Le Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR) "qui regroupe toutes les composantes des forces de défense et de sécurité a décidé de mettre fin au pouvoir de Marc Roch Christian Kaboré", a annoncé le capitaine Kader Ouedraogo, entouré d'une quinzaine de militaires à la télévision.
Conséquence de ce coup de force initié dimanche par des mutineries dans des casernes du pays, les frontières terrestres et aériennes seront fermées à partir de minuit, le gouvernement et l'Assemblée nationale dissous et la constitution "suspendue".
Un couvre-feu est instauré de 21h à 5h sur le tout le territoire, a poursuivi Kader Ouedraogo qui lisait un communiqué signé du leader du MPSR, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, qui apparaît comme le nouvel homme fort du pays. L'armée a encore souligné que sa prise de pouvoir s'est déroulée sans violence et que les personnes arrêtées se trouvent en lieu sûr.
Le sort du président incertain
Concernant Roch Marc Christian Kaboré, les militaires se sont contentés d'indiquer que "les opérations se sont déroulées sans effusion de sang et sans aucune violence physique sur les personnes arrêtées qui sont détenues dans un lieu sur dans le respect de leur dignité", sans mentionner de noms.
Plus tôt dans la journée, le flou régnait sur le sort du président, des sources sécuritaires affirmant qu'il était aux mains des soldats, tandis qu'une source gouvernementale assurait qu'il avait été "exfiltré" dimanche soir par des gendarmes de sa garde.
Cette même source expliquait que "des éléments armés avaient tiré sur les véhicules de son convoi". En matinée, un journaliste de l'AFP avait vu près de la résidence du chef de l'Etat trois véhicules criblés de balles. Des traces de sang étaient visibles sur l'un d'eux.
Des tirs avaient été entendus dimanche soir près de la résidence du chef de l'Etat et un hélicoptère avait survolé la zone tous feux éteints, selon des résidents.
Des soldats se sont mutinés dimanche dans plusieurs casernes du Burkina Faso pour réclamer le départ des chefs de l'armée et des "moyens adaptés" à la lutte contre les djihadistes qui frappent ce pays depuis 2015.
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Une région déstabilisée
Au pouvoir depuis 2015, le président Kaboré, réélu en 2020 sur la promesse de faire de la lutte antidjihadiste sa priorité, était de plus en plus contesté par une population excédée par les violences djihadistes et son impuissance à y faire face.
Ces mutineries sont survenues dans une Afrique de l'Ouest de plus en plus déstabilisée par les djihadistes qui frappent aussi le Mali et le Niger voisins et où des coups d'Etat se sont récemment produits, au Mali et en Guinée.
Plusieurs manifestations de colère ont eu lieu depuis plusieurs mois dans plusieurs villes du Burkina Faso pour dénoncer l'incapacité du pouvoir a contrer les attaques djihadistes qui se multiplient, souvent interdites et dispersées par les policiers anti-émeutes.
afp/lan/jpr
L'UE appelle à la libération "immédiate" du président Kaboré
L'Union européenne a appelé à la libération "immédiate" du président du Burkina Faso, Roch Marc Christian Kaboré, "Dans ce moment d'incertitude, l'Union européenne reste attentive à l'évolution de la situation, en appelant tous les acteurs au calme et à la retenue.", a déclaré le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell.
De son côté, le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a "condamné fermement" le "coup d'Etat" militaire commis au Burkina Faso, appelant leurs auteurs "à déposer les armes" et à protéger "l'intégrité physique" du président Roch Marc Kaboré.
L'Union africaine a également condamné une "tentative de coup d'Etat" et "appelle l'armée nationale et les forces de sécurité du pays à s'en tenir strictement à leur vocation républicaine, à savoir la défense de la sécurité intérieure et extérieure du pays", dans un communiqué publié par l'organisation.
Les Etats d'Afrique de l'Ouest, quant à eux, suivent "avec une grande préoccupation" l'évolution de la situation au Burkina Faso, "caractérisée" depuis dimanche "par une tentative de coup d'Etat", ont-ils indiqué lundi dans un communiqué. La Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) "tient les militaires responsables de l'intégrité physique du président burkinabè".
La France appelle ses ressortissants à "éviter tout déplacement"
La France appelle ses ressortissants à éviter tout déplacement au Burkina Faso où le président a été arrêté (lire ci-dessus), et se dit particulièrement attentive à la protection de la communauté française.
"La France suit avec la plus grande attention les événements en cours au Burkina Faso. Nous sommes particulièrement attentifs à la protection de la communauté française. Nous avons appelé nos ressortissants à la prudence et à éviter tout déplacement", a déclaré la porte-parole du ministère des Affaires étrangères.