Verosoa, qui vit dans un village du sud de l'île, est mère de neuf enfants. Sa famille ne se nourrit que de bouillie de riz et Verosoa a du mal à allaiter sa fille qui souffre de maux de ventre. "On n'a rien à manger! Ici, il n'y a pas de pluie pour qu'on puisse cultiver, faire notre métier d'agriculteur (...). La faim finira par nous tuer", témoigne-t-elle, mardi dans le 19h30.
Agée de 6 mois, sa fille est en situation de malnutrition aiguë sévère. Dans cette région, les hôpitaux sont insuffisants et très éloignés des villages. L'ONG suisse Medair a donc mis en place un centre de santé mobile.
Un million de personnes concernées
"Quand l'enfant est faible, il est plus vulnérable aux maladies comme la diarrhée mortelle et la toux. Et s'il n'est pas soigné à temps, il peut mourir. Car son organisme et ses anticorps sont plus faibles", explique l'infirmier Erakima Sandandrainy.
Dans le sud de Madagascar, région plus grande que la Suisse, ce sont plus d'un million de personnes qui souffrent du kere, la faim en malgache. Et plus de 14'000 habitants sont au bord de la famine. Cette insécurité alimentaire est un fléau récurrent qui frappe cette zone désertique presque tous les ans.
Mais depuis quelques années, le réchauffement climatique a aggravé la sécheresse. La population mange des feuilles de cactus et creuse des rivières asséchées pour récupérer un peu d'eau.
>> Lire aussi : Le réchauffement climatique à l'origine de la famine à Madagascar
Sur une route, des habitants se jettent sur les mares d'eaux stagnantes. L'un d'entre eux déclare cuisiner et boire cette eau: "Bien sûr que ça nous rend malade, mais où voulez-vous qu'on trouve de l'eau sinon."
Distribution de nourriture mise en cause
L'ONG Medair construit ou répare des bornes-fontaines dans plusieurs villages, une aubaine pour les habitants qui peuvent désormais boire de l'eau potable, mais l'eau souterraine est rare et les files d'attente pour remplir les bidons s'allongent.
Pendant des décennies et jusqu'à aujourd'hui, la réponse privilégiée du gouvernement pour lutter contre la crise alimentaire a été la distribution de nourriture par les ONG.
Pourtant, cette politique à court terme est de plus en plus critiquée, même au sein des autorités. De nombreuses ONG, par exemple Medair, souhaitent développer des infrastructures permettant aux populations d'être autonomes en eau et de ne plus dépendre de l'aide alimentaire.
Volana Razafimanantsoa
A l'échelle mondiale, la faim dans le monde est en augmentation
En quelques décennies, la sous-alimentation dans le monde a baissé spectaculairement, passant sous la barre des 10% de la population mondiale au milieu des années 2000. Un progrès considérable, alors même que la population mondiale est en augmentation.
Mais depuis quelques années, la courbe repart à la hausse. Les causes principales de la sous-alimentation sont les conflits, le changement climatique - qui provoque notamment des sécheresses plus fréquentes et plus intenses - et la pauvreté.
Cette dernière s'est aggravée depuis quelques mois avec la crise du Covid-19, qui a perturbé la production et le transport des produits alimentaires de base (huile, blé, riz, etc.). Conséquence: leur coût a augmenté de 40% en moyenne pendant la pandémie.
Dix mille enfants meurent chaque jour
Aujourd'hui, l'ONU estime que plus de 800 millions de personnes ont souffert de la faim en 2020. Et environ 25'000 personnes meurent chaque jour des conséquences de la sous-nutrition, dont 10'000 enfants).
Les objectifs du millénaire des Nations unies étaient d’éradiquer la faim dans le monde d’ici 2030. Malgré d'immenses progrès, les efforts à fournir restent considérables. Bâtir une agriculture qui saura anticiper et résister au changement climatique est un enjeu crucial pour des centaines de millions de personnes dans le monde.