Osman Kavala, accusé d'avoir tenté de renverser le gouvernement du président Recep Tayyip Erdogan, ne pourra bénéficier d'aucune remise de peine, ont précisé les juges dont le verdict, énoncé après moins d'une heure de délibéré, a été accueilli par des huées dans la salle du tribunal et les pleurs de ses proches.
Il a été seulement acquitté de l'accusation d'espionnage. Ses avocats ont fait part de leur intention de faire appel. "Nous nous attendons à ce qu'Osman Kavala soit libéré immédiatement", a déclaré la ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock dans un communiqué, dénonçant un arrêt "en contradiction flagrante avec les normes de l'Etat de droit".
"Sévérité maximale", dénonce Josep Borrell
Cette condamnation "témoign(e) d'une sévérité maximale et ignor(e) la décision de la Cour européenne des droits de l'homme", a dénoncé le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell sur Twitter. "Le respect des droits fondamentaux et libertés est aujourd'hui plus important que jamais", a-t-il ajouté.
"Le verdict reconfirme le caractère autoritaire du système actuel (...). Il y a peu ou pas de perspective européenne pour la Turquie actuelle", ont réagi deux députés européennes Nacho Sánchez Amor et Sergey Lagodinsky, dans un communiqué commun.
La représentante de Human Rights Watch Emma Sinclair-Webb, présente au tribunal, a dénoncé sur Twitter le "pire dénouement possible" - "Horrible, cruel et diabolique".
Le directeur Europe d'Amnesty International Nils Muiznieks a fustigé dans un communiqué une "parodie de justice" qui "défie le bon sens".L'Association turque des juristes contemporains (CHD) a appelé les avocats à participer à une veille mardi devant le palais de justice pour protester contre le verdict. "Ce gouvernement, qui s'est abattu sur le pays comme un cauchemar, continue de piétiner le droit", a réagi de son côté le chef du principal parti turc de l'opposition.
Accusé d'avoir tenté de renverser le gouvernement
A la clôture des débats, Osman Kavala - qui a toujours nié les charges pensant contre lui - avait dénoncé un "assassinat judiciaire" contre sa personne. "Les théories du complot, avancées pour des raisons politiques et idéologiques, ont empêché une analyse impartiale des événements et (les ont) déconnectés de la réalité", avait-il lancé avant que les juges ne se retirent.
Figure de la société civile turque, Osman Kavala, 64 ans, était accusé d'avoir cherché à renverser le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan, via le financement des manifestations anti-gouvernementales dites "mouvement de Gezi" en 2013 et lors du coup d'Etat raté de juillet 2016.
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Ses sept co-accusés - qui comparaissaient libres - ont écopé d'une peine de dix-huit ans de prison, accusés de lui avoir apporté leur soutien. Les militants des droits humains avaient espéré une libération qui enverrait un signal positif, alors que la Turquie essaie de faciliter les pourparlers entre l'Ukraine et la Russie.
Comme à chaque audience, une dizaine de diplomates occidentaux étaient présents. Surnommé le "milliardaire rouge" par ses détracteurs, Osman Kavala, né à Paris, avait été arrêté en octobre 2017.
ats/vajo
"Graves erreurs de la justice turque"
Acquitté en février 2020 pour les charges liées aux manifestations de 2013, l'éditeur avait été arrêté quelques heures plus tard - avant même de pouvoir rentrer chez lui - puis renvoyé en prison, cette fois accusé d'avoir cherché à "renverser le gouvernement" lors du putsch raté de juillet 2016, ainsi que d'espionnage.
Son acquittement avait ensuite été invalidé par la justice turque, mais la reconduction régulière de sa détention en a fait le héros de l'opposition au président Erdogan. "Avoir passé quatre ans et demi de ma vie en prison ne pourra jamais être compensé. La seule chose qui pourra me consoler sera d'avoir contribué à révéler les graves erreurs de la justice turque", avait-il prévenu vendredi.
Crise diplomatique
L'affaire Kavala a déclenché à l'automne une crise diplomatique, Ankara menaçant d'expulser une dizaine d'ambassadeurs occidentaux, dont celui des Etats-Unis, qui avaient réclamé sa libération. En février, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a lancé une "procédure en manquement" contre la Turquie.
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Le mois dernier, les procureurs avaient réclamé sa condamnation pour "tentative de renversement" du gouvernement, soit une peine de prison à vie sans possibilité de libération anticipée.