David Djaïz: "En France, on a un très grand besoin de réapprendre la culture du compromis"
Les Françaises et les Français sont-ils lassés par la politique? Avec une abstention de 26,31%, la question se pose dans l'Hexagone. Pour preuve, la fin du débat de l'entre-deux tours entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen a été consacrée aux institutions.
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"Au lieu de dire, c'est la fin de la Ve République, il faudrait essayer de revenir à l'épure de la Ve République (instaurée en 1958 par le général de Gaulle, n.d.l.r.) C'est-à-dire un régime très intelligent qui conjugue la stabilité et une vraie vitalité démocratique avec un équilibre des pouvoirs entre le Parlement et le président", explique David Djaïz, essayiste politique et enseignant à Sciences Po Paris.
Pleins pouvoirs au président
Selon lui, cet équilibre s'est "un peu rompu", au début des années 2000, avec l'introduction du quinquennat et l'inversion du calendrier politique. En effet, les législatives avaient traditionnellement lieu en mars, soit avant la présidentielle.
"Les élections législatives ne sont devenues que les supplétives de l'élection présidentielle. Comme vous avez un émiettement de la vie politique, le socle de légitimité est forcément plus faible. Le président élu ne récolte que 20% ou 25% des suffrages au premier tour. Et il se trouve en quelque sorte par la 'magie' de cette inversion du calendrier dépositaire de tous les pouvoirs", analyse David Djaïz.
Les élections législatives ne sont devenues que les supplétives de l'élection présidentielle
L'essayiste politique estime que l'un des plus "graves défauts de l'involution" de la Ve République, "c'est que tout se cristallise autour d'une "figure charismatique" comme Jean-Luc Mélenchon, Emmanuel Macron ou Marine Le Pen. "Cela crée des opposition inconditionnelles, des barrières infranchissables entre les différents segments politiques", note-t-il.
Un modèle à la Suisse
Pour réconcilier des millions de Françaises et Français avec leur régime politique, David Djaïz estime qu'il faudrait un retour au septennat afin "d'avoir une figure qui incarne le rassemblement" et lui permettre de travailler sur des dossiers qui nécessitent du temps comme l'environnement.
Selon lui, il faut "se réconcilier avec le temps long". Il faudrait également "oxygéner" le Parlement en introduisant "une forte dose" de proportionnelle pour avoir une Assemblée nationale, "qui représente mieux la diversité des sensibilités politiques".
Pour appuyer ses propos, il cite l'exemple de la Suisse ou de l'Allemagne qui ont des gouvernements de "contrat ou de coalition". "On a un très grand besoin de réapprendre la culture du compromis", souligne-t-il.
Propos recueillis par Frédéric Mamaïs/vajo
Jean-Luc Mélenchon demande aux Français de l'élire Premier ministre
"Je demande aux Français de m'élire Premier ministre" en votant pour une "majorité d'Insoumis" et de "membres de l'Union populaire" aux élections législatives de juin. C'est ce qu'a déclaré mardi Jean-Luc Mélenchon, troisième homme au premier tour de la présidentielle française.
Jean-Luc Mélenchon, qui a rassemblé 21,95% des voix le 10 avril, a précisé qu'il briguerait ce poste, que le président de la République élu dimanche soit Emmanuel Macron ou Marine Le Pen. "Je serai le Premier ministre, pas par la faveur de M. Macron ou de Mme Le Pen, mais par les Français qui m'ont élu", a-t-il dit sur la chaîne télévisée BFMTV, lors de sa première prise de parole depuis le soir du premier tour.
Jean-Luc Mélenchon vise donc à imposer une cohabitation au futur vainqueur de la présidentielle. Estimant que les élections législatives des 12 et 19 juin constitueront un "troisième tour", Jean-Luc Mélenchon tend la main à gauche, alors que les négociations avec EELV et le PCF ont commencé: "J'appelle tous ceux qui veulent rejoindre l'Union populaire à se joindre à nous pour cette belle bataille. Il y a donc un troisième tour, il n'y a pas seulement un deuxième tour."
Le programme de Marine Le Pen pourrait coûter cher, avertissent 380 économistes
Soutenabilité des finances publiques, renforcement des inégalités, aggravation des émissions de gaz à effet de serre. Un collectif d'économistes de sensibilités différentes alerte sur les conséquences de l'application du projet de Marine Le Pen dans une tribune publiée, notamment dans L'Expess.
Des dirigeants européens appellent à voter le "candidat démocrate"
Les chefs de gouvernement allemand, espagnol et portugais appellent implicitement à voter pour Emmanuel Macron au second tour de l'élection présidentielle française. Une tribune co-signée été publiée jeudi dans le quotidien Le Monde.
"Le choix auquel le peuple français est confronté est crucial pour la France et pour chacun d'entre nous en Europe. C'est le choix entre un candidat démocrate qui croit que la France est plus forte dans une Union européenne (UE) puissante et autonome, et une candidate d'extrême droite, qui se range ouvertement du côté de ceux qui attaquent notre liberté et notre démocratie", écrivent Olaf Scholz, Pedro Sanchez et Antonio Costa sans les nommer clairement.
Les trois dirigeants estiment que la guerre lancée par le président russe Vladimir Poutine contre l'Ukraine "vise les valeurs que la France et nos pays défendent : la démocratie, la souveraineté, la liberté et l'Etat de droit" et porte le risque de voir "redessiner les frontières par la force, comme (...) tant de fois au cours de notre passé sanglant".