Les horaires et la ponctualité n'ont pas toujours fait partie intégrante de nos sociétés
Longtemps, l'apparition du chemin de fer au XIXe siècle a été perçue comme une révolution dans le domaine des transports. Lors de ses recherches, Catherine Herr-Laporte, auteure d'une thèse sur le temps et la mobilité, réalise progressivement que "ce ne sont pas ces innovations qui ont permis de gagner du temps, mais bien le système organisationnel et la coordination temporelle".
"En 1765, on mettait onze jours pour faire Paris - Bâle, puis seulement six en 1780", cite en exemple la doctorante cette semaine dans l'émission de la RTS Forum. "Pourtant, au cours de ces quinze années, il n'y a pas de progrès techniques majeurs."
Et d'ajouter: "Vu qu'il y a de nombreux acteurs impliqués dans les transports - les voyageurs, bien sûr, mais aussi les agents - il s'agit de coordonner toutes ces personnes pour qu'elles soient au même endroit au même moment. C'est cette coordination qui permet d'éviter de perdre du temps et d'accélérer vraiment les mobilités."
Marqueur du "bon fonctionnement" de l'Etat
Un changement s'opère également dans la mesure des déplacements, en heures et non plus en kilomètres. "Les transports terrestres sont l'un des domaines où l'on voit lentement émerger une nouvelle conception du temps: il n'est plus seulement une durée, il devient un horaire, soit un temps mesuré, de plus en plus précis. Et les horaires, avec leurs échéances et leurs normes, ne vont fonctionner que si tout le monde les respecte: c'est l'émergence de la ponctualité", indique la doctorante.
Une ponctualité qui va avoir toute son importance, puisqu'elle devient un prérequis essentiel pour le bon fonctionnement de l'Etat moderne. Les retards eux vont avoir un impact direct au niveau économique, mais aussi dans la gestion politique et administrative du pays.
"Le respect des horaires et la crainte du retard montrent l'intériorisation du temps par les différents acteurs, signe de l'émergence d'une nouvelle conscience du temps", explique encore Catherine Herr-Laporte.
>> Les explications de Catherine Herr-Laporte:
Propos recueillis par Thibaut Schaller/vajo