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La Turquie accusée d'alimenter la crise migratoire depuis Chypre

Reportage à Chypre, devenue la porte d'entrée de l'Europe pour de nombreux migrants.
Reportage à Chypre, devenue la porte d'entrée de l'Europe pour de nombreux migrants. / 19h30 / 3 min. / le 25 juillet 2022
Chypre est le pays européen qui reçoit le plus de demandes d'asile par million d'habitants. Les réseaux de passeurs tirent profit de la division de l'île entre la République de Chypre, membre de l'UE, au sud, et la zone occupée par la Turquie, au nord, accusée d'instrumentaliser les migrants.

Depuis 1974, Chypre est divisée en deux parties. Le sud appartient à la République de Chypre, aujourd'hui dans l'Union européenne (UE). Le nord est lui illégalement occupé par les Turcs et la frontière entre les deux régions, appelée la ligne verte, est contrôlée par l'ONU.

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Dans la capitale de la République de Chypre, à Nicosie, les demandeurs d'asile affluent. Certains sont arrivés sur l'île sous le prétexte d'y faire des études. Les visas pour étudiants sont délivrés par la Turquie afin d'étudier au nord du territoire. Or, les candidats à l'asile veulent, eux, obtenir le statut de réfugiés au sein de l'UE.

"Depuis deux ou trois ans, on voit augmenter le nombre de demandeurs d’asile originaires d'Afrique subsaharienne venus en tant qu'étudiants. Ils s'inscrivent dans l'une de ces universités privées du nord et cela leur donne accès à la zone occupée", a expliqué lundi dans le 19h30 de la RTS Doros Polycarpou, directeur de l'ONG KISA, qui vient en aide aux migrants dans les démarches administratives.

L'espoir d'une entrée facile

La Chypre du nord compte 300'000 habitants et 26 universités. Certaines d'entre elles, peu sérieuses, veulent remplir leurs caisses en attirant un maximum de migrants africains ou asiatiques. Elles s'appuient notamment sur des intermédiaires qui font miroiter un passage facile vers l'UE.

Pour Emmanuel Achiri, président de l’association des étudiants étrangers en Chypre du nord, il est très simple de gagner de l’argent en jouant les intermédiaires.

"Les universités les payent 500 dollars par étudiant ramené. La famille de l'étudiant leur verse aussi une commission de 300 à 500 dollars. J’ai même entendu parler de 2000 dollars parfois", rapporte-t-il.

La Turquie pointée du doigt

Au sud de l'île, dans le camp de migrants de Pournara, les conditions d'accueil sont mises à mal par l'afflux de demandeurs d'asile. Dépassée, la République de Chypre en a accueilli l'an dernier plus que la Grèce.

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"Je ne suis pas censé être dans le camp, mais impossible de me loger ailleurs. Si je réponds à une annonce et que je dis que je suis africain, on me dit de m'en aller", témoigne un migrant. Tous les soirs, des centaines d'entre eux s’entassent dans des tentes, faute de mieux.

Face à cette situation, le gouvernement chypriote a appelé Bruxelles à l’aide. Selon lui, la Turquie orchestre l’arrivée des faux étudiants. "La Turquie nous envoie ces migrants et ne coopère pas avec notre gouvernement. Il y a clairement une instrumentalisation de la migration", déclare Nicos Nouris, ministre de l’Intérieur de la République de Chypre.

Ce dernier est décidé à construire une clôture entre le nord et le sud de l'île, le long des 180 kilomètres de la ligne verte. Les premiers fils barbelés ont déjà été installés, alors que les demandeurs d'asile continuent d'arpenter les rues de Nicosie. Pour beaucoup d'entre eux, le rêve européen n'ira pas plus loin.

Sujet TV: io
Adaptation web: iar

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Une crise migratoire aussi italienne

Eric Jozsef, correspondant de la RTS à Rome, a rappelé lundi dans l'émission Forum à quel point la question migratoire est brûlante en Italie. Lors des dernières 48 heures, plus de 2000 personnes y ont débarqué, surtout en Calabre, en Sicile et à Lampedusa, en provenance de la Tunisie et la Lybie.

"La Méditerranée est en train de devenir le plus grand cimetière des désespérés", a d'ailleurs déclaré le président de la région de Sicile dimanche après la mort de 5 nouveaux migrants.

Au total, depuis le début 2022, 35'000 migrants sont arrivés par la mer en Italie, soit un tiers de plus que l'an dernier. Et ce chiffre pourrait encore augmenter. Des dizaines de personnes seraient au large à bord de navires affrétés par des ONG.

Contexte politique tendu

Le gouvernement Draghi a donné sa démission jeudi dernier. Dans la foulée, le chef de l'Etat Sergio Mattarella a dissous le Parlement et convoqué des élections législatives anticipées pour le 25 septembre prochain.

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Le thème de la migration devrait s'installer comme l'un des enjeux majeurs de cette campagne électorale. C'est une aubaine pour l'extrême droite italienne, dont font partie la Lega de Matteo Salvini et Fratelli d'Italia, le parti postfasciste de Giorgia Meloni. Ensemble, ils représentent environ 35% des voix selon les sondages et ils comptent bien parler d'immigration.

>> Ecouter l'intervention d'Eric Jozsef dans Forum :

L’augmentation saisonnière de l’arrivée de migrants récupérée politiquement en Italie
L’augmentation saisonnière de l’arrivée de migrants récupérée politiquement en Italie / Forum / 2 min. / le 25 juillet 2022