays et à l'étranger.

Des manifestations étaient prévues dans plusieurs villes de Turquie jeudi pour protester contre le retrait de la Convention d'Istanbul annoncé en mars par Recep Tayyip Erdogan et devenu effectif à minuit.

La Convention d'Istanbul, qui date de 2011 et a été signée par 45 pays et l'Union européenne, est le premier traité international à fixer des normes juridiquement contraignantes pour prévenir la violence sexiste.

>> Lire : La Turquie quitte une convention sur les violences contre les femmes

La décision prise par Recep Tayyip Erdogan de retirer son pays de ce traité, alors que les féminicides n'ont cessé d'augmenter depuis une décennie en Turquie, a suscité la colère des organisations de défense des droits des femmes et des critiques de l'UE, de Washington et du Haut-Commissariat aux droits de l'homme de l'ONU.

"Sape des valeurs familiales"

Le gouvernement turc a expliqué sa décision en soutenant que la Convention d'Istanbul "sape les valeurs familiales" et "normalise l'homosexualité", en raison de son appel à ne pas discriminer selon l'orientation sexuelle. Contrairement à de nombreux pays peuplés majoritairement de musulmans, l'homosexualité n'est pas illégale en Turquie, mais l'homophobie y est largement répandue.

Les observateurs estiment que la décision du président turc s'explique avant tout par sa volonté de rallier sa base électorale conservatrice dans un contexte de difficultés économiques.

Un plan d'action

Face aux critiques, le chef d'Etat turc a dévoilé jeudi un "plan d'action" pour lutter contre les violences domestiques, évoquant par exemple un passage en revue de l'arsenal législatif et une meilleure formation des magistrats à ces questions.

"Certains tentent de présenter notre retrait de la Convention d'Istanbul (...) comme un retour en arrière. Notre lutte contre la violence envers les femmes n'a pas commencé avec la convention et ne prendra pas fin avec ce retrait", s'est défendu Recep Tayyip Erdogan.

Le président a affirmé que la lutte contre les violences visait à "protéger l'honneur de nos mères et de nos filles". Ce commentaire risque de susciter la colère des associations qui lui reprochent de réduire les femmes à la maternité.

Appel à manifester

Jeudi soir, des manifestants se sont rassemblés dans l'ensemble de la Turquie, notamment à Ankara et à Istanbul, pour exprimer leur soutien à la Convention d'Istanbul.

"Il n'y a aucune amélioration à attendre d'un pouvoir qui met en danger la vie des femmes pour faire plaisir à des confréries religieuses réactionnaires. C'est aussi simple que ça pour nous", a expliqué dans La Matinale de vendredi une manifestante.

>> Le reportage à Istanbul :

Des femmes sont descendues dans les rues d'Istanbul pour protester contre le retrait de la Turquie d'un traité les protégeant. [Keystone - AP Photo/Kemal Aslan]Keystone - AP Photo/Kemal Aslan
Manifestations en Turquie après le retrait du pays d'un traité protégeant les femmes / Le Journal horaire / 1 min. / le 2 juillet 2021

>> Voir aussi les images des manifestations dans le 12h45 :

Les féministes turques manifestent après le retrait de leur pays de la Convention d'Istanbul.
Les féministes turques manifestent après le retrait de leur pays de la Convention d'Istanbul. / 12h45 / 1 min. / le 2 juillet 2021

afp/kkub

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"Message dangereux", selon Amnesty International

Des opposants au retrait de la Convention d'Istanbul avaient saisi la justice pour stopper cette mesure, mais leur recours a été rejeté mardi. "Ce retrait envoie un message dangereux à ceux qui commettent des violences, mutilent et tuent: il leur dit qu'ils peuvent continuer de le faire en toute impunité", a dénoncé jeudi la dirigeante de l'ONG Amnesty International, Agnès Callamard.

Les associations de défense des droits des femmes redoutent une augmentation des violences, alors que la situation est déjà critique. En 2020, 300 femmes ont été assassinées en Turquie par leur conjoint ou ex-conjoint, selon le groupe de défense des droits des femmes "Nous mettrons fin aux féminicides". Et il n'y a aucun signe de ralentissement de cette tendance, avec 189 femmes tuées jusqu'à présent cette année, d'après la même source.