"Les talibans ont gagné", a reconnu dimanche soir le président afghan, qui a fui le pays et se trouverait désormais au Tadjikistan. Ashraf Ghani a reconnu leur victoire au terme d'une guerre de près de 20 ans.
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Pendant ce temps, les insurgés célébraient une victoire militaire aussi rapide que totale en investissant le palais présidentiel à Kaboul.
Dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, le mollah Abdul Ghani Baradar, co-fondateur des talibans, a salué la victoire du mouvement islamiste. "A présent, nous devons montrer que nous pouvons servir notre nation et assurer la sécurité et le confort dans la vie", a-t-il dit.
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Occidentaux exfiltrés vers l'aéroport de Kaboul
L'armée américaine a "sécurisé" lundi l'aéroport de Kaboul, où a été regroupé le personnel de son ambassade dans l'attente d'être évacué. Le drapeau américain a été retiré de l'ambassade.
"Nous pouvons confirmer que l'évacuation en toute sécurité de tout le personnel de l'ambassade est maintenant terminée", a déclaré dans un communiqué le porte-parole du département d'Etat. "Tout le personnel de l'ambassade se trouve dans l'aéroport international Hamid Karzai", a-t-il ajouté.
L'Allemagne, la France et les Pays-Bas font partie des pays qui ont aussi transféré des membres de leur personnel diplomatique de leur ambassade à Kaboul à l'aéroport avant une évacuation.
D'autres pays membres de l'Otan dont le Royaume-Uni, l'Italie, le Danemark et l'Espagne ont également annoncé l'évacuation de leur personnel diplomatique, tout comme la Suède.
Le ministère français des Affaires étrangères a annoncé dimanche que Paris déployait des renforts militaires aux Emirats arabes unis pour faciliter l'évacuation des ressortissants français de Kaboul.
Chaos sur le tarmac
L'entrée des combattants talibans dans la capitale a également provoqué un vent de panique au sein de la population de Kaboul. Des milliers d'habitants s'efforçant de fuir s'agglutinent depuis dimanche à l'aéroport et jusque sur le tarmac, où des scènes de chaos ont été rapportées. Selon des témoins, les forces américaines ont tiré en l'air lundi matin pour tenter de contenir la foule.
Les vols commerciaux sont annulés, a annoncé lundi l'autorité aéroportuaire de la capitale. "S'il vous plaît, ne vous précipitez pas à l'aéroport", a-t-elle déclaré dans un message transmis à la presse.
L'ambassadeur russe va rencontrer les talibans
L'ambassadeur de Russie à Kaboul va rencontrer les talibans mardi, a annoncé lundi l'émissaire du Kremlin pour l'Afghanistan. "L'ambassadeur russe (Dmitri Jirnov) est en contact avec les talibans, demain, il va rencontrer leur coordinateur pour la sécurité" pour évoquer notamment les questions liées à la sécurité de l'ambassade de Russie à Kaboul, a indiqué Zamir Kaboulov à la radio Echo de Moscou.
Selon l'émissaire russe, la reconnaissance ou non par la Russie du nouveau pouvoir afghan "va dépendre de ses agissements".
La Chine, qui partage 76 km de frontière avec l'Afghanistan, a indiqué de son côté lundi qu'elle souhaitait des "relations amicales" avec les talibans. Pékin "respecte le droit du peuple afghan à décider de son propre destin et de son avenir", a affirmé devant la presse une porte-parole de la diplomatie chinoise, Hua Chunying.
Pour les forces de sécurité afghanes, pourtant financées pendant 20 ans à coups de centaines de milliards de dollars par les Etats-Unis, la débâcle est totale. En dix jours, le mouvement islamiste radical, qui avait déclenché une offensive en mai à la faveur du début du retrait des troupes étrangères, notamment américaines, a pris le contrôle de quasiment tout l'Afghanistan.
Négociations "de façade" à Doha
Pour Nicolas Hénin, consultant en contre-terrorisme et radicalisation, la rapidité de cette reconquête est le signe d'une véritable efficacité du mouvement taliban, qui a réussi à combiner les effets politiques et militaires.
Interrogé lundi dans La matinale de la RTS, ce spécialiste a souligné que le processus de paix de Doha dissimulait en fait des opérations militaires et une reconquête express. "C'est cette combinaison de négociations de façade et d'opérations militaires, de négociations secrètes avec les autorités locales", qui explique la progression éclair des talibans.
Agences/oang
Les membres du bureau de la DDC évacués
La Suisse, qui ne dispose pas d'ambassade en Afghanistan, a fermé temporairement son bureau de coopération dans la capitale afghane.
Les trois Suisses du bureau de la DDC à Kaboul ont été évacués dans la nuit de dimanche à lundi. Ils sont sur le chemin du retour grâce à l'aide "de nos partenaires", a tweeté lundi matin Ignazio Cassis.
Ils ont été évacués à bord d'un avion américain, avec 40 employés de l'ambassade d'Allemagne. Ils ont atterri à Doha, au Qatar.
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En raison de la situation, les réfugiés afghans en Suisse ont besoin d'une admission provisoire, selon la Coalition des juristes indépendant-e-s pour le droit d'asile.
Dans une lettre ouverte au Département fédéral de justice et police, au Secrétariat d'Etat aux migrations et au Parlement, elle estime que la suspension des renvois est une mesure à court terme, mais que la situation en Afghanistan ne devrait pas s'améliorer rapidement.
L'inconnue de la gouvernance des talibans
L'un des chefs des talibans a déclaré lundi qu'il était trop tôt pour indiquer la façon dont le groupe islamiste allait assumer la gouvernance de l'Afghanistan.
"Nous voulons que toutes les puissances étrangères partent avant que nous ne commencions à restructurer la gouvernance", a-t-il dit à Reuters par téléphone, refusant que son nom soit communiqué.
Il a ajouté que les combattants talibans présents à Kaboul avaient reçu pour consigne de ne pas effrayer les civils et de permettre à ceux-ci de reprendre des activités normales.