Les intérêts obligataires ont été versés in extremis aux investisseurs internationaux, indique l’agence Bloomberg. La nouvelle a soulagé des marchés tendus depuis la veille, certains créanciers ayant signalé mercredi soir être toujours dans l’attente de leur argent. L’annonce du paiement a fait s’envoler l’action d’Evergrande de plus de 8% à l’ouverture de la Bourse de Hong Kong.
L’entreprise continue de jouer avec les nerfs des investisseurs: elle a déjà répété ce même scénario à deux reprises le mois dernier, en réglant ses obligations à quelques minutes seulement du couperet final. Sur le fil du rasoir, la société a ainsi échappé aux première procédures d’insolvabilité.
Menace pour l'économie chinoise
Empêtré dans des difficultés financières, le groupe doit au total près de 300 milliards de francs. Une faillite du deuxième acteur de l’immobilier chinois enverrait une onde de choc à travers l’économie du pays. Le secteur de la construction pèse près de 30% du produit intérieur brut. Des millions de particuliers ont en outre investi toutes leurs économies dans la pierre.
La bulle spéculative résultant de cette surchauffe préoccupe depuis des années le pouvoir qui, soucieux de la voir éclater, tente de refroidir le secteur. Les conséquences d’un effondrement de l’immobilier auraient des effets dévastateurs sur la deuxième économie mondiale, mettant à mal la stabilité sociale.
Or dans le sillage de la crise Evergrande, d’autres sociétés immobilières tirent la langue. Entre crise de liquidités, défaut de paiements ou abaissement des notes de solvabilité, un pan central de l’économie est aujourd’hui fragilisé.
Le pouvoir s'active en coulisses
Sans avoir l’air d’intervenir directement, le pouvoir s’active en coulisses pour restructurer les activités d’Evergrande et stabiliser le marché. Les autorités agissent cependant discrètement, rechignant à sauver ouvertement l’entreprise. Pékin désire en effet se montrer ferme pour envoyer un signal fort et discipliner les promoteurs et les banques.
L’Etat ne veut plus, comme ce fut le cas pendant des années, être perçu comme garant implicite. Face aux risques systémiques pour son économie, le parti communiste ne peut malgré tout pas rester les bras croisés.
Le gouvernement central œuvre à un démantèlement progressif, assisté par différents pouvoir locaux et entreprises d’Etat. Aux manettes, il tente un atterrissage d’urgence. Evergrande doit idéalement imploser au lieu d’exploser. Le démantèlement progressif pourrait prendre encore des années.
Déjà mise en œuvre dans le contexte de la reprise en main d’autres conglomérats en souffrance, comme HNA l’an dernier, cette stratégie est délicate dans le cas d’Evergrande. Le poids du secteur immobilier dans l’économie en fait une opération à haut risque au cours de laquelle Pékin n’a pas droit à l’erreur.
Michael Peuker/jpr