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Nouveaux tués par balle lors d'une manifestation anti-putsch au Soudan

Des Soudanais portent des affiches de protestataires tués lors d'une manifestation dans la capitale Khartoum contre le coup d'État de l'armée du 25 octobre, le 30 décembre 2021. [AFP]
Nouvelles manifestations au Soudan, privé de télécommunications / Le Journal horaire / 22 sec. / le 30 décembre 2021
La violence s'est de nouveau déchaînée jeudi au Soudan, où quatre manifestants ont été tués et des dizaines blessés parmi une foule qui a conspué le pouvoir militaire, bravant balles réelles, grenades lacrymogènes et coupure des communications.

A quelques centaines de mètres du palais présidentiel de Khartoum où siège le Conseil souverain, la plus haute autorité de la transition chapeautée par le général Burhane, les forces de sécurité ont tiré des grenades lacrymogènes. Tandis que la foule s'approchait du bâtiment et s'en éloignait au gré des charges policières, des manifestants évacuaient des blessés.

Selon un syndicat de médecins pro-démocratie, quatre manifestants ont été tués par balles à Omdourman, la banlieue nord-ouest de Khartoum. Dans un appel relayé par des pages Facebook tenues par des Soudanais résidant à l'étranger, ces médecins ont déploré que les forces de l'ordre "empêchent les ambulances d'approcher" des victimes et forcent même un manifestant blessé par balle au cou et sous assistance respiratoire à descendre d'un de ces véhicules.

Plus de 50 manifestants tués depuis le putsch

"Les putschistes utilisent des balles réelles contre les manifestants", ont-ils affirmé, faisant état de "dizaines de blessés". Ils ont appelé en renfort des médecins à l'hôpital Arbaïn d'Omdourman.

En deux mois de mobilisation anti-putsch, 52 manifestants ont été tués et des centaines blessés par balle. Le 19 décembre, les forces de sécurité avaient été accusées par l'ONU d'avoir violé des manifestantes pour tenter de briser la contestation. Samedi dernier, 235 personnes avaient en outre déjà été blessées dans la dispersion d'une mobilisation nationale, toujours selon le syndicat de médecins pro-démocratie.

>> Lire à ce sujet : Milliers de manifestants au Soudan malgré les menaces des militaires

Téléphone coupé

Il est difficile de connaître exactement l'ampleur de la répression, car les autorités ont coupé jeudi dans la matinée l'internet mobile et les appels téléphoniques - locaux comme ceux venus de l'étranger - avant de les rétablir en soirée, une fois les manifestants dispersés. Pour empêcher au maximum les rassemblements, les forces de l'ordre avaient également installé dès mercredi soir des containers en travers des ponts reliant Khartoum à ses banlieues.

La télévision satellitaire basée à Dubaï Al-Arabiya a annoncé de son côté que plusieurs de ses journalistes avaient été blessés lorsque les forces de sécurité ont attaqué son bureau. La chaîne Asharq, elle aussi financée par les Saoudiens, a indiqué qu'une de ses équipes avait été empêchée de couvrir la manifestation par les forces de sécurité. Les exactions ont été dénoncées par la mission de l'ONU au Soudan et l'ambassade américaine.

Nouvelles techniques pour contrer les manifestations

A chaque nouvel appel à manifester pour "la révolution" et contre le chef de l'armée, le général Abdel Fattah al-Burhane, qui a renforcé son pouvoir avec un putsch le 25 octobre, les autorités mobilisent de nouvelles techniques pour tenter de contrer l'opposition.

Outre les perquisitions musclées chez les médias, les forces de sécurité avaient installé tôt jeudi des caméras sur les principaux axes de Khartoum, inquiétant un peu plus des militants qui dénoncent des rafles ininterrompues depuis des semaines dans leurs rangs. Cela n'a pas empêché des dizaines de milliers de manifestants de scander de nouveau "Non au pouvoir militaire" et "Les militaires à la caserne!" à Khartoum mais aussi à Kessala et à Port-Soudan dans l'Est ou à Madani, au sud de la capitale.

agences/vic/iar

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Accord politique critiqué

Dans la capitale Khartoum, une manifestante a confié à un journaliste de l'AFP qu'elle défilait "pour la chute du pouvoir militaire" et surtout "contre l'accord politique", un texte qui a récemment permis au Premier ministre civil Abdallah Hamdok de sortir de résidence surveillée, mais aussi au général Burhane de rester à la tête des autorités de transition deux ans de plus.

Pour un autre manifestant, les civils n'auraient jamais dû accepter de rejoindre l'union sacrée de 2019, après que la rue a forcé les généraux à démettre l'un des leurs, le dictateur Omar el-Béchir. Civils et militaires avaient alors décidé de s'allier en vue de mener le pays vers la démocratie. "Signer avec les militaires était une erreur depuis le début", a-t-il affirmé, car les généraux au pouvoir sont "des hommes de Béchir".

Le pays est toujours sans gouvernement

Le coup d'Etat du général Burhane, une "correction du cours de la révolution" selon lui, a rebattu les cartes. D'après les termes d'un accord que le chef de l'armée a signé le 21 novembre avec le Premier ministre civil Abdallah Hamdok, ce dernier a été rétabli dans ses fonctions après avoir été placé en résidence surveillée.

Le mandat du général Burhane à la tête des autorités de transition a été prolongé jusqu'aux élections promises en juillet 2023. Mais le Soudan n'a toujours pas de gouvernement, condition sine qua non à la reprise de l'aide internationale, vitale pour ce pays, l'un des plus pauvres au monde.

Quant à Abdallah Hamdok, dénoncé par la rue comme un "traître" qui "favorise le retour de l'ancien régime", il fait planer la menace d'une possible démission, si l'on en croit les fuites régulières de la presse locale qui assure qu'il n'apparaîtrait plus que rarement à son bureau.