Des images diffusées par le gouvernement colombien montrent Otoniel, qui semblait étrangement décontracté, menotté et entouré de militaires colombiens armés. Le narcotrafiquant a été capturé à Necocli dans le nord-ouest du pays, près de la frontière avec le Panama.
"C'est le coup le plus dur qui ait été porté au trafic de drogue au cours de ce siècle dans notre pays (...) seulement comparable à la chute de Pablo Escobar (qui a été abattu en 1993 par la police colombienne, ndlr)", s'est félicité le président colombien Ivan Duque dans un message diffusé sur les réseaux sociaux. Il s'agissait de "l'expédition dans la jungle la plus importante jamais vue dans l'histoire militaire de notre pays", a-t-il spécifié.
Transfert sous haute surveillance
La police colombienne a mené "une importante opération satellitaire avec des agences des États-Unis et du Royaume-Uni", a expliqué en conférence de presse le directeur de la police, le général Jorge Vargas. L'opération a mobilisé quelque 500 membres des forces de sécurité, appuyés par 22 hélicoptères. Un policier a été tué durant celle-ci.
Selon la police, le narcotrafiquant se cachait dans la jungle, dans la région d'Uraba, dont il est originaire, et n'utilisait pas de téléphone, s'appuyant sur des coursiers pour communiquer. Harcelé par les autorités, il y "dormait sous la pluie, sans jamais s'approcher des zones habitées", et se "déplaçait avec huit cercles de sécurité" autour de lui, a assuré le général.
"Otoniel" a ensuite été transféré en fin de journée samedi vers Bogota par avion, où il a été emmené dans les locaux de la police sous forte escorte, selon des images de la police.
La chute d'"Otoniel" représente le principal succès du gouvernement du président conservateur dans la lutte contre le crime organisé, ceci dans le plus grand pays exportateur de cocaïne au monde. Malgré quatre décennies de lutte contre le trafic de drogue, la Colombie reste le premier producteur mondial de cocaïne, dont les États-Unis sont le premier consommateur.
Extradition vers les Etats-Unis?
En 2017, Otoniel avait annoncé son intention de parvenir à un accord pour se rendre à la justice. Le gouvernement avait répondu en déployant pas moins de 1000 soldats pour le pourchasser.
Le narcotrafiquant, âgé de 50 ans, était à la tête du Clan del Golfo, formé d'anciens membres de groupes paramilitaires qui ont mené une lutte acharnée contre les guérillas de gauche jusqu'aux années 2010. Il s'agit du plus puissant gang de narcotrafiquants de Colombie et l'arrestation de son chef représente le plus gros coup porté au crime organisé dans le pays.
Les Etats-Unis avaient offert une récompense de 5 millions de dollars pour sa capture. Inculpé par la justice américaine en 2009, Otoniel fait notamment l'objet d'une procédure d'extradition devant le tribunal du district sud de New York. "Nous allons travailler avec les autorités pour atteindre cet objectif également", a commenté à ce propos le président Duque.
afp/jop
Des groupes marxistes à l'extrême-droite
Otoniel était à la tête du Clan del Golfo depuis la mort de son frère Juan de Dios lors d'affrontements avec la police en 2012.
Il avait pris les armes à l'âge de 18 ans comme guérillero dans l'Armée de libération populaire (EPL), une guérilla marxiste démobilisée en 1991.
Après avoir déposé les armes, il était retourné combattre dans les groupes paramilitaires d'extrême droite.
Nombre de ces groupes avaient été démobilisés en 2006 à l'initiative du gouvernement de l'ex-président de droite Alvaro Uribe (2002-2010). Mais Otoniel avait décidé de rester dans l'illégalité.
Principal vecteur de violence depuis les FARC
Le Clan del Golfo est un cartel formé d'anciens membres de groupes paramilitaires qui ont mené une lutte acharnée contre les guérillas de gauche jusqu'aux années 2010.
Le cartel, financé principalement grâce au trafic de drogue, à l'exploitation minière illégale et à l'extorsion, est présent dans près de 300 municipalités du pays, selon le groupe de réflexion indépendant Indepaz.
Le gouvernement colombien accuse le Clan del Golfo d'être l'un des responsables de la pire vague de violence qui secoue le pays depuis la signature de l'accord de paix en 2016 avec la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC, marxiste).