"Le procureur général (...) a décidé d'ouvrir une enquête pénale sur les faits associés à ce qui est connu sous le nom de 'Pandora Papers' et liés à l'achat et à la vente de l'entreprise minière Dominga, en lien avec la famille du président Piñera", a déclaré à la presse Marta Herrera, responsable de l'unité anticorruption au sein du bureau du procureur.
Sebastian Piñera, un des dirigeants politiques apparaissant dans les Pandora Papers, l'enquête divulguée par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ), a démenti lundi tout conflit d'intérêt dans la vente de la compagnie minière Dominga à un ami proche.
La vente a eu lieu en 2010 pendant le premier mandat du chef de l'Etat chilien (2010-2015), à nouveau au pouvoir depuis 2018.
"Le procureur général a pris cette décision considérant que ces faits pourraient constituer le moment venu des délits de corruption, avec leur corollaire en matière de dessous-de-table et d'éventuels délits d'ordre fiscal, des questions qui feront toutes l'objet d'une enquête", a ajouté Marta Herrera. Etant donné "la gravité des faits faisant l'objet de l'enquête", l'affaire sera traitée par un parquet régional, en l'occurrence celui de Valparaiso (centre), a précisé la magistrate.
Une vente à un ami du président
Selon une enquête menée par les médias chiliens CIPER et LaBot, membres de l'ICIJ, l'entreprise minière Minera Dominga a été vendue en 2010 à l'homme d'affaires Carlos Alberto Délano, un ami du chef de l'Etat, pour 152 millions de dollars, une transaction opérée aux îles Vierges britanniques.
Le paiement de la transaction devait être effectué en trois versements, et contenait une clause controversée qui subordonnait le dernier paiement à la condition "qu'une zone de protection environnementale ne soit pas établie sur la zone d'exploitation de la société minière, comme le demandent des groupes écologistes".
D'après l'enquête, le gouvernement de Sebastian Piñera, après avoir rejeté le projet d'une autre entreprise au nom de la défense de l'environnement, n'a finalement pas protégé la zone où l'exploitation minière était prévue, si bien que le troisième paiement a bien été effectué.
Destitution possible
Les députés de l'opposition chilienne avaient déjà annoncé mardi qu'ils amorceraient une procédure pouvant conduire à la destitution du président Sebastian Piñera, après ces révélations: "L'ensemble de l'opposition est d'accord pour lancer" cette procédure dite "d'accusation constitutionnelle" contre le président Piñera, a déclaré à la presse Jaime Naranjo, député du Parti socialiste.
Cette démarche vise à établir la responsabilité des hauts fonctionnaires, et en cas de succès, elle peut conduire à la destitution de Piñera, à six semaines du premier tour de l'élection présidentielle.
"C'est une accusation fondée sur un mensonge, basée uniquement sur des raisons politiques et électorales à court terme, qui font voler en éclats l'idée de démocratie", a répondu Jaime Bellolio, ministre et porte-parole de la Présidence.
La Chambre basse votera sur la recevabilité de la démarche de l'opposition, qui doit recueillir la majorité simple des voix de ses 155 membres pour être approuvée. Ensuite, l'acte sera présenté devant le Sénat où le vote des deux tiers des 43 sénateurs est requis.
L'opposition présentera sa requête la semaine prochaine et entend qu'elle soit votée à la Chambre des députés avant le 21 novembre, date du premier tour de l'élection présidentielle.
Sebastian Piñera ne peut pas se représenter.
sjaq et les agences