Modifié

Majorité absolue de Macron en péril: "La stratégie de Jean-Luc Mélenchon a fonctionné"

Le bilan du 1er tour des législatives en France: interview de Camille Vigogne Le Coat
Le bilan du 1er tour des législatives en France: interview de Camille Vigogne Le Coat / La Matinale / 8 min. / le 13 juin 2022
Au second tour des législatives, le camp d'Emmanuel Macron va devoir batailler pour conserver la majorité absolue face à l'alliance de gauche. Et même si l'hypothèse d'un Jean-Luc Mélenchon Premier ministre semble impossible, ce résultat sonne comme une petite victoire, selon la journaliste Camille Vigogne Le Coat.

Un cheveu sépare la coalition pro-Macron Ensemble! (25,7%) et l'alliance de gauche Nupes (25,6%) à l'issue du premier tour des législatives françaises. Si Emmanuel Macron en sort vainqueur de justesse, ce résultat sonne toutefois comme une sanction pour lui, explique lundi dans La Matinale Camille Vigogne Le Coat, journaliste politique à l'Express.

Au final, 21'000 petites voix ont séparé les pro-Macron des pro-Mélenchon. [AFP - Jean-Marc Barrere / Hans Lucas]
Au final, 21'000 petites voix ont séparé les pro-Macron des pro-Mélenchon. [AFP - Jean-Marc Barrere / Hans Lucas]

"C'est une sanction à l'encontre de sa stratégie de retrait lors de la campagne et pour ne pas avoir mis ses propositions et projets de réformes en avant", analyse-t-elle. Pour la journaliste, Emmanuel Macron se trouve donc aujourd'hui dans une situation extrêmement compliquée. "Il n’est pas assuré d’avoir la majorité absolue à l'Assemblée nationale", à savoir 289 sièges sur 577.

Si cette majorité absolue ne devait pas être atteinte au deuxième tour dimanche prochain, les conséquences seraient très lourdes pour le président en place. "Dans le pire des scénarios, cela voudrait dire que pour chaque réforme, il faudrait négocier au cas par cas avec d’autres groupes parlementaires qui ne font pas partie de sa coalition."

Et dans le moins pire des scénarios? "Emmanuel Macron devra s’appuyer fortement sur ses deux groupes alliés, c’est-à-dire le Modem (le parti centriste de François Bayrou) et le parti Horizons d’Edouard Philippe, qui a des ambitions pour 2027 et sur lequel Macron ne voulait pas particulièrement s’appuyer", répond-elle. "Il va falloir au minimum compter avec ces deux hommes pour le prochain quinquennat", résume-t-elle.

>> L'analyse de La Matinale après le 1er tour :

La coalition d'Emmanuel Macron a remporté d'un souffle le premier tour des législatives françaises. [AFP - Ludovic Marin]AFP - Ludovic Marin
En France, le second tour des élections législatives s'annonce serré / La Matinale / 1 min. / le 13 juin 2022

La formule de Mélenchon gagnante

A l'inverse, pour Jean-Luc Mélenchon, ces 21'000 voix d'écart sonnent comme une petite victoire. Bien qu'absolument pas crédible constitutionnellement parlant, sa formule "Elisez-moi Premier ministre" semble donc avoir fonctionné, note Camille Vigogne Le Coat. "Il aura en tout cas gagné la bataille du narratif pendant cette campagne."

Alors que personne ne pensait, il y a quelques semaines, que les différents courants de la gauche et les écologistes allaient pouvoir s’unir, les projections leur donnent aujourd'hui entre 150 et 190 députés à l’Assemblée nationale. Mais plus personne ne croit à l'hypothèse d'un Mélenchon Premier ministre, "y compris les ministres d’Emmanuel Macron, qui aiment se faire peur", note la journaliste.

