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Le gouvernement de Cuba fait un premier geste face aux pénuries

Un vendeur de rue regarde un discours du président cubain, Miguel Diaz-Canel, à la télévision. La Havane, le 12 juillet 2021. [Reuters - Alexandre Meneghini]
Le gouvernement cubain fait un premier geste face aux pénuries / La Matinale / 14 sec. / le 15 juillet 2021
Le gouvernement cubain a annoncé mercredi une première salve de mesures pour apaiser la population, trois jours après des manifestations historiques. Affirmant avoir "tiré des enseignements", il autorise notamment l'entrée sur l'île d'aliments et de médicaments.

Les passagères et passagers peuvent ainsi, "de façon exceptionnelle et temporaire", importer dans leurs valises des aliments, des produits d'hygiène et des médicaments, "sans limite de valeur et sans taxes douanières", a déclaré le premier ministre Manuel Marrero à la télévision, où il est apparu accompagné du président Miguel Diaz-Canel et de plusieurs ministres. "C'est une mesure que nous prenons jusqu'au 31 décembre", a-t-il ajouté.

Faciliter l'entrée sur l'île de biens de première nécessité était une des revendications de la population cubaine, confrontée à de fortes pénuries, aggravées par la crise économique qui frappe le pays, la pire en 30 ans. Dans une lettre ouverte publiée récemment, un groupe de personnes venant des milieux artistique et intellectuel avait justement demandé une telle mesure.

Gagner plus si l'on produit plus

Le ministre de l'économie Alejandro Gil a pour sa part annoncé la fin de la limite imposée aux salaires dans les entreprises d'Etat, qui étaient soumises à une stricte échelle de rémunération: "Nous éliminons la limite de l'échelle salariale pour les entreprises d'Etat, dans un premier temps", selon "le principe de gagner plus si l'on produit plus de richesse et si l'on est plus efficace".

Enfin, le Premier ministre a dit que les habitants pourraient provisoirement s'installer dans une autre ville et bénéficier de la libreta, le carnet d'approvisionnement, alors que c'était impossible auparavant.

Ces mesures sont annoncées trois jours après les manifestations de dimanche, au cours desquelles des milliers de Cubains sont sortis dans les rues d'une quarantaine de villes et de villages aux cris de "Nous avons faim", "Liberté" et "A bas la dictature".

Les mobilisations, dont certaines se sont poursuivies lundi, ont fait un mort et plus de cent personnes détenues, suscitant l'inquiétude de la communauté internationale.

>> Lire : Cuba secoué par des manifestations inédites contre le gouvernement

"Analyse critique de nos problèmes"

S'il a réitéré ses accusations contre les Etats-Unis, qu'il désigne comme instigateur de ces manifestations via une campagne sur Twitter avec le hashtag #SOSCuba, le président Diaz-Canel a toutefois infléchi son discours.

"Nous devons aussi tirer des enseignements de ces troubles. Nous devons aussi faire une analyse critique de nos problèmes", a-t-il déclaré, reconnaissant qu'il existe "des choses que nous devons perfectionner". Parmi les manifestantes et manifestants, il y avait en effet "des personnes insatisfaites", a estimé le dirigeant communiste.

Et "peut-être aussi faudra-t-il s'excuser auprès de ceux qui au milieu de la confusion dans ce genre d'événements ont été pris [pour des fauteurs de troubles, ndlr] et maltraités". Il a reconnu que les manifestations ont fait "des dizaines de blessés".

Le président a lancé "un appel à la paix, à l'entente entre les Cubains et au respect [...] Ce que nous devons encourager, même si nous avons parfois des points de vue différents sur certains sujets, c'est d'essayer de trouver, entre tous, des solutions".

Internet mobile rétabli

Mercredi, le calme était apparemment revenu à Cuba, placé sous forte surveillance policière et militaire, notamment aux abords du Capitole à La Havane, siège du Parlement. Dans cette zone où des milliers de Cubaines et de Cubains avaient déferlé dimanche, plusieurs camions de police étaient stationnés.

L'internet mobile, interrompu depuis les manifestations, a commencé à être rétabli, mais il restait instable et il était impossible d'accéder aux réseaux sociaux et applications de messagerie instantanée.

Avec la 3G ou la 4G, l'accès à WhatsApp, Facebook et Twitter, entre autres, était bloqué. Dans la rue, des habitants parvenaient à se connecter à Internet de manière intermittente.

ats/sjaq

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"Patria y vida", l'hymne des manifestants en colère à Cuba

"Patria y vida", titre d'une chanson polémique de rappeurs cubains, a été l'un des slogans les plus répétés lors des manifestations historiques survenues dimanche à Cuba, largement soutenues par des stars du rap et du reggaeton.

Contrepied de l'emblématique "Patria o muerte", La patrie ou la mort, slogan de la révolution socialiste, les mots "Patria y vida", La patrie et la vie, ont été scandés lors des mobilisations, où la foule criait aussi "Liberté" et "A bas la dictature".

"La chanson a été présente en raison de l'impact médiatique qui l'entoure, son bombardement constant sur les réseaux sociaux et parce qu'elle résonne auprès d'une partie de la jeunesse", explique à l'AFP Emir Garcia, historien de la musique. "Je ne connais pas d'autre chanson qui soit sortie un lundi et qui dès le mardi ait déjà des millions de vues" sur Youtube, ajoute-t-il.

Ce morceau de rap, enregistré en février entre Cuba et Miami, et déjà vu plus de 6 millions de fois en ligne, est devenu l'hymne des manifestants car "il exprime ce sentiment profond d'espoir, parmi tout le désespoir du peuple cubain", estime pour sa part le dissident Manuel Cuesta Morua.