Avec le nickel et le cobalt, le lithium fait partie des trois minéraux nécessaires à la production des voitures électriques de demain. Aujourd'hui, la Chine contrôle plus de 40% des capacités de production et près de 60% des capacités de raffinage de lithium dans le monde. Mais l'Europe veut réduire sa dépendance vis-à-vis de l'extérieur en relançant sa propre exploitation minière.
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Un projet resté longtemps discret en Serbie
Les regards se tournent notamment vers le Portugal, mais aussi vers la Serbie où le groupe Rio Tinto prévoit d'ouvrir la plus grande mine du continent. Resté longtemps très discret, le projet prévu dans la vallée du Jadar s'est accéléré en 2020. Et en novembre dernier, le gouvernement a proposé deux lois en faveur du géant minier qui ont suscité une levée de boucliers parmi la population.
Début décembre, des milliers de manifestants ont envahi une autoroute et un pont reliant la capitale, Belgrade, à ses banlieues périphériques. De plus petites manifestations ont aussi eu lieu dans d'autres villes.
Rio Tinto sort du silence pour tenter de rassurer
Face à ce mouvement bref mais intense, le groupe anglo-australien a donc tiré le frein à main. Dans une interview rarissime citée notamment par Radio France Internationale (RFI), sa directrice pour la Serbie, Vesna Prodanovic, a annoncé que l'entreprise ne prendrait plus d'initiative qui pourrait inquiéter les citoyens serbes.
Elle a assuré que les activités liées au projet allaient être suspendues. Et elle a appelé à un dialogue public pour que "les habitants soient informés de tous les aspects du projet".
Gros enjeu économique pour le président serbe
Rio Tinto joue donc l'apaisement, tout comme le président serbe Alexandar Vucic. Celui-ci s'est fixé l'objectif de redresser l'économie du pays en attirant usines, investisseurs et projets industriels. Récemment encore, il s'est vanté de la croissance économique du pays (plus de 7% cette année), l'une des plus vigoureuses d'Europe. Or cette croissance est soutenue notamment par le projet minier de Rio Tinto.
Mais le chef de l'Etat se retrouve mal pris et pourrait bien revoir sa position. "Je ne suis pas sûr que Vucic soutienne toujours ce projet", a estimé Ratko Ristitch, vice-recteur de l'Université de Belgrade, samedi dans une interview à la RTS.
Environnement et politique dans la balance
"Il y a quelques mois, il pensait que c'était une bonne opportunité pour la Serbie, qui mènerait à l'augmentation du produit intérieur brut, qui emploierait de nombreuses personnes et amènerait un revenu important au pays", a poursuivi le professeur. "Mais je suis convaincu qu'il ne pense plus ainsi et je crois même que, pour des raisons environnementales et politiques, il stoppera ce projet".
Ratko Ristitch pense notamment au risque de pollution de réserves importantes d'eau potable et surtout à des raisons politiques comme les prochaines élections, agendées au mois d'avril 2022.
oang avec Katja Schaer