Mégalomane, sous cortisone, parano: la santé mentale de Vladimir Poutine analysée par un psychiatre
Certains avancent la solitude qui plombe les autocrates, d'autres estiment qu'il est frappé du syndrome des puissants chez qui plus le pouvoir est important et plus le lien à la réalité est ténu.
Mais Vladimir Poutine n'est pas seul à faire l'objet de ce type de réflexions. Les profils psychologiques de dictateurs, de tyrans et même de présidents élus ont été décortiqués, commentés, labellisés de nombreuses fois (lire encadré).
Essayer de trouver une réponse à la guerre
La situation est tellement "bouleversante" pour l'Europe et le monde qu'on a envie de comprendre ce qui peut se passer dans la tête de Vladimir Poutine, "qui a le doigt sur le bouton rouge de la bombe", estime Patrick Lemoine, psychiatre et auteur de "La santé psychique de ceux qui ont fait le monde" paru aux éditions Odile Jacob.
Interrogé vendredi dans l'émission Forum, Patrick Lemoine a relevé qu'il est difficile d'établir l'état psychique de Vladimir Poutine à distance. Mais, dit-il, "on a quand même une énorme masse de déclarations, de vidéos, d'écrits de sa part qui permettent de poser pas mal d'hypothèses". Et ce spécialiste en formule trois.
La première est "qu'il est un grand patriote, parfaitement sain, très intelligent, grand joueur d'échecs, qui veut restaurer la grandeur passée de la Russie". Et Patrick Lemoine d'évoquer les livres d'histoire dans lesquels voudrait figurer Vladimir Poutine, "aux côtés d'Alexandre Le Grand ou Napoléon par exemple. C'est une hypothèse qui comprend quand même une certaine mégalomanie."
Traitement qui "aurait mal tourné"
La deuxième "est celle d'un traitement qui aurait mal tourné", à voir comment son visage a évolué en seulement quelques années. "Soit il a très mauvais chirurgien esthétique et je n'y crois pas trop, soit il est sous cortisone, ce qui laisserait entendre qu'il pourrait avoir une maladie de système, un cancer, etc…"
Or, souligne Patrick Lemoine, "on sait que la cortisone peut rendre totalement mégalomane, maniaque. Tout est permis, rien n'est interdit. On n'a plus peur de quoi que ce soit, on est le maître du monde quand on est sous cortisone, on peut être Dieu".
La troisième "est que Vladimir Poutine est paranoïaque. Il explique tout le temps que c'est les autres qui font ce qu'il va faire. Il envahit: il dit qu'on va l'envahir. On voit qu'il a perdu le sens des réalités, qu'il se sent enfermé dans son immense Russie et qu'il a très peur de tous ses voisins, y compris la Chine."
Et le psychiatre de poser son diagnostic: "Je pense que c'était assez équilibré tant qu'il n'avait pas eu la cortisone. Mais la cortisone a fait flamber cet aspect paranoaïque, et là, ça devient délirant. Et je crois que maintenant, il délire."
Maintenir le lien
Mais selon Patrick Lemoine, le fait que Vladimir Poutine passe autant de temps au téléphone avec les dirigeants occidentaux est rassurant: "On a l'impression qu'Emmanuel Macron fait partie de ses psychothérapeutes. On voit donc que Poutine cherche à garder un lien, même si c'est un peu ubuesque de continuer à discuter avec quelqu'un sur qui l'on tape et que l'on envahit..."
Propos recueillis par Tania Sazpinar/vajo
D'autres dirigeants sous le stéthoscope des psychiatres
Pour Pascal de Sutter, auteur de l'ouvrage "Ces fous qui nous gouvernent", les dictateurs ont des profils dominants, très ambitieux, avec une tendance à la psychopathie. Mais, à quelques exceptions près, ils ne sont pas fous au sens psychiatrique du terme. Ils ont assez d'équilibre mental pour ne pas être dysfonctionnels.
En 1937 déjà, l'auteur et psychologue Manès Sperber publie son "Analyse de la tyrannie", un portrait du tyran, derrière lequel on reconnaît Hitler, Mussolini ou encore Staline et qui lui vaudra les foudres de la Gestapo.
Manès Sperber estimait d'ailleurs que les tyrans manquent de confiance en eux et qu'ils sont incapables de compenser leur peur agressive autrement que par leur désir de pouvoir. Mais ces analyses, ces hypothèses, qu'elles soient l'ouvrage de professionnels ou la spéculation d'amateurs, ont peut-être une chose en commun: notre besoin, à tout prix, de comprendre ce qui nous paraît totalement incompréhensible.