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Les jeunes Chinois cherchent une porte de sortie vers l'étranger

La volonté d’émigré chez les jeunes et la classe moyenne à Shanghai. [Reuters - Aly Song]
La volonté d’émigrer chez les jeunes et la classe moyenne à Shanghai / Tout un monde / 5 min. / le 3 juin 2022
Durement éprouvés par le confinement strict lié à la stratégie zéro-Covid du gouvernement, de plus en plus de jeunes Chinois de la classe moyenne cherchent à émigrer. Le voyage vers l'étranger reste toutefois semé d'embûches.

Mercredi à minuit, les habitants de Shanghaï ont laissé exploser leur joie après la fin de plus de deux mois de confinement strict en raison de la pandémie de Covid-19 qui touche la Chine. Mais dans certains quartiers de la mégapole, ce sentiment de liberté n'aura duré que quelques heures. La réalité reprend vite le dessus: de nouveaux cas suspects sont rapidement détectés et plusieurs quartiers sont directement reconfinés.

Partout dans la ville, des postes de dépistage ont été disséminés. Désormais, pour pouvoir continuer à fréquenter les lieux publics, les Shanghaïens doivent être munis d'un test PCR négatif datant de moins de 72 heures. "On n'a pas le choix que de coopérer, sinon on ne sort pas. Tout le monde sait comment ça marche ici. Tant pis si cela ne nous plaît pas", s'agace un témoin interrogé vendredi dans Tout un monde.

Comme lui, beaucoup sont exaspérés par ces contraintes auxquelles tous se résignent pourtant. Le confinement de Shanghaï et ses nombreux débordements l'ont clairement démontré: nul n'est à l'abri des dérives autoritaires du Parti communiste, pas même la plus grande et la plus riche ville de Chine, vitrine du développement économique.

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La pandémie, un déclencheur

Parmi les jeunes et dans la classe moyenne chinoise, beaucoup sont choqués par la manière dont s'est déroulé le confinement et la manière dont les gens ont été traités. Certains cherchent désormais une porte de sortie vers l'étranger. "Comme moi, plusieurs de mes amis n'avaient jamais pensé à partir à l'étranger. Mais avec cette longue pandémie, plusieurs l'envisagent, même ceux qui ont de très bons emplois et une bonne situation à Shanghaï", explique une étudiante.

"L'incertitude est devenue trop grande. C'est la désillusion. On se sent piégés, surtout avec les limites imposées et l'impossibilité de voyager. Je crains que ces entraves soient maintenues à l'avenir", précise-t-elle.

Cette désillusion est incarnée par un slogan dont de nombreux jeunes Chinois se sont emparés: "Nous sommes la dernière génération". Derrière cette formule, un sous-entendu: à quoi bon vivre, se marier et faire des enfants dans un système à la pression sociale et économique croissante et dont le caractère oppressif s'affiche au grand jour?.

Ce cri du coeur est issu d'une vidéo devenue virale sur les réseaux sociaux. Face aux refus répétés d'un jeune homme, des policiers sont venus l'emmener de force en centre de quarantaine, le menaçant d'une punition susceptible de peser sur trois générations de ses descendants. Sa réponse: "De toute façon, la dernière génération, c'est moi."

Difficile de quitter le pays, mais...

Interrogé par la RTS, un responsable d'une agence de conseils et de soutien à l'émigration affirme qu'il croule sous les consultations de jeunes désireux de quitter le pays. "C'est évidemment à cause de la situation. Hormis le confinement, il y a toutes les mesures draconiennes de prévention et de contrôle que connaît le pays depuis deux ans: les restrictions, le risque d'être placé en quarantaine du jour au lendemain et pendant longtemps."

Et de poursuivre ses explications: "Il est aussi devenu plus difficile de voyager. Sortir et entrer du pays est compliqué. Tout cela pousse les gens à sauter le pas. Ils sont très inquiets de savoir s'ils pourront partir ou pas."

Ma plus grande crainte, c'est de rencontrer des problèmes ou des obstructions lors du départ

Emma, jeune Chinoise sur le départ pour le Canada

Car depuis début mai, Pékin a officiellement resserré les conditions de départ de ses citoyens, invoquant officiellement la pandémie. Les départs sont désormais limités aux seuls déplacements urgents. Certains voyageurs auraient été bloqués à la douane et leur passeport confisqué ou annulé. Les autorités chinoises réfutent ces informations, en dépit des récits d'incidents qui circulent.

Eprouvée par la politique du zéro-Covid, Emma a réussi à obtenir un emploi au Canada. Bien que son départ soit déjà agendé pour la mi-juin, une incertitude règne: "Ma plus grande crainte, c'est de rencontrer des problèmes ou des obstructions lors du départ. J'ai peur d'être arrêtée à la douane. Ils tentent de limiter le nombre de départs et cela m'inquiète. Je pense que les mesures, ici en Chine, sont trop strictes. Si j'arrive sans accroc à destination, je dirai sans doute: 'Ouf, enfin. Dieu merci!'"

"Ça ne va pas s'arrêter"

Pour l'heure, aucun chiffre ne permet de confirmer un phénomène d'envergure. Mais pour le responsable de l'agence de conseils, c'est une lame de fond: "Je vous le dis, cela ne va pas s'arrêter. Je ne sais pas si cette année marquera ou non un pic de départs, mais la tendance ne va pas ralentir", estime-t-il.

"Honnêtement, je pense que dans les prochaines années, pandémie ou non, la pression interne va encore s'accentuer. Que ce soit sur les jeunes, les étudiants, les actifs ou les riches retraités, toute la population est sous pression. Il y aura toujours plus d'inflation, la dépréciation de notre monnaie guette et les opportunités professionnelles diminuent. Il va être de plus en plus difficile pour les gens d'améliorer leur niveau de vie ici. Ce phénomène de fuite va se poursuivre", détaille le conseiller à l'émigration.

Une fuite qui sera bien évidemment réservée à une minorité de Chinoises et de Chinois: ceux qui en ont les moyens.

Reportage radio: Michaël Peuker

Adaptation web: Jérémie Favre

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