Se projette-t-il au-delà d'avril 2022? "D'évidence!", répond Emmanuel Macron. Il n'ira pas plus loin: "Au moment où je vous parle, je dois passer le cap de la crise sanitaire et il y a encore des décisions à prendre. Certains sont en campagne, votre serviteur non", s'amuse presque le président français. Il adresse tout de même des piques à des candidats déjà déclarés comme Valérie Pécresse (Les Républicains) ou le polémiste Eric Zemmour, sans jamais les nommer.
A quatre mois du premier tour de la présidentielle, le 10 avril, Emmanuel Macron n'a pas répondu, comme prévu, aux appels pressants des oppositions pour qu'il entre enfin dans la course et cesse de mener campagne "sans le dire" (lire encadré).
Au moment où je vous parle, je dois passer le cap de la crise sanitaire et il y a encore des décisions à prendre. Certains sont en campagne, votre serviteur non
Relancé à plusieurs reprises sur son éventuelle candidature, il assure ne pas être "aujourd'hui dans la situation de répondre à cette question, à la fois compte tenu du pays [et] compte tenu de moi-même". Mais "je n'ai jamais pensé qu'on pouvait, en cinq ans, tout faire", nuance-t-il, en souhaitant "continuer à [se] projeter".
"Les Françaises et les Français m'ont choisi [en 2017] et je n'étais pas connu. Nous avons appris à nous connaître, je n'étais pas familier de nos compatriotes", reconnaît le jeune président, qui fêtera ses 44 ans mardi prochain.
"J'assume"
Durant près de deux heures, le locataire de l'Elysée a défendu son bilan politique et personnel face aux questions de deux journalistes de TF1 et LCI. Il a fait le point sur la situation de la France mais aussi sur sa situation à lui.
"Il y a quelqu'un qui tranche, j'assume", répond-il quand il est interrogé sur sa manière de présider, souvent qualifiée de "jupitérienne".
Et de demander "le droit de ne pas être la caricature dans laquelle on veut [l'] enfermer", comme celles de président déconnecté de la vraie vie des Françaises et des Français ou de président des riches. "Je n'ai jamais été ça! (...) Mes valeurs ne sont pas celles d'un président des riches", insiste-t-il.
Face aux images de chaos et d'hostilité qui ont marqué ses années de pouvoir, il a pris le temps de trouver ses mots, laissant passer des silences. Sur ses petites phrases parfois jugées arrogantes, il reconnaît: "Je ne dirai plus les mêmes mots, J'ai appris". Emmanuel Macron avoue des défauts sur la forme pour mieux dire qu'il avait raison sur le fond.
"Plus de bienveillance"
Elu avec la promesse de dépasser le clivage droite-gauche, Emmanuel Macron explique que son projet était bâti sur "le triptyque libérer/protéger/unifier". "Je ne crois pas dans la sauvagerie, je ne suis pas pour la loi de la jungle! Je suis pour la responsabilité, le mérite, mais également l'entraide et la solidarité lorsque les coups durs sont là", détaille-t-il.
Le chef de l'Etat n'a ainsi pas livré de grande annonce si ce n'est une volonté de poursuivre les réformes engagées dans son quinquennat: "Avec plus de bienveillance", semble-t-il encore se projeter.
>> Les précisions de La Matinale:
Sujet radio: Alexandre Habay
Version web: Stéphanie Jaquet et l'afp
Réactions politiques
L'émission intitulée "Où va la France?", enregistrée dimanche dans la salle des fêtes de l'Elysée, a mis en fureur adversaires et partisans du président à moins de quatre mois de la présidentielle.
L'opposition a dénoncé une atteinte à l'"équité" du temps de parole tandis que la majorité défendait le droit du président à s'expliquer face aux Français.
Plusieurs prétendants à l'Elysée ont fait appel à l'arbitre, en saisissant le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA).
Réagissant à chaud, le socialiste Boris Vallaud a déclaré voir dans cette émission un "confessionnal à ciel ouvert et pas une idée neuve".
"On était face à un candidat", a commenté Eric Ciotti (LR).
A l'extrême droite, Eric Zemmour a raillé le "bilan catastrophique" d'Emmanuel Macron, "l'homme du grand remplacement et l'homme du grand déclassement", alors que le président du RN Jordan Bardella a estimé avoir "entendu un numéro d'autosatisfaction" d'un président "en campagne" qui "à un moment va devoir répondre de son bilan".
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