Après une nuit meurtrière, les violences se sont poursuivies jeudi, alors que les autorités faisaient état de "dizaines" de manifestants tués et plus d'un millier de personnes blessées, dont 62 grièvement. En face, 18 membres des forces de sécurité ont été tués et 748 blessés, ont par ailleurs rapporté les agences de presse, citant les autorités.
Jeudi, un correspondant de l'AFP a encore entendu plusieurs coups de feu dans le centre de la capitale économique Almaty, qui portait les stigmates des affrontements de la veille, avec des façades d'immeubles noircies par les flammes, des carcasses de véhicules calcinées et des flaques de sang au sol.
Des médias locaux ont affirmé jeudi soir que les forces de l'ordre avaient chassé les manifestants de la principale place de la ville et repris le contrôle des bâtiments officiels. L'information n'a pas été confirmée par des agences occidentales.
Bâtiments stratégiques ciblés
"La nuit dernière, les forces extrémistes ont tenté de prendre d'assaut les bâtiments administratifs, le département de la police de la ville d'Almaty, ainsi que les départements locaux et les commissariats de police", a résumé le porte-parole de la police aux médias.
"Des dizaines d'assaillants ont été éliminés et leurs identités sont en cours d'identification", a-t-il ajouté, sans autres précisions. Le ministère de la Santé a de son côté fait état de plus de 2000 blessés, certains gravement. Les autorités ont aussi annoncé douze morts et plus de 300 blessés parmi les forces de l'ordre.
Magasins pillés et bâtiments incendiés
Les images diffusées dans les médias et sur les réseaux sociaux ont montré des magasins pillés et certains bâtiments administratifs investis et incendiés à Almaty, tandis que des tirs d'arme automatique pouvaient être entendus.
L'état d'urgence a été décrété mercredi à l'ensemble du territoire, a indiqué la télévision d'Etat, précisant qu'il serait en vigueur jusqu'au 19 janvier. Il "restreindra la liberté de mouvement, y compris les transports", a indiqué en russe le présentateur de la chaîne, et interdira "les évènements collectifs et les cérémonies familiales liées aux naissances, mariages ou décès".
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Hausse du prix du gaz
Le mouvement de colère a débuté dimanche après une hausse des prix du gaz naturel liquéfié (GNL). Le gouvernement avait dans un premier temps tenté de calmer, sans succès, les protestataires en concédant une réduction du prix du GNL, le fixant à 50 tenges (10 centimes) le litre dans la région, contre 120 au début de l'année. La hausse des prix du gaz est perçue par la population comme injuste au vu des vastes ressources gazières et pétrolières du Kazakhstan.
Malgré les concessions du pouvoir, qui a d’abord rétabli le prix initial du gaz naturel compressé avant de limoger le gouvernement, le mouvement n’a cessé de prendre de l’ampleur. Le gouvernement a ensuite annoncé avoir plafonné pour six mois le prix de vente des carburants.
Moscou déploie des troupes
La Russie et ses alliés ont dans la foulée annoncé l'envoi du premier contingent de forces de maintien de la paix au Kazakhstan. "Une force collective de maintien de la paix de l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) a été envoyée pour une période limitée afin de stabiliser et de normaliser la situation", a indiqué cette alliance militaire, qui répondait à une demande du président de cette ex-république soviétique Kassym-Jomart Tokaïev à la télévision d'Etat.
Evoquant des "événements extrêmement préoccupants", la France a de son côté appelé "toutes les parties", y compris les forces extérieures, à la "modération". Le gouvernement britannique a exigé un "règlement pacifique" de la crise.
Enfin, l'Union européenne a appelé la Russie à respecter la souveraineté et l'indépendance du Kazakhstan. "La violence doit cesser. Nous appelons également toutes les parties à la retenue et à une résolution pacifique de la situation. L'UE est bien sûr prête et disposée à favoriser le dialogue dans le pays", a dit un porte-parole de la Commission.
afp/boi