Si son déplacement sur ce territoire revendiqué par la Chine a duré moins de 24 heures, Nancy Pelosi a déclenché la fureur de Pékin en étant la plus haute responsable américaine élue à se rendre à Taipei en 25 ans. Elle a martelé que les Etats-Unis n'abandonneraient pas l'île, dirigée par un régime démocratique et qui vit sous la menace constante d'une invasion par l'armée chinoise.
En réaction, Pékin a lancé à partir de jeudi midi (6h du matin en Suisse) de vastes manoeuvres militaires dans six zones autour de Taïwan, au niveau de routes commerciales très fréquentées.
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Des manoeuvres jusqu'à dimanche
"Les exercices commencent" et se poursuivront jusqu'à dimanche midi, a indiqué la télévision publique chinoise CCTV dans un message sur les réseaux sociaux. "Pendant cette période, navires et aéronefs ne doivent pas pénétrer dans les eaux et les espaces aériens concernés", est-il précisé.
L'armée taïwanaise a elle indiqué "se préparer à la guerre sans la chercher".
Des missiles balistiques dans la zone économique exclusive du Japon
Selon le journal Global Times, qui cite des analystes militaires, les exercices sont d'une ampleur "sans précédent" car des missiles pourraient survoler Taïwan pour la première fois. Des propos qui ont par la suite été infirmés par d'autres experts internationaux, qui estiment peu probable un tel scénario, qui pourrait très rapidement amener à l'escalade.
Peu de temps après ces annonces, des journalistes de l'AFP ont constaté que l'armée chinoise avait tiré des "projectiles" vers le détroit de Taïwan. A Pingtan, une île chinoise située près des manoeuvres en cours, les reporters ont vu plusieurs projectiles tirés à environ 13h13 (07h13 en Suisse) s'envoler dans le ciel vers la mer, suivis de panaches de fumée blanche.
Le ministère de la Défense taïwanais a confirmé de son côté que Pékin avait déjà tiré de multiples missiles balistiques au cours de ces grandes manoeuvres. Quelques heures plus tard, le ministre de la Défense japonais Nobuo Kishi a annoncé devant des journalistes que cinq missiles balistiques chinois étaient tombés dans la zone économique exclusive du Japon (ZEE), ce qui constituerait une première dans l'histoire.
"Le Japon a déposé une protestation auprès de la Chine par la voie diplomatique", a ajouté Nobuo Kishi, qualifiant l'incident de "problème grave qui affecte notre sécurité nationale et celle de nos citoyens".
Certaines îles du département d'Okinawa, à l'extrême sud du Japon, se trouvent à quelques dizaines de kilomètres seulement de Taïwan, et le ministre a précisé que c'était la première fois que des missiles balistiques chinois entraient dans la ZEE nippone.
Taïwan dénonce "un acte irrationnel"
Du côté de Pékin, on menace: "Si les forces taïwanaises viennent volontairement au contact de (l'armée chinoise) et viennent à tirer accidentellement un coup de feu, (l'armée chinoise) répliquera avec vigueur et ce sera à la partie taïwanaise d'en assumer toutes les conséquences", a indiqué une source militaire anonyme au sein de l'armée chinoise.
Les autorités de l'île ont dénoncé ce programme, soulignant qu'il menace la sécurité de l'Asie de l'Est. "Certaines des zones des manoeuvres de la Chine empiètent sur (...) les eaux territoriales de Taïwan", a déclaré Sun Li-fang, le porte-parole du ministère taïwanais de la Défense, fustigeant "un acte irrationnel visant à défier l'ordre international".
Le ministère a indiqué que l'armée taïwanaise avait tiré une fusée éclairante dans la nuit de mercredi à jeudi pour éloigner un drone qui survolait l'île de Kinmen, qui se trouve à seulement 10 km de la ville de Xiamen, en Chine continentale. Il n'a pas précisé de quel type de drone il s'agissait ni d'où il provenait.
L'hypothèse d'une invasion s'amplifie
Pour Pékin, ces exercices - ainsi que d'autres, plus limités, démarrés ces derniers jours - sont "une mesure nécessaire et légitime" après la visite de Nancy Pelosi. "Ce sont les Etats-Unis qui sont les provocateurs, et la Chine qui est la victime. La Chine est en situation de légitime défense", a assuré à la presse Hua Chunying, une porte-parole du ministère des Affaires étrangères.
Les exercices visent à simuler un "blocus" de l'île et incluent "l'assaut de cibles en mer, la frappe de cibles au sol et le contrôle de l'espace aérien", a indiqué l'agence officielle Chine Nouvelle.
Si l'hypothèse d'une invasion de Taïwan, peuplée de 23 millions d'habitants, reste peu probable, elle s'est amplifiée depuis l'élection en 2016 de l'actuelle présidente Tsai Ing-wen. Issue d'un parti indépendantiste,Tsai Ing-wen, contrairement au gouvernement précédent, refuse de reconnaître que l'île et le continent font partie "d'une même Chine".
afp/ther