Avec cette nouvelle Constitution, le chef de l’État ne pourrait, par exemple, pas être démis de ses fonctions, mais il pourrait dissoudre une des chambres du Parlement.
Cette réforme va à contre-courant du système parlementaire choisi en 2014 dans la foulée de la révolution et ce changement de cap cristallise les oppositions politiques. A cause de la chaleur, beaucoup de bureaux de vote seront ouverts jusqu’à 22 heures et les résultats ne sont pas attendus avant mardi dans la journée.
Effacer 10 ans de parlementarisme
Pour le dernier jour de campagne, samedi, un petit millier de personnes se sont rassemblées devant le théâtre, au coeur de Tunis, pour appeler à boycotter le scrutin.
Pour Brahim, un militant du parti islamiste Ennahdha qui ne souhaite pas donner son nom, il est impossible de cautionner un référendum qui officialisera le retour à la dictature. "J’étais en prison avec Bourguiba et Ben Ali. Et on se retrouve de nouveau avec un dictateur", raconte-t-il.
Depuis un an, Kais Saied a dissous le Parlement dominé par Ennahdha. Son projet de Constitution est la dernière pierre à son édifice qui doit effacer dix ans de parlementarisme.
Najib Hajri, le président du parti libéral Mouvement central démocratique, insiste sur les avancées de Kais Saied comme la création d’une assemblée dédiée aux territoires.
"Donc les régions vont participer activement à l’élaboration des plans de développement et des budgets, ce qui est une chose très positive. Nous considérons que la Constitution de 2022 va résoudre ces problèmes-là", explique-t-il.
Des risques de dérives déjà visibles
Sur les 148 organisations autorisées à faire campagne, seulement sept appellent à voter "non". Pour Houssem Hami, le coordinateur du Collectif Soumoud, l'une des 7 organisations opposées à la nouvelle Constitution, le déroulement non équitable de la campagne illustre les risques de dérives.
"On est très minoritaires, donc il y a un déséquilibre certain par rapport au passage dans les médias. Le comportement des forces de l’ordre n’était pas équitable en quelque sorte. C’était plutôt les personnes qui étaient pour la nouvelle Constitution qui pouvaient faire plus de manifestations", dénonce-t-il.
Au lendemain du vote, le principal défi du président restera la grave situation économique avec une croissance poussive (autour de 3%), un chômage élevé (40% chez les jeunes), une inflation galopante, accentuée par la guerre en Ukraine, et l'augmentation du nombre de pauvres à 4 millions de personnes.
La Tunisie, en profonde crise financière avec une dette supérieure à 100% du PIB, négocie depuis des mois un nouveau prêt avec le FMI qui a fait état, avant le référendum, de "progrès satisfaisants" en vue d'un accord, mais exigera en retour des sacrifices, susceptibles de provoquer des réactions dans la rue.
ats/aps