À 60 ans, Ebrahim Raïssi, ancien chef de l'autorité judiciaire du pays et fidèle allié du Guide Suprême Ali Khamenei, succède ainsi à Hassan Rohani, partisan d'une ligne plus modérée.
"Conformément au choix du peuple, j'intronise l'homme sage, infatigable, expérimenté et populaire Ebrahim Raïssi comme président de la République islamique d'Iran", a écrit le Guide suprême dans un décret lu par son chef de cabinet.
Il prêtera serment jeudi devant le Parlement, auquel il devra présenter ses candidats pour les postes ministériels.
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Appel au changement de régime
Ebrahim Raïssi sera immédiatement aux prises avec les manifestations qui émaillent le pays. Il devra aussi tenter de relancer les pourparlers autour de l'accord international sur le nucléaire, conclu en 2015 par son prédécesseur.
"Nous chercherons certainement à lever les sanctions oppressives, mais nous ne lierons pas les conditions de vie de la nation à la volonté des étrangers", a-t-il déclaré dans un discours à la télévision d'Etat après son intronisation.
Tenant d'une ligne dure, Ebrahim Raïssi a surtout été élu dans un contexte de très forte défiance, dans un scrutin marqué par la forte abstention, sur fond de marasme politique et économique. Née d'une critique sur la gestion de l'eau, la grogne de la population réclame désormais un changement de régime.
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Ambitions économiques irréalistes ?
Mais plus la colère monte, plus la répression augmente. Ainsi, pour Clément Therme, chercheur à l'Institut universitaire européen de Florence, "la priorité pour le régime sera de contrôler internet, pour éviter cette mobilisation par le bas et que cette volonté de changement de régime se traduise par des actions sur le terrain".
En plus de renforcer encore l'appareil sécuritaire, son autre objectif principal devrait être l'amélioration de la situation économique en renforçant ses relations économiques avec les pays voisins, mais aussi avec la Russie et la Chine, estime le chercheur.
Clément Therme juge toutefois son projet "pas très réaliste". "Il veut s'opposer aux États-Unis tout en développant l'économie iranienne. Il est très peu probable qu'il puisse gérer les mécontentements et faire mieux que son prédécesseur", estime-t-il.
ats/jop/Cédric Guigon
L'"idéaliste" Rohani défend son bilan
En 2018, l'ex-président Donald Trump avait retiré les Etats-Unis, pays ennemi de la République islamique d'Iran, de l'accord de 2015 et rétabli les sanctions américaines contre Téhéran. Celles-ci ont étouffé l'économie iranienne, mettant notamment un coup d'arrêt à ses exportations pétrolières. La crise économique a été aggravée par la pandémie de Covid-19, l'Iran étant le pays le plus durement touché du Proche et Moyen-Orient.
Ainsi, lors d'un discours devant le conseil des ministres dimanche, Hassan Rohani a défendu son bilan. "Ce que nous avons fait l'a été dans une situation difficile, conséquence de la guerre économique et du coronavirus, et cette année, la sécheresse s'y est ajoutée", a-t-il indiqué.
Selon l'économiste réformiste iranien Saïd Laylaz, conseiller auprès de plusieurs présidents iraniens, Rohani "a cru qu'il serait capable de résoudre rapidement tous les problèmes du pays".
Le président sortant a fait preuve d'"idéalisme" dans sa politique d'ouverture à l'Occident: Ebrahim Raïssi choisira une voie différente, estime-t-il.
Pétrolier israélien attaqué
Côté diplomatique, Ebrahim Raïssi aura aussi pour première tâche de répondre aux menaces et aux accusations israéliennes et américaines, également rejoints par Londres, qui accusent l'Iran d'une attaque meurtrière sur un pétrolier géré par un milliardaire israélien en mer d'Oman, qui a fait deux morts le 29 juillet.
Les Etats-Unis ont menacé d'"une réplique appropriée". L'Iran a de son côté nié toute implication, avertissant qu'il répondrait à tout "aventurisme" s'il était pris pour cible.