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Camille Grand: l'Otan "fait tout" pour que l'adhésion de la Suède et de la Finlande se fasse "vite"

Camille Grand, secrétaire-adjoint de l'Otan. [RTS]
Interview de Camille Grand, secrétaire-général adjoint de l'Otan. / L'actu en vidéo / 31 min. / le 4 juin 2022
Le sommet de l'Otan à la fin du mois de juin se penchera sur l'adhésion de la Suède et de la Finlande. Alors que la Turquie menace de bloquer le processus, le secrétaire-général adjoint de l'Otan Camille Grand, interrogé dans l'émission Tout un monde de la RTS, se dit optimiste sur la possibilité de trouver un consensus.

Les dirigeants des 30 Etats membres de l'Otan se retrouveront à Madrid du 28 au 30 juin prochains. Si la candidature de la Suède et de la Finlande a reçu un accueil favorable de la plupart des membres, le président Recep Tayip Erdogan profite de la situation pour soigner son agenda sécuritaire et électoral.

>> Lire aussi : La Turquie bloque les discussions sur l'adhésion de la Finlande et de la Suède à l'Otan

En difficulté dans les sondages, il compte se relancer en vue des élections présidentielles de 2023. Erdogan menace de poser son veto à l'élargissement de l'Otan, sauf si la Suède, qu'il accuse de protéger des terroristes kurdes, lui accorde des garanties. Le président turc veut aussi utiliser ce levier pour obtenir la livraison d'avions de chasse américains que Washington lui refuse.

>> Ecouter le sujet de Tout un monde sur le prochain sommet de l'Otan :

Géopolitis: OTAN au pilori [Adobe stock - Lulla]Adobe stock - Lulla
Le sommet de l’OTAN sur le concept stratégique de l’alliance: interview de Camille Grand / Tout un monde / 9 min. / le 7 juin 2022

Compromis nécessaire

Camille Grand, le secrétaire-général adjoint de l'Otan, interrogé dans l'émission Tout un monde de la RTS, se dit toutefois optimiste sur la possibilité de trouver un consensus: "On a bon espoir que les divergences soient réglées à temps pour le sommet. Ce qui est important, c'est de prendre en compte les requêtes de la Turquie et de s'asseoir autour d'une table. L'Otan a sa propre manière de traiter la question du terrorisme. Vis-à-vis de la Finlande, les Turcs ont des exigences davantage politiques."

Pour Camille Grand, "il est important de montrer que cette demande finlandaise et suédoise est prise en compte par tous les alliés, y compris la Turquie. On fait tout pour avancer vite et éviter des négociations qui s'étalent dans le temps."

Un symbole politique

Pour le Français, l'adhésion des deux pays scandinaves permettrait d'apporter à l'alliance de nouvelles ressources militaires."Ce sont deux partenaires très proches qui ont la particularité d'arriver avec des capacités militaires significatives. Ils apportent aussi une connaissance de la zone baltique et nordique."

"Mais le plus important se situe sur le plan politique. On a deux pays qui n'étaient pas nécessairement favorables à l'Otan et qui comptent aujourd'hui sur elle pour leur sécurité. Ils ont fait un choix très courageux en changeant de posture."

>> Lire aussi : Finlande et Suède, de la neutralité historique aux bras de l'Otan

Concernant la question d'une éventuelle adhésion de l'Ukraine à l'Otan, Camille Grand assure que le sujet "n'est pas à l'ordre du jour". Pour lui, il faut déjà que le pays gagne la guerre et retrouve son intégrité territoriale. Ensuite, les Ukrainiens "pourront décider par eux-mêmes comment ils souhaitent se positionner dans l'architecture européenne de sécurité".

Posture de défense et de dissuasion

Finalement, le secrétaire-général adjoint de l'Otan pose un regard balancé dans la forme mais clair sur le fond sur la situation actuelle: "Il faut mesurer la profondeur de ce qui est en train de se passer. Un très grand pays doté de l'arme nucléaire envahit un très grand pays voisin pour rectifier les frontières à son profit et changer de régime. C'est sans précédent dans l'histoire de l'Europe, et c'est une violation de tous les principes que nous avons développés ensemble depuis des décennies - y compris pendant la Guerre froide."

Le spécialiste de l’investissement de défense assure que l'Otan est très prudente et essaie par dessus tout d'éviter une escalade du conflit. "Il faut être extrêmement attentif pour protéger les alliés. [...] On est dans un monde différent, avec le retour de la guerre conventionnelle en Europe. Notre objectif est que notre posture de défense et dissuasion fasse que ça s'arrête là."

Propos recueillis par Alain Fanco

Adaptation web: Antoine Schaub

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La Suisse "n'est pas un passager clandestin de l'Otan"

La conseillère fédérale en charge de la Défense Viola Amherd a transmis à Davos un message à l'Otan assurant que la Suisse voulait "densifier" ses relations avec elle.

Camille Grand lui ouvre d'ores et déjà les bras: "J'ai des contacts réguliers avec mes collègues suisses. Cette proximité montre qu'on peut avoir une relation qui se densifie, sans que ce soit problématique politiquement en Suisse ou que ça ouvre la voie à une adhésion, qui est un choix tout à fait différent."

Sans être membre, la Suisse profite du parapluie de l’Otan par sa position géographique. Mais Camille Grand estime qu'elle fait largement sa part du travail de protection.

"Ce serait très injuste de décrire la Suisse comme un passager clandestin de la sécurité. La Suisse a beaucoup investi dans sa défense, elle a des forces armées modernes, elle prend de grandes décisions d'investissement, maintient un système de conscription exigeant", souligne Camille Grand, qui voit dans la Suisse "un pays sérieux sur le plan militaire".

>> Ecouter les précisions de La Matinale :

Interview de Camille Grand, secrétaire-adjoint de l'Otan
La Suisse "n'est pas un passager clandestin de l'Otan", assure son secrétaire-général adjoint Camille Grand / La Matinale / 2 min. / le 7 juin 2022