La question n’est en effet pas tranchée, estime dans Forum Nicole Bacharan, historienne et politologue spécialiste des Etats-Unis. D’un côté, elle indique que "la Commission d’enquête parlementaire a vraiment démontré les responsabilités de Donald Trump et a donné des preuves, à travers les témoignages, des fautes qu’il avait commises".
Mais, de l’autre, "tout ce qu’elle peut faire, c’est une recommandation au ministère de la Justice, qui peut lancer une enquête criminelle à l’égard de Donald Trump et certainement de quelques autres". La justice se saisira-t-elle de l’affaire? Nicole Bacharan rappelle que Merrick Garland, le ministre de la Justice, a affirmé mercredi que "personne n’est au-dessus des lois". Un signe, peut-être, qu’une procédure judiciaire pourrait s’ouvrir contre le 45e président des Etats-Unis. Mais le climat politique est tendu. Les républicains et les démocrates sont irréconciliables, "même pour l’intérêt supérieur de la nation", souligne la spécialiste, qui estime que des conséquences judiciaires relèvent ainsi de l’incertain.
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Arène électorale
Au-delà de l’enjeu judiciaire, il y a, selon Nicole Bacharan, un enjeu politique avec cette Commission d'enquête dans laquelle siègent sept démocrates et deux républicains, Adam Kinzinger et Liz Cheney, défenseurs des institutions et mis sous pression par leur parti: "discréditer Donald Trump en tant que futur candidat (à la présidence, ndlr)."
Le but est aussi de "décourager les républicains hésitants et les indépendants de le choisir comme candidat". En effet, elle indique qu’il y a encore des Américains et Américaines indécis. "Ce ne sont pas des démocrates échevelés. Ils aimeraient mieux voter pour un républicain et préfèrent des politiques économiques de baisse d’impôts, par exemple, et plus de libéralisme." Ces gens-là préféreraient quelqu’un d’autre que Donald Trump.
Les "trumpistes" purs et durs, qui sont persuadés que l’élection a été volée, ne peuvent, eux, constituer une majorité lors d’une élection, selon la politologue. Ainsi, les conclusions de la Commission d’enquête, notamment que Trump a "orchestré le mensonge sur l’élection volée" et qu’il a exercé des pressions sur des officiels, peuvent servir à faire pencher la balance de l’opinion. "Il y a beaucoup d’Américains qui sont sensibles à ces arguments de bons sens", estime-t-elle.
Tout se jouera au mois de novembre lors des prochaines élections législatives partielles, les "midterms", lors desquelles le peuple américain renouvelle une partie de son Parlement. "Si les républicains reprennent la majorité au Congrès, c’en est absolument fini des enquêtes contre Donald Trump", affirme Nicole Bacharan.
Propos recueillis par Thibaut Schaller
Adaptation web: Antoine Michel