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Face au réchauffement, le monde a trois ans pour plafonner ses émissions

La 3e partie du 6e rapport du Conseil mondial du climat (GIEC) sur les actions à mettre en œuvre a été publiée
La 3e partie du 6e rapport du Conseil mondial du climat (GIEC) sur les actions à mettre en œuvre a été publiée / 19h30 / 1 min. / le 4 avril 2022
Les promesses "creuses" entraînent la planète vers un réchauffement désastreux de 3 degrés, estime le dernier rapport les experts climat de l'ONU (GIEC) publié lundi. Mais le monde a encore une chance d'éviter le pire en plafonnant ses émissions d'ici moins de trois ans.

Le troisième volet de la trilogie scientifique des experts climat de l'ONU (GIEC) publié lundi ne laisse pas de place au doute: sans une réduction "rapide, radicale et le plus souvent immédiate" des émissions de gaz à effet de serre dans tous les secteurs, il ne sera pas possible de limiter le réchauffement à +1,5 degré par rapport à l'ère pré-industrielle, ni même à +2 degrés.

>> Relire : Pour le GIEC, la capacité d'adaptation humaine est de plus en plus dépassée

Mais les Etats qui s'y sont pourtant engagés en signant l'accord de Paris ne sont pour l'instant pas à la hauteur de l'enjeu, alors qu'un réchauffement de +1,1 degré rend d'ores et déjà "très vulnérable" la moitié de l'humanité, frappée par des canicules, sécheresses, tempêtes et inondations qui se multiplient.

"Certains gouvernements et responsables d'entreprises disent une chose et en font une autre. Pour le dire simplement, ils mentent", a d'ailleurs dénoncé le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres en qualifiant "d'accablant" ce nouveau rapport du GIEC sur les solutions pour limiter le réchauffement.

>> Relire : Record historique des émissions de CO2 en 2021 en raison de la reprise économique

Pic avant 2025

Selon le rapport, sans un renforcement des politiques actuelles, le monde se dirige vers un réchauffement de +3,2 degrés d'ici la fin du siècle, et même si les engagements pris par les gouvernements pour la conférence climat de l'ONU COP26 l'an dernier étaient tenus, le mercure monterait de +2,8 degrés, alors que chaque dixième de degré supplémentaire provoque son lot de nouvelles catastrophes climatiques.

Pour ne pas aller droit vers cet avenir de souffrance, il faudrait que les émissions atteignent leur pic avant 2025, dans seulement trois ans, et diminuent de près de la moitié d'ici 2030 par rapport à 2019, selon le GIEC.

>> Lire aussi : "On ne peut pas demander aux experts du climat d’afficher un optimisme niais"

Les "outils" du "tournant"

"Nous sommes à un tournant. Nos décisions aujourd'hui peuvent assurer un avenir vivable", insiste le patron du GIEC Hoesung Lee, assurant que ce nouveau rapport donne les "outils" pour le faire.

Ainsi, pour respecter +1,5 degré, l'usage sans capture de carbone (technologie non mature à grande échelle) du charbon devrait être totalement stoppé et ceux du pétrole et du gaz réduits de 60% et 70%, respectivement, d'ici 2050 par rapport aux niveaux de 2019.  La "quasi-totalité de la production mondiale d'électricité devant provenir de sources zéro ou bas-carbone", insiste le GIEC.

Un scénario qui prend une lumière particulière avec la guerre en Ukraine qui a exposé la dépendance des économies aux énergies fossiles, dénoncée de longue date par les défenseurs du climat.

>> Ecouter aussi les explications d'On en Parle :

Des membres de la Grève du climat font notamment partie du comité (image d'illustration). [Keystone - Cyril Zingaro]Keystone - Cyril Zingaro
Le GIEC propose des pistes pour réduire son empreinte carbone au quotidien / On en parle / 17 min. / le 7 avril 2022

Tous les secteurs concernés

Au delà de l'énergie, qui représente environ un tiers des émissions, tous les secteurs (transports, industrie agriculture, bâtiments...) doivent également entamer leur mue rapide, de la réduction de la déforestation à la rénovation énergétique des logements, en passant par l'électrification des véhicules (à condition qu'ils soient alimentés par une électricité bas carbone).

Sans oublier le déploiement de méthodes de captage et de stockage du carbone qui seront "inévitables" pour parvenir à la neutralité carbone au début des années 2050 et limiter le réchauffement à +1,5 degré.

"Changement avantageux à beaucoup de niveaux"

Invitée dans Forum, Julia Steinberger, autrice principale de ce 6ème rapport d'évaluation du GIEC, estime qu'il faut un changement de fond de notre manière de vivre: "Nous n'avons plus le luxe du choix, il faut transformer tous les secteurs: énergie, agriculture, transport, habitat. Il faut aussi revoir le lien entre la production et la consommation, la façon dont nous vivons nos vies."

Mais pour la professeure à l'Université de Lausanne, cela "ne veut pas dire un changement négatif pour autant. Cette transformation est possible, elle est avantageuse économiquement à beaucoup de niveaux, elle est avantageuse au niveau de la société et de la santé. Enfin elle est avantageuse au niveau géopolitique."

>> L'interview complète de Julia Steinberger dans Forum :

Sixième rapport du GIEC: interview de Julia Steinberger
Sixième rapport du GIEC: interview de Julia Steinberger / Forum / 3 min. / le 4 avril 2022

Aide internationale à la transition

Selon des sources internes des discussions, la question clé des flux financiers nécessaires aux pays en développement pour faire leur transition a été très disputée dans la dernière ligne droite de ce marathon en ligne et à huis clos.

Comme le souligne le rapport, "pour faire face à l'ampleur de ce défi, il faudrait que les flux de financement climatique soient multipliés par quatre à huit d'ici à 2030", a souligné lundi Madeleine Diouf Sarr, au nom du groupe des pays les moins avancés. "Sans compter le financement de l'adaptation et le financement des pertes et préjudices".

Des inégalités entre pays mais aussi entre riches et pauvres en général, avec les 10% des ménages avec les plus hauts revenus dans le monde qui représentent entre 36 et 45% des émissions, relève le GIEC.

>> Lire aussi : Les arbres en ville sont-ils un privilège de riches?

asch avec afp

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Agir sur la demande

Pour la première fois, les experts de l'ONU consacrent également un chapitre entier à la demande, estimant qu'agir sur ce levier pourrait réduire les émissions de 40 à 70% d'ici à 2050.

"Disposer des politiques publiques, des infrastructures et de la technologie pour rendre possibles les changements dans nos modes de vie et nos comportements (...) offre un important potentiel (de réduction) inexploité", souligne Priyadarshi Shukla, un des coprésidents du groupe de travail ayant produit ce rapport de quelque 2800 pages.