Maintenant, tout l’enjeu pour Jean-Luc Mélenchon et ses adjoints est de mobiliser les abstentionnistes car ils n’ont pas de réserve de voix. "Leur réserve de voix se trouve chez les électeurs qui ne se sont pas déplacés", souligne l'invitée de La Matinale. Cette semaine d'entre deux tours va donc être très intense. "On peut s’attendre à une campagne extrêmement tendue avec un président et des ministres qui iront chercher les voix et ce seuil de la majorité absolue", prédit Camille Vigogne Le Coat.

>> La réaction de Jean-Luc Mélenchon :

Jean-Luc Mélenchon demande aux Français de l'élire Premier ministre. [KEYSTONE - MOHAMMED BADRA]KEYSTONE - MOHAMMED BADRA
La majorité présidentielle de Macron mise à mal au premier tour. Interview de Jean-Luc Mélenchon / La Matinale / 1 min. / le 13 juin 2022

Le parti de Marine Le Pen dépassé

Quant à Marine Le Pen, dont le parti est arrivé au 3e rang, elle a perdu son rôle de première opposante à Emmanuel Macron qui lui a été ravi par Jean-Luc Mélenchon. "Marine Le Pen s’est réveillée un peu tard, le narratif avait déjà été imposé. Quand on est dans un duel Mélenchon/Macron, il n’y a plus de place pour un troisième", analyse la journaliste.

En revanche, la leader du Rassemblement national peut se consoler et garder le sourire pour deux raisons. "Elle a énormément augmenté son score, gagnant 5 points depuis 2017." La deuxième raison, plus prosaïque, est d'ordre financière. "En France, les subventions des partis politiques sont décidées en fonction du nombre de voix qui sont portées sur votre parti au premier tour des législatives. Comme elle a gagné beaucoup de voix, elle va aussi gagner beaucoup d’argent. Le Rassemblement national a 23 millions d’euros de dettes, donc Marine Le Pen peut souffler."

Propos recueillis par Valérie Hauert

Adaptation web: Fabien Grenon

Publié Modifié

La presse française sévère avec le président Macron

Ce lundi matin, les éditorialistes se sont montrés sévères avec le président Emmanuel Macron et ses choix stratégiques.

Même s’il conserve une majorité à l’Assemblée nationale, c’est une défaite pour le camp présidentiel, estime par exemple La Croix dans son éditorial. L’élan n’est plus là pour Emmanuel Macron qui a fait le pari d’une campagne atone, persuadé que l’abstention jouerait en sa faveur, poursuit le quotidien. Le Parisien en remet une couche, qualifiant le score de l'alliance de gauche (Nupes) de "percée incroyable".

Pour L'Express, de son côté, le bon score de la Nupes, est un trompe-l'oeil. L'alliance de gauche doit en effet désormais affronter un second tour de tous les dangers, entre abstention et front anti-Mélenchon.

"Entre la Nupes et Ensemble!, c’est la lutte finale", titre Libération. Le quotidien revient en outre sur la déception pour le parti de Marine Le Pen, arrivé troisième de ce premier tour. Selon lui, il n’a pas été à la hauteur de son score à la présidentielle.

L'Obs, lui, consacre un article à la défaite d'Eric Zemmour. Le magazine impute cet échec à Marine Le Pen qui affichait clairement son souhait de ne donner aucun soutien au  "traître"  Zemmour. Aux législatives, le fameux "Z" devait signifier  "Zéro député", écrit encore L’Obs. Il note que c’est chose faite, son mouvement n’ayant aucun élu à l’Assemblée nationale.

Enfin, le magazine Marianne consacre un long papier aux différents ministres qui ont présenté une candidature, écrivant que s'il n'y a pas éliminés, il y a des cabossés. Il rappelle notamment qu'ils sont quinze qui, s’ils sont battus dimanche prochain, devront quitter le gouvernement.

>> Réécouter la revue de presse de Tout un monde :

L'alliance de gauche de Jean-Luc Mélenchon menace la majorité absolue des pro-Macron à l'Assemblée [AFP - Hans Lucas]AFP - Hans Lucas
Revue de presse française après le 1er tour des législatives / Tout un monde / 3 min. / le 13 juin 2022