Les trois dirigeants se sont entretenus vendredi après-midi, en compagnie également des Premiers ministres britannique, italien et canadien, du président polonais, de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, du président du Conseil européen Charles Michel ainsi que du secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg, dans un contexte où s'enlisent les efforts diplomatiques européens pour tenter d'éviter que la crise russo-occidentale autour de ce pays ne dégénère en guerre.
"Les alliés sont déterminés à prendre ensemble des sanctions rapides et drastiques contre la Russie en cas de nouvelles violations de l'intégrité territoriale et de la souveraineté de l'Ukraine", a tweeté le porte-parole du chancelier allemand. "Tous les efforts diplomatiques visent à persuader Moscou d'aller vers une désescalade. Le but est d'empêcher une guerre en Europe."
Les services du cabinet d'Ursula von der Leyen ont précisé que d'éventuelles sanctions "concerneraient les secteurs financier et énergétique, ainsi que les exportations de produits de haute technologie".
Une invasion dans les prochains jours est très possible
Signe de l'instabilité de la situation, le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a estimé vendredi que la Russie pouvait "à tout moment" envahir l'Ukraine. Ils ont "tout ce dont ils ont besoin pour mettre à exécution" une invasion partielle ou complète, a déclaré de son côté le chef du renseignement norvégien.
Moscou a mobilisé ces derniers mois plus de 100'000 militaires et des armes lourdes à la frontière de ce pays. Selon la Maison Blanche, une invasion militaire de l'Ukraine est une "possibilité très réelle" ces prochains jours, a-t-elle averti vendredi.
"Nous continuons à voir des signes d'escalade russe, y compris l'arrivée de nouvelles forces à la frontière ukrainienne", a déclaré le conseiller pour la sécurité nationale Jake Sullivan. Cette invasion peut "intervenir à tout moment", y compris avant la fin des Jeux olympiques de Pékin prévue le 20 février, a-t-il ajouté.
Les Etats-Unis estiment qu'une telle invasion commencerait certainement par des bombardements aériens et pourrait inclure "un assaut rapide" contre Kiev, a déclaré le haut responsable de la Maison Blanche.
Des troupes supplémentaires envoyées
Des représentants américains ont par ailleurs indiqué vendredi soir, sous couvert d'anonymat, que les Etats-Unis prévoyaient d'envoyer dans les prochains jours 3000 soldats supplémentaires en Pologne afin de "rassurer" leurs alliés de l'Otan.
Ces 3000 militaires viendraient s'ajouter aux 8500 déjà placés en état d'alerte en vue d'un éventuel déploiement en Europe de l'Est. L'administration Biden avait déjà annoncé ce mois-ci le déploiement de près de 3000 soldats en Pologne et en Roumanie.
Le président américain avait déjà exhorté jeudi ses concitoyens à quitter l'Ukraine sans attendre car "les choses pourraient très vite s'emballer". Il a été suivi vendredi par le Royaume-Uni, la Norvège, la Lettonie et l'Estonie, qui évoquent un "grave menace à la sécurité posée par la Russie".
>> Lire : Joe Biden appelle les citoyens américains à quitter l'Ukraine "maintenant"
Vendredi, l'Union européenne a également recommandé aux personnels non essentiel de sa représentation à Kiev de quitter l'Ukraine, a indiqué la diplomatie européenne. "Nous ne procédons pas à une évacuation. Pour l'instant, le personnel non essentiel a la possibilité de télé-travailler depuis l'extérieur du pays", a-t-il expliqué.
Pas de signes de désescalade
Plusieurs séries de pourparlers ces derniers jours n'ont pas permis de progresser pour résoudre la crise, que les Occidentaux décrivent comme la plus dangereuse depuis la fin de la Guerre froide. Vendredi, le Kremlin a relevé que des discussions réunissant la veille à Berlin des représentants de la Russie, de l'Ukraine, de l'Allemagne et de la France n'avaient produit "aucun résultat".
Moscou, qui a déjà annexé la Crimée en 2014, dément toute velléité agressive envers l'Ukraine. Mais elle conditionne toute désescalade à une série d'exigences, notamment l'assurance que Kiev n'intégrera jamais l'Otan.
Joe Biden a de son côté répété qu'il n'enverrait pas de soldats sur le terrain en Ukraine, même pour évacuer des Américains dans l'hypothèse d'une invasion russe, car cela pourrait déclencher "une guerre mondiale".
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jop avec agences
Emmanuel Macron et Vladimir Poutine se parleront à nouveau samedi
Les présidents français et russe Emmanuel Macron et Vladimir Poutine se parleront à nouveau samedi à la mi-journée au sujet de la crise à la frontière russo-ukrainienne, que les Occidentaux veulent résoudre par "la voie diplomatique, le dialogue et la dissuasion", a annoncé l'Elysée.
Emmanuel Macron s'entretiendra ainsi avec son homologue russe pour la seconde fois en une semaine, alors que ce dernier l'avait reçu lundi au Kremlin pendant plus de cinq heures. Le chef de l'Etat s'était ensuite rendu mardi à Kiev pour s'entretenir avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky, puis à Berlin.
L'Elysée avait ensuite indiqué que cette tournée diplomatique avait atteint son "objectif" en permettant "d'avancer" pour faire baisser la tension entre la Russie et l'Ukraine.
De son côté, la Maison Blanche a fait savoir que Joe Biden envisageait également d'appeler Vladimir Poutine pour tenter de le dissuader d'envahir l'Ukraine.
Et le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a annoncé qu'il s'entretiendrait avec son homologue russe Sergeï Lavrov samedi. "Nous continuons à voir des signes très troublants d'escalade russe, notamment l'arrivée de nouvelles forces aux frontières de l'Ukraine", a déclaré M. Blinken lors d'une conférence de presse samedi aux Fidji.
Impact immédiat sur les traders
Les cours du pétrole s'enflammaient vendredi et Wall Street montrait de la nervosité face aux annonces inquiétantes et à la tension croissante à la frontière ukrainienne. En parallèle, les indices boursiers voient leur chute s'accélérer.
Le prix du baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en avril a terminé sur un bond de 3,31% à 94,44 dollars, au plus haut depuis septembre 2014. À New York, le baril de West Texas Intermediate (WTI) pour livraison en mars a pris 3,58% à 93,10 dollars, également au plus haut depuis plus de sept ans.
Le baril de pétrole américain avait même grimpé de plus de 5% en début d'après-midi juste après la déclaration d'Anthony Blinken selon laquelle la Russie pouvait "à tout moment" envahir l'Ukraine.
Bourse américaine en panique
La Bourse de New York quant à elle voyait son repli s'accélérer, en raison de la nervosité des financiers face aux signaux d'une possible invasion russe. Une heure avant la clôture, le Dow Jones reculait de 1,21%, l'indice Nasdaq cédait 2,54% et l'indice élargi S&P 500 chutait de 1,88%.
"S'ils envahissent, évidemment, ça va mettre les actions sous pression", a expliqué un analyste. "Cela veut dire que les prix vont monter", principalement de l'énergie et des matières premières, "que le revenu disponible va diminuer", a-t-il prévenu.