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Bruxelles veut contraindre les plateformes à mieux lutter contre la pédopornographie

La taxation des géants du numérique, communément appelés GAFA, est un dossier prioritaire pour l'UE. [Damien Meyer]
Bruxelles veut contraindre les plateformes à mieux lutter contre la pédopornographie / Le Journal horaire / 21 sec. / le 11 mai 2022
Bruxelles a présenté mercredi un projet de règlement imposant des obligations aux plateformes et messageries en ligne pour détecter, signaler et retirer les images pédopornographiques, s'inquiétant de l'explosion de ces contenus illégaux.

En plus de ce règlement imposé aux plateformes, la Commission européenne préconise aussi la mise en place d'un centre européen de lutte contre les abus sexuels commis sur des enfants, une agence indépendante qui serait basée à La Haye (Pays-Bas) comme Europol, avec qui elle collaborera.

Elle serait notamment chargée de recueillir les signalements de ces contenus par les plateformes et apporterait une aide aux victimes pour obtenir leur retrait. La proposition est suivie de près par l'industrie de la tech, qui redoute une dérive vers une surveillance de masse.

85 millions de vidéos et photos signalées

"Notre société échoue aujourd'hui à protéger les enfants", s'est alarmée la commissaire européenne aux Affaires intérieures, Ylva Johansson. Elle a indiqué qu'en 2021 dans le monde, 85 millions de vidéos et photos impliquant des abus sexuels sur mineurs avaient été signalées, selon des données du Centre américain pour les enfants disparus et exploités, NCMEC.

"Et c'est juste la partie émergée de l'iceberg", a souligné la responsable suédoise. Plus de 60% de ces contenus sont hébergés sur des serveurs situés dans l'Union européenne. Jusqu'à 95% des signalements des contenus dans le monde en 2020 provenaient du seul Facebook, alors que "le problème ne se réduit pas à une seule plateforme", note la Commission, qui relève aussi que la pandémie de Covid-19 avec ses confinements a aggravé le problème.

>> Ecouter à ce sujet :

Le grand débat - Pédopornographie, comment lutter ?
Le grand débat - Pédopornographie, comment lutter ? / Forum / 17 min. / le 24 juillet 2020

Jusqu'à présent, les fournisseurs de services et messageries sur internet procèdent de façon volontaire à la détection de ces contenus illégaux. Mais Bruxelles veut désormais les contraindre à être proactifs, sous peine de sanctions.

Une proposition qui ne plaît pas à la tech

Cette législation, qui fait partie d'une stratégie annoncée en 2020, s'inscrit dans le cadre plus général du règlement de l'UE sur les services numériques ("Digital Services Act", DSA) visant à encadrer les plateformes numériques, qui prévoit des amendes pouvant atteindre jusqu'à 6% de leur chiffre d'affaires annuel en cas d'infraction.

La proposition doit encore être discutée avec le Parlement européen et les Etats membres. La commissaire, qui a rencontré des représentants de près d'une vingtaine d'acteurs du numérique, s'attend à un "gros lobbying des entreprises contre" sa proposition. "Mais je pense que j'ai une écrasante majorité de citoyens de mon côté", a-t-elle commenté devant des journalistes.

"Nous espérons que les nouvelles obligations (...) respecteront l'interdiction européenne de surveillance généralisée et qu'elles ne porteront pas atteinte au cryptage", a réagi Victoria de Posson, de l'association CCIA, qui représente les industries des technologies de l'information et des communications, dont sont membres les "Gafa" (Google, Amazon, Facebook et Apple). "Nous sommes disposés à travailler avec les législateurs européens pour élaborer des règles efficaces et réalisables", a-t-elle ajouté dans un communiqué.

afp/aps

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Les détails de la proposition

Le projet de règlement prévoit l'obligation pour les plateformes d'évaluer les risques que leurs services soient utilisés pour diffuser des images pédopornographiques, ou pour la sollicitation d'enfants par des pédophiles, et la mise en place de mesures préventives.

Les Etats membres doivent désigner une autorité indépendante chargée de surveiller que la plateforme remplit ces obligations, et habilitée à demander le cas échéant à un tribunal ou à une autorité administrative d'émettre un ordre de détection, strictement ciblé et limité dans le temps.

La Commission prévoit que les fournisseurs devront "utiliser des technologies de détection qui sont les moins intrusives possibles pour la vie privée" et qui permettent de "limiter au maximum le taux d'erreur". La législation s'applique aussi aux communications cryptées, mais elle ne précise pas quelle technologie doit être utilisée pour détecter des images pédophiles dans ce cadre.

Ces contenus illégaux, une fois repérés, devront être signalés au nouveau Centre européen de prévention et de lutte contre les abus sexuels sur les enfants, qui procédera à une vérification et les enverra aux autorités de police compétentes et à Europol.