Signe que le pays est une nouvelle fois groggy, le président Joe Biden se rend mardi à Buffalo pour "partager la douleur d'une communauté qui a perdu dix des siens dans une tuerie de masse horrible et insensée", a annoncé la Maison Blanche, qui a dénoncé "la haine qui reste une tache sur l'âme de l'Amérique".
Dans cette ville de Buffalo à l'extrême nord de l'Etat de New York, au bord du lac Erié et de la frontière canadienne, les habitants rendent hommage depuis dimanche aux personnes assassinées dans un supermarché Tops d'un quartier principalement peuplé d'Afro-Américains: les dix personnes tuées sont toutes noires, a précisé le procureur du district, John Flynn, et leur meurtrier est un jeune suprémaciste blanc accusé d'avoir perpétré "un crime raciste motivé par la haine" et un acte de "terrorisme intérieur", selon les autorités.
Un attentat prémédité
Ce jeune homme de 18 ans a conduit plus de 300 km depuis chez lui dans le sud de l'Etat pour perpétrer ce massacre, effectuant même "une opération de reconnaissance" la veille, selon la police.
"Cet individu est venu avec l'objectif de tuer le plus de personnes noires possible", a dénoncé le maire afro-américain de Buffalo, Byron Brown.
"Crime motivé par la haine"
Le "crime motivé par la haine" désigne aux Etats-Unis un acte dirigé contre une personne en raison d'éléments de son identité comme la race, la religion, la nationalité, l'orientation sexuelle ou un handicap. Considéré comme une infraction fédérale aux circonstances aggravantes, il entraîne des condamnations plus dures.
Poursuivi pour "meurtre avec préméditation", le suspect a plaidé non coupable lors d'une première comparution ce week-end et doit repasser devant la justice le 19 mai.
Le jeune homme portait une caméra et a diffusé son crime en direct sur Twitch même si la plateforme a assuré avoir supprimé le contenu "deux minutes" après le début de sa diffusion.
Il a aussi publié avant son crime un "manifeste" de 180 pages à caractère raciste, qui l'associe selon les médias américains aux suprémacistes blancs et aux complotistes d'extrême droite, tenants de la théorie du "grand remplacement". "Je suis simplement un homme blanc qui cherche à protéger et servir ma communauté, mon peuple, ma culture et ma race", écrit-il.
Le terrorisme intérieur
Des idées extrémistes qui s'infusent de plus en plus aux Etats-Unis. En septembre 2021, le patron de la police fédérale (FBI) avait indiqué qu'environ 2700 enquêtes étaient en cours pour terrorisme intérieur, soit un doublement en un an et demi. Le FBI et le ministère américain de la justice ont chacun mis en place des cellules dédiées pour y faire face.
Des extrémistes ont notamment visé une église noire à Charleston (9 morts en 2015), une discothèque gay à Orlando (49 morts en 2016), une synagogue à Pittsburgh (11 morts en 2018), un supermarché fréquenté par des hispaniques à El Paso (23 morts en 2019).
afp/cab
Des fusillades quotidiennes aux Etats-Unis
Les coups de feu dans les rues et les lieux publics sont quotidiens aux Etats-Unis et la criminalité par armes à feu est en nette augmentation dans les grandes villes comme New York, Chicago, Miami ou San Francisco, surtout depuis la pandémie de 2020.
Plusieurs initiatives d'élus pour renforcer la législation sur les armes ont échoué au Congrès ces dernières années, le puissant lobby des armes NRA restant très influent.
Les statistiques de décès par arme à feu dans ce pays de 330 millions d'habitants font état de 45'000 morts en 2021, dont environ 24'000 suicides, selon l'organisation Gun Violence Archive qui compile chaque jour chacun de ces drames sur tout le territoire.
Il y avait eu 39'389 tués en 2019, dont 23'941 suicides. A la date du 16 mai 2022, il y a exactement 16'068 personnes qui ont perdu la vie cette année par armes à feu, dont 8976 suicides.
Soit un rythme moyen de 118 morts par jour.