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Au Ghana, les fripes importées depuis l'Occident sont source de pollution

Le Ghana croule sous les vêtements venus d'Occident et n'arrive pas à enrayer cette pollution alimentée par des associations
Le Ghana croule sous les vêtements venus d'Occident et n'arrive pas à enrayer cette pollution alimentée par des associations / 19h30 / 2 min. / le 5 janvier 2022
Une partie non négligeable des vêtements usagés portés en Occident finit en Afrique. Au Ghana, ces dons acheminés via des associations caritatives sont devenus une source de pollution toxique pour les habitants. Reportage.

Appelés mitumba (ballots) au Kenya, obroni wawu (vêtements d’hommes blancs morts) au Ghana et salaula (choisir en fouillant) en Zambie, les vêtements usagés importés d’Occident sont souvent accusés d’être à l'origine du faible niveau de fabrication de vêtements nationaux en Afrique, ainsi qu'une source de pollution.

Au Ghana, près de 160 tonnes de vêtements arrivent chaque jour. Des habits usagés et donnés à des associations en Europe ou aux États-Unis, envoyés par des entreprises internationales de recyclage. Dans la capitale Accra, des milliers de vêtements s’entassent, formant des dunes artificielles – certaines hautes de plus de vingt mètres.

Fripes inutilisables

Toute une économie s’est développée dans le pays autour de la fripe, comme au marché de Kantamanto, où les habits sont vendus au kilo. Le problème? La plupart des habits sont inutilisables. "Certains vêtements ne valent rien et sont bons à jeter à la poubelle. Personne ne veut acheter ça… Ce qui fait qu’à la fin de la journée, je suis perdante", explique une vendeuse devant son étal.

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Les invendus partent à la décharge: au Ghana, près de 70 tonnes de vêtements sont brûlés chaque jour. Symbole de la surconsommation occidentale, la pollution générée par ces feux constitue une menace pour la santé des habitants, en plus d’être une catastrophe écologique.

"Nous brûlons ces vêtements car nous n’en avons pas besoin, mais il y en a toujours plus qui sont importés. La pollution engendrée nous rend malades, nous donne de la fièvre et des maux de tête", témoigne un habitant du quartier.

Freiner la pollution

Liz Ricketts est une ancienne styliste américaine qui a créé l’ONG "The Or Foundation". Fondée en 2009, l’association promeut un recyclage éthique de ces fripes, tout en essayant de réduire la pollution textile.

"Cela va prendre des années pour que ces vêtements se dégradent… Pendant ce temps, des microfibres nocives et toxiques sont libérées dans l'environnement. Ce que les gens doivent comprendre, c'est que ces déchets rendent visible un problème qui existe dans leur placard. Nous devons prendre nos responsabilités et changer notre mode de consommation", analyse-t-elle.

Autre conséquence du marché: l’impact sur l’économie locale de l’habillement, le commerce de fripes détruisant de nombreux emplois. Certains pays africains n’ont pas hésité à prendre des mesures, comme au Rwanda, où l'importation de vêtements est surtaxée et les fripes interdites d'importation. La Communauté d’Afrique de l’Est (CAE), un groupement économique régional, a décidé d’interdire complètement l’importation de vêtements usagés depuis 2019.

Sujet TV : Delphine Gianora
Adaptation web : Sarah Jelassi

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