La population de Shanghai toujours en colère face à la politique anti-Covid des autorités
Au total, ce sont plus de 40% des zones résidentielles de la mégalopole qui autorisent désormais les sorties dans un périmètre limité. Cet allégement intervient alors que les contaminations ont diminué pour la première fois depuis le début de cette nouvelle vague. Selon les chiffres officiels, 23'000 cas ont été annoncés lundi contre 26'000 dimanche, qui constituait un record.
Tout ne semble pourtant pas sous contrôle, mais pour les autorités il apparaissait difficile d'attendre davantage tant le mécontentement, la frustration et la colère de la population est palpable.
"Vous êtes inhumains"
Pour une partie des Shanghaiens, cet enfermement strict dure déjà depuis plus de cinq semaines. Ces derniers jours, des cris et des appels à la fin du confinement ont pu être entendus depuis les balcons et les fenêtres.
Des vidéos postées sur les réseaux sociaux témoignent également du mécontentement ambiant, à l'image de cet homme, au téléphone avec les autorités, qui juge ce traitement "inhumain" et estime que les décideurs poussent "les gens ordinaires à la révolte".
A la tête d'une petite entreprise, il ne peut plus travailler, n'a plus d'argent et n'est plus en mesure de payer ses employés et s'inquiète du remboursement de ses crédits ainsi que de ses réserves de nourriture, insuffisantes.
"Je n'en ai plus rien à faire! Qu'il vienne m'embarquer, ce fichu Parti communiste! D'ailleurs, où est-il? Et puis, c'est quoi le communisme? Sal******! Vous vous fichez des gens ordinaires!", peut-on en l'entendre dire dans une vidéo partagée sur les réseaux et traduite en anglais (Voir ci-dessus).
>> Lire également à ce sujet : La politique zéro-Covid chinoise, du drame aux récits kafkaïens et En Chine, la stratégie du "zéro-Covid" a atteint ses limites
Une exaspération à contenir pour le Parti communiste
Le Parti communiste essaie de son côté de contenir cette colère, pour l'instant essentiellement localisée à Shanghai. Les réseaux sociaux sont nettoyés des commentaires critiques sur la situation et les personnes mécontentes mises en garde.
Des mises en garde aussi présentes dans l'espace public, où des consignes très claires sont affichées sur des écrans:"surveillez votre langage ou faites face à une punition sévère", "n'exprimez pas en ligne des opinions en lien avec la pandémie", peut-on entre autres lire.
A l'échelle nationale, les médias louent, tout comme à Wuhan en 2020, l'action des autorités, sur le point de porter ses fruits. De nouvelles campagnes de dépistage devraient par ailleurs permettre une décrue rapide des infections ces prochains jours.
En attendant la confirmation de cette amélioration sur le plan sanitaire, l'autre grande source d'inquiétude pour le parti reste l'économie. Quels coûts Pékin est-il encore prêt à accepter, alors que de nombreuses autres villes du pays adoptent à leur tour de nouvelles mesures drastiques de prévention?
Quels risques pour Xi Jinping?
La situation à Shanghai semble montrer de façon claire les limites de la stratégie zéro-Covid face à des variants aussi contagieux. La colère et le sentiment d'ébullition montrent aussi un ras-le-bol de plus en plus généralisé de la part de la population.
La RTS a pu contacter quelques citoyens chinois résidant en Suisse. Tous décrivent la lassitude et la fatigue des membres de leur famille restés en Chine, alors que la plupart d'entre eux se disaient très fiers de la politique sanitaire du pays jusqu'alors.
Certains experts jugent d'ailleurs que la situation actuelle serait l'un des plus grands défis politique pour l'actuel secrétaire général du Parti communiste Xi Jinping. Ces conclusions apparaissent toutefois sans doute un peu hâtives. Pendant le confinement de Wuhan, un mécontentement intense et grandissant avait aussi été relevé. Fort de son pouvoir de propagande, le Parti communiste chinois avait finalement réussi à retourner la situation en sa faveur et à faire passer sa méthode comme une victoire totale. Rien ne dit qu'il n'y arrivera pas une fois encore dans le cas de Shanghai.
Reportage radio à Shanghai: Michael Peuker
Adaptation web: ther