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En fuite, le président du Sri Lanka est bloqué à l'aéroport de Colombo

En fuite, le président du Sri Lanka est bloqué à l'aéroport de Colombo. [AFP - ISHARA S. KODIKARA]
En fuite, le président du Sri Lanka est bloqué à l'aéroport de Colombo. - [AFP - ISHARA S. KODIKARA]
Le président contesté du Sri Lanka était coincé mardi à l'aéroport de Colombo. Il a subi un face-à-face humiliant avec les agents de l'immigration l'empêchant de s'exiler à l'étranger, selon des sources officielles.

Les responsables de l'immigration ont refusé à Gotabaya Rajapaksa l'accès au salon VIP pour faire viser son passeport, alors que le chef de l'Etat voulait éviter le terminal ouvert au public, craignant la réaction de la population.

N'ayant pas encore démissionné, ce qu'il a promis de faire mercredi pour une "transition pacifique du pouvoir", Gotabaya Rajapaksa bénéficie d'une immunité présidentielle. Il pourrait vouloir en profiter pour trouver refuge à l'étranger.

"Posture pas très intelligente"

"La posture de Gotabaya Rajapaksa, qui n'est pas la plus intelligente au regard de la gravité de la situation, est à l'image de la gouvernance du Sri Lanka ces dernières années, qui a toujours été douteuse avec des promesses suivies par peu d'effets", analyse Olivier Guillard, chercheur et spécialiste de l'Asie à l'Université du Québec à Montréal, mardi dans l'émission de la RTS Tout un monde.

Olivier Guillard attendait "plus de dignité" d'une "vieille famille politique" du Sri Lanka.

>> L'interview d'Olivier Guillard dans Tout un monde :

Olivier Guillard, directeur de l'information de Crisis24. [Crisis24 - Crisis24]Crisis24 - Crisis24
Soulèvement de la population au Sri Lanka après des mois de pénuries: interview d’Olivier Guillard / Tout un monde / 7 min. / le 12 juillet 2022

Le chef de l'Etat et sa femme ont passé la nuit précédente dans une base militaire proche de l'aéroport international, après avoir manqué quatre vols qui auraient pu les conduire vers les Emirats arabes unis.

"Situation tendue"

Son plus jeune frère Basil, qui a démissionné en avril de son poste de ministre des Finances, a aussi manqué son avion pour Dubaï après une confrontation similaire avec l'immigration. Basil Rajapaksa a essayé d'utiliser un service de conciergerie payant pour les voyageurs d'affaires, mais le personnel de l'aéroport et de l'immigration a annoncé la suppression de ce service rapide avec effet immédiat.

"Certains autres passagers ont protesté contre l'embarquement de Basil Rajapaksa sur leur vol", a rapporté à l'AFP un responsable de l'aéroport. "C'était une situation tendue, donc il a quitté l'aéroport précipitamment."

Basil, qui possède aussi la nationalité américaine, devait demander un nouveau passeport après avoir laissé le sien dans le palais présidentiel au moment de la fuite de la famille Rajapaksa samedi face à l'assaut de milliers de manifestants, selon une source diplomatique.

>> Relire : Le président du Sri Lanka fuit devant les manifestants et démissionne

Valise remplie de documents

Le président sri-lankais a laissé derrière lui une valise remplie de documents et 17,85 millions de roupies (près de 48'500 francs) en liquide, désormais sous scellés.

Le bureau de la présidence ne communique pas sur sa situation, mais Gotabaya Rajapaksa demeure le commandant en chef des armées, disposant ainsi de moyens militaires. Il a alors toujours la possibilité de prendre un navire militaire pour se rendre en Inde ou aux Maldives, selon une source de la défense.

Si le chef de l'Etat démissionne comme promis, le Premier ministre Ranil Wickremesinghe sera automatiquement nommé président par intérim jusqu'à l'élection par le Parlement d'un député qui exercera le pouvoir jusqu'à la fin du mandat en cours, c'est-à-dire novembre 2024.

Ranil Wickremesinghe est toutefois aussi contesté par les manifestants qui campent devant le Secrétariat présidentiel depuis plus de trois mois pour demander la démission du président en raison de la crise économique sans précédent que traverse le pays.

>> Relire : Le palais du président reste occupé au Sri Lanka en attendant sa démission

Pourparlers avec le FMI

Gotabaya Rajapaksa est accusé d'avoir mal géré l'économie, menant à l'incapacité du pays, en manque de devises étrangères, à financer les importations les plus essentielles à cette population de 22 millions d'habitants. Colombo a fait défaut sur sa dette extérieure de 51 milliards de dollars en avril et est en pourparlers avec le FMI pour un éventuel renflouement.

Le Sri Lanka a presque épuisé ses réserves d'essence. Le gouvernement a ordonné la fermeture des bureaux non essentiels et des écoles afin de réduire les déplacements et d'économiser du carburant. "Le fait que la population ait poussé l'équipe au pouvoir à partir est déjà une bonne chose" estime Olivier Guillard. Mais les problèmes ne vont pas se résoudre du jour au lendemain", prévient-t-il.

Plusieurs pays voisins ont déjà proposé de fournir une aide alimentaire d'urgence. "Mais il faut un minimum de stabilité politique et un environnement sécuritaire stable pour que tout ceci soit acheminé. Cela va certainement se faire dans les prochaines semaines" avec les institutions internationales, dit Olivier Guillard.

>> Ecouter aussi l'interview de Rashima De Silva, coordinatrice de l'aide humanitaire pour Helvetas, dans Tout un monde :

Des manifestants devant le palais présidentiel à Colombo. [AFP]AFP
Sri Lanka, témoignage de la coordinatrice de l’aide humanitaire pour Helvetas / Tout un monde / 3 min. / le 12 juillet 2022

vajo avec ats

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