Gabriel Sterling: aux Etats-Unis, "il faut deux partis rationnels forts, qui croient à la vérité"
Présent à Genève dans le cadre de la semaine de la démocratie, Gabriel Sterling explique dans le 19h30 qu'il garde confiance dans la démocratie américaine. "J'ai beaucoup de foi dans la résilience du système", assène-t-il d'emblée.
Le 7 novembre 2020, lors des élections américaines, Gabriel Sterling a toutefois subi une pression difficilement soutenable. Alors que Joe Biden célèbre sa victoire, Donald Trump et ses partisans contestent les résultats dans les Etats où l'écart entre les deux candidats est restreint. La Géorgie en fait partie, mais Gabriel Sterling tient tête au président républicain et confirme sa défaite. Lui et ses collègues recevront par la suite des menaces de mort.
J'ai foi en la résilience du système démocratique américain
"J'ai été très en colère quand des gens ont été menacés, et c'est la raison pour laquelle je suis ici, explique Gabriel Sterling. Mais le système a continué, car les gens ont fait ce qu'il fallait faire." Il insiste sur la responsabilité qui incombe aux postes comme le sien. "Les systèmes que vous construisez sont aussi bons que les gens qui les dirigent. Aux Etats-Unis, on a des dizaines de milliers de personnes qui travaillent aux élections. Il y a des gens qui tiennent des rôles clés, et ils ont suivi l'Etat de droit."
Le tournant du 6 janvier 2021
Même si rien ne garantit que ces quelques personnes auront la même intégrité lors des prochaines élections, Gabriel Sterling ne s'en inquiète pas outre mesure. "En tant que républicain et conservateur, je pense que ces règles sont importantes. In fine, les électeurs américains pensent la même chose."
Gabriel Sterling revient également sur l'attaque du Capitole le 6 janvier 2021. Il estime que Donald Trump a perdu une partie de ses partisans ce jour-là. "En faisant cela, en dépassant les limites, il a montré aux Américains qui se posaient des questions que ça allait trop loin. Au final, on remarquera que la plupart des Américains ne permettront pas à ce genre de choses d'arriver. Les tribunaux ont fonctionné correctement, ils ont repoussé beaucoup de ces fausses informations."
En 2020, le système a tenu malgré la pression. Et je n'imagine pas une plus grande pression que celle qu'a exercée Donald Trump
Selon le fonctionnaire, les élections de 2020 ont permis de montrer que les institutions américaines pouvaient encaisser des crises. "En 2020, le système a tenu malgré la pression. Et je n'imagine pas une plus grande pression que celle qu'a exercée Donald Trump".
Vers une guerre civile?
Les Etats-Unis sont néanmoins divisés comme rarement au cours de leur histoire. L'historien Robert Kagan prédit dans le Washington Post que le pays va se diriger vers une crise du niveau de la guerre de Sécession et parle d'une possible guerre civile. Dans certains Etats républicains, les élus sont en train de changer les règles pour que ce soit le parlement qui avalise le résultat final des élections. Ainsi, le parlement d'un Etat à majorité républicaine pourrait ne pas reconnaître la victoire d'un candidat démocrate.
Si on n'a pas confiance dans les institutions et les personnes qui les représentent, le système échouera
Là encore, Gabriel Sterling préfère nuancer les risques. "Les Etats républicains ne vont pas voir les démocrates gagner, donc ça ne m'inquiète pas. Un Etat comme la Géorgie, plus disputé, (...) ça dépendra de Donald Trump, qui a aliéné une partie de son électorat pour séduire une autre base électorale moins fiable. Mais j'ai confiance que les électeurs, les tribunaux et les personnes qui sont au pouvoir fassent les bonnes choses. Si on n'a pas confiance dans les institutions et les personnes qui les représentent, à ce moment-là, le système échouera et c'est un danger."
Le besoin d'un dialogue raisonnable et mesuré
Finalement, Gabriel Sterling appelle à un dialogue plus raisonnable et mesuré entre les deux camps. "Il y a beaucoup d'hyperboles de part et d'autre de l'échiquier politique. Tant les démocrates que Donald Trump monétisent ces hyperboles. Aux Etats-Unis, comme dans beaucoup de démocraties occidentales, plus vous utilisez ces hyperboles, plus vous attirez l'attention des médias, et plus vous pouvez monétiser cela. En tant qu'électeur, en tant que média, nous devons oeuvrer pour corriger le tir."
Et de conclure: "Si votre candidat perd, ce n'est pas la fin du monde. Il faut arriver à un meilleur discours, je suis là pour ça. (...) Il faut un équilibre, il faut deux partis rationnels forts, qui croient à la vérité."
Interview TV: Philippe Revaz
Version web: Antoine Schaub