Avant même le début du rassemblement, la police anti-émeutes a effectué une descente musclée dans plusieurs bars du quartier de Cihangir, autour de l'emblématique place Taksim, et a arrêté "au hasard" les personnes qui s'y trouvaient, dont des journalistes et des militants LGBTQ+, a constaté l'AFP.
Comme chaque année désormais, la Marche des Fiertés avait été officiellement interdite par le gouverneur de la ville mais des centaines de manifestants brandissant des drapeaux arc-en-ciel se sont rassemblés dans les rues adjacentes à la place Taksim, entièrement fermée au public.
En chantant "L'avenir est queer", "Vous ne serez jamais seuls", ou "On est là, on est queer, on n'ira nulle part ailleurs", les manifestants ont ensuite défilé pendant un peu plus d'une heure dans les rues du quartier de Cihangir, soutenus par les riverains postés aux fenêtres.
"Défendre nos droits"
L'ONG Kaos GL, qui milite pour la promotion et la protection des personnes LGBTQ+, a dénombré "150 arrestations", alors qu'Amnesty International a réclamé leur "libération inconditionnelle et immédiate" sur Twitter. Selon plusieurs témoins, la police a tenté d'empêcher la presse de filmer les arrestations.
Selon le comptage des organisateurs de la marche, quelque 200 personnes ont au total été appréhendées en plusieurs vagues.
"Mais aujourd'hui, c'est l'occasion de défendre nos droits, de crier qu'on existe: jamais vous n'arriverez à arrêter les queers", estime un manifestant, usant du vocable qui désigne toute forme d'altersexualité et réfute la définition biologique du genre.
Après un spectaculaire défilé en 2014 de plus de 100'000 personnes à Istanbul, les autorités turques ont interdit la Marche des Fiertés année après année, officiellement pour des raisons de sécurité.
Appel à lever l'interdiction
Vendredi, la Commissaire européenne aux droits humains, Dunja Mijatovic, avait appelé "les autorités d'Istanbul à lever l'interdiction en vigueur sur la Marche des Fiertés et à garantir la sécurité des manifestants pacifiques". "Les droits humains des personnes LGBT en Turquie doivent être protégés", ajoutait-elle, en réclamant qu'il soit "mis fin à (leur) stigmatisation".
L'homosexualité, dépénalisée en Turquie depuis le milieu du XIXe siècle (1858), n'est pas interdite mais reste largement soumise à l'opprobre sociale et à l'hostilité du parti islamo-conservateur au pouvoir, l'AKP, et à celle du gouvernement du président Recep Tayyip Erdogan. Un ministre a traité par le passé les homosexuels de "détraqués".
ats/jfe