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Jean-Marc Ayrault: "Pour la première fois, il y a un risque d'une élection de l'extrême droite en France"

L'invité de La Matinale (vidéo) - Jean-Marc Ayrault, ancien Premier ministre français
L'invité de La Matinale (vidéo) - Jean-Marc Ayrault, ancien Premier ministre français / La Matinale / 12 min. / le 12 avril 2022
Invité de La Matinale, l'ancien Premier ministre sous François Hollande Jean-Marc Ayrault estime que "la menace" d'une élection de Marine Le Pen à la présidence française est "réelle". Selon lui, la candidate du Rassemblement national (RN) profite d'une banalisation de l'extrême droite en France.

Lors du premier tour de l'élection présidentielle française dimanche, Marine Le Pen est arrivée deuxième avec 23,15% des voix, derrière Emmanuel Macron, qui a récolté 27,84% des suffrages. Mais pour Jean-Marc Ayrault, la tendance pourrait s'inverser lors du second tour: "Marine Le Pen peut être élue. Mais je pense qu'elle n'a pas les compétences, ni les conceptions qui conviennent à la France, ni à l'Europe, ni au monde."

>> Le suivi de la journée d'élection dimanche : Les résultats définitifs du 1er tour de la présidentielle française sont tombés

L'ancien Premier ministre de poursuivre: "C'est une élection très importante, qui concerne les Français, mais je comprends que les autres pays s'intéressent beaucoup au deuxième tour de l'élection présidentielle. Je le dis sincèrement et franchement, il y a pour la première fois un risque d'une élection d'une candidature d'extrême droite en France. La menace est réelle, et il faut prendre les choses avec sérieux."

"Banalisation de l'extrême droite"

Jean-Marc Ayrault regrette que l'opinion publique française se soit peu à peu habituée aux idées de la candidate du Rassemblement national. "Il y a une forme de banalisation de l'extrême droite. En 2002, Jacques Chirac était au deuxième tour face à Jean-Marie Le Pen - le père de Marine Le Pen - et à l'époque il y avait des manifestations dans toute la France contre l'extrême droite, et Jaques Chirac a été élu à plus de 80%. Aujourd'hui il n'y a plus de manifestations contre l'extrême droite, ou il y en a très peu."

Marine Le Pen avance masquée dans cette campagne. Elle ne parle que du pouvoir d'achat, alors que son programme reste fondamentalement le même

Jean-Marc Ayraul, ancien Premier ministre français

L'ancien chef de gouvernement rappelle que Marine Le Pen a beaucoup travaillé à cette banalisation en essayant de modérer ses positions. Mais pour lui, "sur le fond, son programme n'a pas changé". Jean-Marc Ayrault estime aussi qu'elle a profité de la candidature d'Eric Zemmour "qui a été tellement caricatural que ça a finalement dédouané Marine Le Pen".

L'ancienne figure du PS juge que la candidate du RN cache volontairement le fond de son programme: "Marine Le Pen avance masquée dans cette campagne. Elle ne parle que du pouvoir d'achat, alors que son programme reste fondamentalement le même. C'est un parti d'extrême droite. Marine Le Pen en France c'est la candidate de Trump, de Poutine, d'Orban, du Brexit. C'est ça la vérité concernant madame Le Pen."

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"Une fois que l'extrême droite s'installe, elle n'est pas prête de partir"

Celui qui a aussi été ministre des Affaires étrangères s'inquiète qu'une éventuelle élection de Marine Le Pen marque un point de bascule sur lequel il est difficile de revenir. "Une fois que l'extrême droite s'installe, elle n'est pas prête de partir. Il ne faut pas se faire d'illusions, c'est très dangereux pour la démocratie. On voit la réélection d'Orban en Hongrie, on voit combien il a mis en place un système qui limite l'expression démocratique, qui met la liberté de la presse sous le boisseau, qui porte atteinte à l'indépendance de la justice. On voit tout ça qui est à l'oeuvre en Europe."

Jean-Marc Ayrault appelle à voter pour Emmanuel Macron. "Je ne lui donnerai pas un chèque en blanc, mais je voterai pour lui au deuxième tour, et j'appelle à voter pour lui sans ambiguïté. Il ne suffit pas de dire 'pas une voix pour Marine Le Pen', ça, ça veut dire abstention, ça veut dire vote blanc. Non, il faut être clair, il n'y a pas trois bulletins. Il y en a deux, et il faut en utiliser un pour dire non à l'extrême droite."

Interview radio: David Berger

Adaptation web: Antoine Schaub

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