La commission d'instruction de la Cour de révision française a ordonné un complément d'information, avant de se prononcer sur la recevabilité d'une requête déposée par Omar Raddad. "C'est un pas vers la révision", s'est félicitée l'avocate d'Omar Raddad, Sylvie Noachovitch. "Nous allons vers la vérité judiciaire", a-t-elle déclaré à la presse.
La Cour de révision est effectivement apte à décider d'un nouveau procès, un événement cependant rarissime en France. Elle pourra donc éventuellement être saisie.
La fameuse inscription "Omar m'a tuer"
Omar Raddad est au centre de l'une des affaires criminelles les plus énigmatiques et controversées de France. Désigné par l'inscription "Omar m'a tuer", tracée avec le sang de la victime sur la scène de crime, l'ex-jardinier marocain avait essuyé un premier rejet d'une demande de révision en 2002.
Sa nouvelle requête s'appuie sur les progrès de la science en matière d'ADN et sur une loi votée en juin 2014 qui assouplit les critères de révision d'un procès. Ce sont "des éléments probants mettant en doute la culpabilité d'Omar Raddad", estime Me Noachovitch.
ADN différent de celui du condamné
Elle a présenté à la justice les conclusions d'un expert en génétique qui analysait à nouveau une découverte de 2015. Des prélèvements sur des scellés avaient mis en évidence des traces d'ADN "exploitables" qui ne correspondent pas au profil génétique de l'ex-jardinier.
Au total, quatre empreintes génétiques correspondant à quatre hommes avaient été trouvées sur place, sur deux portes et un chevron. C'est sur ces deux portes qu'avaient été écrites les inscriptions "Omar m'a tuer", emblématique de cette affaire, et "Omar m'a t".
Empreintes laissées au moment des faits
Ghislaine Marchal, riche veuve d'un équipementier automobile, âgée de 65 ans, avait été retrouvée dans la cave de sa propriété de Mougins (sud-est de la France) le 23 juin 1991.
Dans des notes de 2019 et 2020, l'expert en génétique avait relevé la présence de 35 traces d'un ADN masculin inconnu sur l'inscription "Omar m'a t" et conclu en faveur de l'hypothèse d'un dépôt de ces empreintes au moment des faits et non d'une "pollution" ultérieure, notamment par les enquêteurs.
La commission d'instruction de la Cour de révision a demandé des investigations complémentaires sur ce point. La défense d'Omar Raddad juge plausible que ces traces génétiques aient été déposées par l'auteur de l'inscription, pour désigner un bouc-émissaire.
La première requête, déposée par le précédent défenseur d'Omar Raddad, se basait déjà sur des expertises génétiques qui avaient mis au jour un ADN masculin "en très faible proportion", différent de celui du jardinier.
Mais la Cour de révision l'avait rejetée, considérant qu'il était "impossible de déterminer à quel moment, antérieur, concomitant ou postérieur au meurtre, ces traces (avaient) été laissées".
afp/oang
Grâce partielle de Jacques Chirac
Condamné en 1994 à 18 ans de réclusion, sans possibilité d'appel à l'époque, Omar Raddad avait bénéficié d'une grâce partielle du président Jacques Chirac, puis d'une libération conditionnelle en 1998.
Cette grâce ne vaut pas annulation de la condamnation et ne l'innocente pas.
La famille de la victime "prend acte"
Dans un communiqué transmis à l'AFP, la famille de Ghislaine Marchal a dit "(prendre) acte" de la décision ordonnant des investigations complémentaires.
La famille de la victime "souhaite que ces investigations permettent de mettre un terme définitif à une affaire douloureusement vécue par elle" et "espère que ce nouveau volet judiciaire se déroulera dans un climat médiatique apaisé", selon le communiqué.