Des dizaines de milliers de fidèles du monde entier étaient présents sur la place Saint-Pierre pour assister à la cérémonie de canonisation qui a débuté à 10h00, dont des délégations d'Afrique, des membres des familles et des ordres religieux. Le Premier ministre sur le départ Jean Castex a conduit la délégation française, selon une source diplomatique.
Deux miracles
Le procès en béatification de Charles de Foucauld, mort assassiné en 1916 à Tamanrasset, dans le Sud désertique algérien, avait commencé dans les années 1930. Il avait été déclaré "bienheureux" en 2005 par le pape Benoît XVI.
La canonisation - étape permettant de devenir "saint" dans l'Eglise catholique, succédant à la béatification - requiert trois conditions: être mort depuis cinq ans au moins, avoir mené une vie chrétienne exemplaire et avoir accompli au moins deux miracles.
Après la guérison d'un cancer en 1984, un deuxième miracle a été attribué à Charles de Foucauld par le Vatican: l'histoire insolite d'un jeune charpentier de Saumur (centre de la France), qui survit en 2016 à une chute de 15 mètres sur un banc, malgré un abdomen transpercé.
L'aristocrate au milieu des plus pauvres
Né en 1858 à Strasbourg dans une famille d'aristocrates, Charles-Eugène de Foucauld mena une vie d'officier dissolue avant de se consacrer à une existence de foi et d'évangélisation, d'abord chez les moines trappistes en Syrie, en Palestine, puis en ermite parmi les Touaregs dans le Sahara algérien au début du XXe siècle.
"Il veut être au milieu de ceux qui lui semblent les plus pauvres, délaissés et méprisés, et agir comme un défricheur: il ne prêche pas par la parole, mais par sa simple présence", explique Bernard Ardura, postulateur de la cause de canonisation.
Le "frère universel" deviendra une référence dans la connaissance de ces nomades, rédigeant notamment un "Dictionnaire touareg-français, dialecte de l'Ahaggar" qui fait encore autorité, parmi de nombreux écrits.
"Pour l'Eglise d'Algérie, il est extrêmement important car c'est ici qu'il a porté sa vie à incandescence", rappelle l'archevêque d'Alger, Mgr Jean-Paul Vesco, qui se rendra à la cérémonie. "C'est la reconnaissance d'une trajectoire de vie et de foi", ajoute-t-il, soulignant l'importance de la fraternité dans sa "personnalité étonnante et complexe".
Agent secret?
La figure de Charles de Foucauld n'a pas toujours fait l'unanimité. Sa reconnaissance par l'Eglise a d'ailleurs pris beaucoup de temps. On lui reproche notamment d'avoir peut-être été un espion au service de l'armée française, pour laquelle il a été officier de cavalerie jusqu'en 1882.
Selon l'historien Claude Prudhomme, le principal débat porte sur la cohérence entre sa spiritualité et certains de ses écrits, qui montrent un personnage en liens étroits avec les militaires, mais surtout qui voit dans la colonisation une nécessité pour les habitants du Maghreb.
jfe avec afp
Neuf autres canonisations
Est devenue "sainte" également soeur Marie Rivier (1768-1838), institutrice qui s'était particulièrement investie dans l'éducation religieuse des plus jeunes, dans un contexte de dissolution des couvents lors de la Révolution française, en fondant plus de 140 écoles.
Fondatrice en 1796 de la congrégation religieuse de la Présentation de Marie, elle avait été béatifiée par Jean Paul II en 1982.
A ses côtés figure le prêtre et journaliste néerlandais Titus Brandsma, connu pour son engagement contre la propagande nazie durant la Seconde Guerre mondiale. Arrêté en janvier 1942, il est tué la même année au camp de concentration de Dachau, d'une injection létale. Il a été béatifié en 1985.
Le martyr Devasahayam (Lazare) Pillai (1712-1752), un hindou converti au christianisme, est quant à lui le premier laïc indien à devenir "saint", selon le Vatican. Arrêté, il est torturé pendant trois ans puis exécuté, ayant refusé d'abjurer sa foi.
Les cinq autres canonisés sont les prêtres italiens Luigi Maria Palazzolo et Giustino Maria Russolillo, et les religieuses italiennes Maria Francesca Rubatto, Maria Domenica Mantovani et Maria di Gesù Santocanale.