Le président de la Conférence des évêques français convoqué après des propos controversés
Lequel du secret de la confession ou de la loi prime face au crime? Le président de la Conférence des évêques de France a jugé que le premier l'emportait sur la seconde, après la publication d'un rapport accablant sur la pédocriminalité au sein de l'Eglise de France.
Le ministre de l'Intérieur, chargé des cultes, "recevra en début de semaine prochaine Mgr de Moulins-Beaufort pour lui demander de s'expliquer sur ses propos", selon l'entourage du ministre.
"Il n'est pas convoqué, mais invité", a-t-on précisé par la suite. Une rencontre à la demande d'Emmanuel Macron, a ensuite ajouté le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal, qui a rappelé: "il n'y a rien de plus fort que les lois de la République dans notre pays, (...) c'est très clair".
Sollicitée, la CEF n'était pas joignable dans l'immédiat.
Ce coup de semonce de l'exécutif intervient près de trente heures après les propos de l'archevêque de Reims, selon lequel le secret de la confession est "plus fort que les lois de la République".
"Le secret de la confession s'impose à nous et s'imposera à nous et, en ce sens-là, il est plus fort que les lois de la République parce qu'il ouvre un espace de parole, libre, qui se fait devant Dieu", avait-il dit précisément, interrogé sur franceinfo, au lendemain de la publication du rapport Sauvé sur la pédocriminalité au sein de l'Eglise catholique.
Trouver un "moyen de faire autrement"
Eric de Moulins-Beaufort a cependant assuré être à la recherche d'une alternative à la levée de ce secret. "Il faut que nous trouvions un moyen de le faire autrement", a-t-il expliqué, précisant que la CEF regarderait "de très près la recommandation" du rapport Sauvé.
Ce dernier a préconisé mardi aux autorités de l'Eglise de relayer un message clair aux confesseurs et aux fidèles, sur l'obligation du confesseur de signaler aux autorités judiciaires et administratives les cas de violences sexuelles infligées à une personne mineure ou vulnérable.
"Il ne faut pas opposer le secret de la confession aux lois de la République puisque celles-ci n'imposent pas sa levée", s'est expliqué le président de la CEF dans un communiqué mercredi soir. "Le droit canonique qui impose aux prêtres le secret de confession comme absolu et inviolable (...) n'est pas donc pas contraire au droit pénal français", a-t-il ajouté.
Ces propos ont suscité la polémique mercredi sur les réseaux sociaux, certains faisant valoir que le gouvernement était beaucoup plus prompt à dénoncer le "séparatisme islamiste". Une loi "confortant les principes de la République", destinée à lutter "contre les séparatismes", a été votée l'été dernier.
Secret confessionnel, secret professionnel?
En France pour le ministère de l'Intérieur, le secret confessionnel est un secret professionnel et, en cas de violation, peut être puni d'un an de prison et 15'000 euros d'amende. "Le secret confessionnel n'est pas supérieur aux lois de la République", souligne Sarah Massoud, secrétaire nationale du syndicat de la magistrature.
Ce secret professionnel n'est toutefois pas absolu: il ne s'applique pas aux confidences faites hors confession. Il ne s'applique pas non plus aux atteintes sexuelles sur personnes mineurs de moins de quinze ans et autres personnes vulnérables (article 434-3 du code pénal).
afp/sjaq
Le président salue "l'esprit de responsabilité" de l'Eglise
En déplacement en Slovénie mercredi, Emmanuel Macron a salué "l'esprit de responsabilité" de l'Eglise de France qui a "décidé de regarder en face" le scandale de la pédocriminalité en son sein. "Il y a un besoin de vérité et de réparation", a-t-il dit.
En avril 2018, il avait prononcé un discours inédit devant les évêques réunis dans le collège cistercien des Bernardins, à Paris, au cours duquel il avait évoqué son souhait de vouloir "réparer le lien entre l'Église et l'État" qui, s'était, selon lui, "abîmé".