Les Etats-Unis ont notamment relevé un bond de 30% des homicides dans certaines grandes villes du pays en 2020. Et la capitale de l'Etat de Géorgie est un exemple emblématique de cette hausse: les actes violents y ont augmenté de plus de 50%.
Ainsi, un an après les manifestations du mouvement pour les droits civiques Black Lives Matter et ses appels à réformer et désarmer la police, les autorités cherchent plutôt à augmenter les moyens qu'elles lui allouent. Et le sentiment d'insécurité se trouve à nouveau au coeur des enjeux partisans.
D'autant que cette vague de criminalité ne touche pas que les quartiers défavorisés, mais également des zones qui se sont longtemps crues à l'abri des problèmes urbains. A Buckhead, la moitié nord d'Atlanta, plutôt blanche et riche, une partie des habitants sont exaspérés. Certains qualifient même leur quartier de "zone de guerre" et estiment qu'il devrait faire sécession de la ville d'Atlanta.
Police "diabolisée"
Le Parlement de la Géorgie a été convoqué par la majorité républicaine pour une séance extraordinaire en pleine pause estivale. Une situation peu banale. Durant les cinq heures d'auditions, des élus des quatre coins de l'Etat ont discuté de la criminalité dans une seule ville.
Pour le président de la commission en charge, J. Collins, face à cette situation, il est "logique que l'Etat de Géorgie enquête pour savoir si ses propres ressources sont nécessaires afin de s'assurer que la capitale est sûre". Selon lui, l'insécurité est aussi due aux médias, qui ne montrent pas les agents sous une lumière favorable. "Ils sont diabolisés, alors qu'on a besoin d'eux!", déplore l'élu républicain.
L'année dernière, plus de 300 agents ont quitté la police d'Atlanta. Le moral est au plus bas. Mais la ville cherche à recruter. Cette semaine, l'administration Biden a annoncé un coup de pouce financier à hauteur de 170 millions de dollars.
Pandémie et armes à feu
La vague de criminalité a déjà brisé la carrière d'une étoile montante du Parti démocrate, la maire Keisha Lance Bottoms. Élue il y a quatre ans sur un programme orienté vers la décriminalisation de certains petits délits, elle a annoncé en mai qu’elle ne se représenterait pas lors des élections municipales en novembre. Cette semaine, devant les parlementaires, elle a envoyé le chef adjoint de la police Todd Coyt.
Pour les autorités de la ville, l'explication est plutôt à chercher du côté de la pandémie, qui a fragilisé le tissu social et perturbé les tribunaux. Et, surtout, des armes à feu omniprésentes. "Tout le monde a accès aux armes à feu. Des disputes qui étaient banales avant finissent en fusillade. Et si on voit quelqu'un qui se promène armé, les lois de notre Etat interdisent à nos agents d'aborder la personne et de s'enquérir de la provenance de l'arme ou de la raison de la porter", explique Todd Coyt.
De nouvelles séances sont prévues cet été au Parlement de Géorgie pour parler de la criminalité dans la grande métropole.
Jordan Davis/jop avec ats
Les armes, préoccupation partout dans le pays
Le 7 juillet dernier, le gouverneur démocrate de New York Andrew Cuomo annonçait des mesures d'"urgence" pour lutter contre les armes à feu, sur fond d'augmentation de la criminalité dans cet Etat comme dans le reste du pays. Il a même décrété une sorte d'"état d'urgence" contre la violence par armes à feu. Une première aux Etats-Unis qui lui permet, comme face à la pandémie, de mobiliser des moyens exceptionnels.
"Si vous regardez les derniers chiffres, il y a plus de gens qui meurent des armes à feu et de criminalité que du Covid. C'est un problème national qu'il faut affronter, car notre avenir en dépend", a-t-il expliqué dans un communiqué. "Comme avec le Covid, New York va encore montrer l'exemple au reste du pays avec une approche globale", a affirmé le gouverneur.
Ces mesures devraient permettre notamment de faire remonter les données plus rapidement, d'identifier "les points chauds" et d'allouer les ressources en conséquence. Un coordinateur spécial pour la prévention de ce type de violence sera nommé. Rattaché aux services de santé de l'Etat de New York, il devra veiller à une action coordonnée de nombreux services sociaux, sécuritaires, légaux ou encore pénitentiaires.
L'Etat de New York prévoit aussi d'investir quelque 138 millions de dollars dans des programmes d'intervention et de prévention, dont 76 millions pour créer des emplois et des activités pour les jeunes les plus "à risque".
Une unité de police spéciale pour lutter contre le trafic d'armes à feu venues d'autres Etats va aussi être créée: si New York est l'un des Etats américains où la législation sur la détention d'armes à feu est la plus stricte, il est facile d'aller acheter des armes dans les Etats voisins de Pennsylvanie ou du New Jersey, plus laxistes.
Le président Joe Biden a aussi présenté le 23 juin dernier des mesures pour limiter la circulation des armes à feu au niveau fédéral. Il a dénoncé une "épidémie" de violence par les armes à feu à laquelle les Etats-Unis sont confrontés "depuis trop longtemps et qui s'est aggravée depuis la début de la pandémie".
Mais le Congrès comme le pays reste très divisé et les démocrates peinent à faire bouger les choses. Le 13 juillet, la Cour fédérale d’appel de Virginie avait par exemple invalidé une loi qui interdisait depuis plus d’un demi-siècle aux armuriers de vendre des armes de poing à des jeunes de moins de 21 ans.
Création de 5 unités spéciales dans cinq grandes villes
Aux Etats-Unis, le gouvernement tente de faire face à la hausse des crimes violents. Le ministre de la Justice a annoncé jeudi la création de cinq unités spéciales chargées notamment de lutter contre le trafic d’armes à feu, dans 5 grandes villes des Etats-Unis (Chicago, Washington, San Francisco, Los Angeles et New York).
Cette hausse de la criminalité (lire ci-dessus) serait entre autres liée à la crise sanitaire et économique. Pour le ministre de la Justice Merrick Garland, il était urgent d’agir: "Nous allons utiliser tous les outils à notre disposition pour assurer la sécurité de nos communautés."
Ces unités seront composées d’agents fédéraux et de police locale et seront chargées de lutter contre la circulation illégale d’armes à feu et les crimes violents.